En 1993, la production mondiale délectricité était de 12 300 milliards de kWh (Organisation des Nations Unies (ONU), 1995), 1 kWh correspondant à la quantité délectricité nécessaire pour éclairer 10 ampoules de 100 W pendant une heure. Les Etats-Unis ont produit à eux seuls 25% de lénergie totale. La production américaine, qui comprend des entreprises publiques et privées, sest en effet élevée à 3 100 milliards de kWh en 1993; elle provenait de plus de 10 000 centrales (US Department of Energy, 1995). La fraction de cette industrie, qui est détenue par des investisseurs privés, emploie 430 000 personnes dans lexploitation et la maintenance et enregistre des gains annuels de lordre de 200 milliards de dollars.
Lélectricité est produite dans des centrales qui utilisent des combustibles fossiles (pétrole, gaz naturel ou charbon) ou qui font appel à lénergie nucléaire ou à lénergie hydraulique. En 1990, par exemple, 75% de lénergie électrique produite en France provenait de centrales nucléaires. En 1993, 62% de lélectricité produite dans le monde provenait des combustibles fossiles, 19% de lénergie hydraulique et 18% de lénergie nucléaire. Les autres sources dénergie renouvelables comme le vent, lénergie solaire, lénergie géothermique ou la biomasse ne représentent quune faible proportion de la production mondiale délectricité. A la sortie des centrales, le courant électrique est transmis par des réseaux interconnectés à des systèmes de distribution locaux et, à partir de ceux-ci, aux consommateurs.
En règle générale, le personnel qui permet dassurer toutes ces activités est à dominante masculine et possède un niveau élevé de qualification et de connaissances techniques. Il exerce des tâches très diverses qui ont de nombreux éléments communs avec les secteurs du génie civil, des industries de transformation, des transports et des télécommunications. Certaines de ces opérations seront traitées dans les articles qui suivent. Il sera également fait mention des principales dispositions de sécurité en vigueur aux Etats-Unis dans le domaine de la production et de la distribution dénergie électrique.
Lêtre humain entreprit de domestiquer lénergie des cours deau il y a des milliers dannées. Depuis plus dun siècle, on produit de lénergie électrique à partir dénergie hydraulique. Pour la plupart des gens, cette forme dénergie est associée aux barrages établis en travers des cours deau ou des vallées de montagne (houille blanche), mais il est également possible de produire de lélectricité dorigine hydraulique en tirant parti de lénergie marémotrice (houille bleue). Les retenues créées par les barrages et les digues au fil de leau permettent aussi de contrôler les débits liquides en période de crues et, parfois, dirriguer les terres avoisinantes.
La production délectricité dorigine hydraulique intéresse des territoires très étendus et de nombreux climats, depuis le permafrost arctique jusquà la forêt équatoriale humide. Limplantation géographique des sites de production a évidemment une influence sur les risques professionnels rencontrés. Ainsi, dans certaines régions, les travailleurs employés à la construction et à lexploitation des ouvrages dart et des centrales pourront se trouver en contact avec des insectes ou des animaux dangereux, parfois également avec des plantes vénéneuses.
Un aménagement hydroélectrique comprend en général: un barrage ayant pour but de retenir une grande masse liquide et délever le niveau amont afin de créer une chute qui puisse être exploitée aux fins de production délectricité; un déversoir destiné à évacuer un éventuel trop-plein; une centrale abritant turbines et alternateurs; un canal de fuite pour la restitution de leau après son passage dans les turbines; un poste de transformation en plein air. Des digues de retenue et autres ouvrages de captage peuvent compléter linstallation.
On distingue les barrages de simple retenue, construits au fil de leau, et les barrages daccumulation ou barrages-réservoirs, édifiés dans les hautes vallées. Les premiers sont établis en travers du lit dun cours deau pour créer une dénivellation du plan deau entre lamont et laval du barrage. La centrale de production dénergie se trouve immédiatement en aval, au pied du barrage, et leau ne fait que traverser le corps du barrage. Ces installations turbinent de gros débits sous des chutes relativement faibles.
Les barrages-réservoirs, par contre, sont édifiés au travers de hautes vallées et les centrales se trouvent souvent à des kilomètres de distance. Les débits turbinés sont moins élevés, mais les chutes souvent très importantes. Ces aménagements fournissent de lénergie de pointe lorsque les usines au fil de leau et les centrales thermiques ne peuvent à elles seules satisfaire à la demande de courant. Leau est conduite à la centrale par une galerie damenée (longue souvent de plusieurs kilomètres) et par des conduites forcées, et restituée à la sortie de la centrale par un canal de fuite. Pour éviter les coups de bélier (ondes de pression) qui seraient causés dans les conduites forcées par la brusque manuvre des vannes de la centrale, une chambre déquilibre est insérée au point de jonction de la galerie damenée et des conduites forcées.
En simplifiant, on peut dire que lénergie électrique qui peut être théoriquement fournie par un aménagement hydroélectrique est le produit de la masse liquide, de la hauteur de chute et de laccélération de la pesanteur. La puissance est fonction du débit et de la chute. La hauteur de chute est déterminée par la topographie des lieux et le choix de limplantation tant du barrage que de la centrale, tandis que le débit est un facteur hydrologique. Dans la plupart des centrales modernes, les alternateurs sont couplés aux turbines par un arbre vertical; ils reposent sur le sol de la centrale, alors que les turbines se trouvent immédiatement au-dessous et demeurent invisibles. Il est néanmoins nécessaire, aux fins de visite, de maintenance et de réparation, de pouvoir accéder à lintérieur de ces structures souterraines.
Leau est distribuée aux turbines, selon la hauteur de chute, par un distributeur à aubes annulaire ou par une ou plusieurs buses à pointeau. Les hautes chutes utilisent des turbines Pelton à axe horizontal dans lesquelles leau sortant des buses vient frapper des augets convexes situés à la périphérie des roues. Les chutes moyennes font appel à des turbines Francis à axe vertical auxquelles leau est amenée par un distributeur placé autour de la roue; leau sécoule en direction axiale. Pour les chutes plus faibles, on a recours à des turbines-hélices (turbines de Kaplan) à axe vertical dont les pales sont orientables en fonction de la charge. Dans tous les cas, la turbine entraîne le rotor dun alternateur, cest-à-dire dune génératrice qui produit des tensions et des courants électriques alternatifs, plus faciles à transformer et à transporter que les courants continus.
Certaines installations du début du siècle sont encore en service, ce qui témoigne de la qualité de la conception et de la construction de leurs machines. Dans les alternateurs modernes, les courants produits prennent naissance dans les bobinages dun circuit magnétique fixe, appelé induit ou stator, à lintérieur duquel tourne un circuit magnétique portant les bobines inductrices, appelé inducteur ou rotor. On peut, par analogie, dire que la tension électrique produite est en quelque sorte le reflet de la hauteur de chute, et que lintensité correspond au débit turbiné. Pour maintenir la tension à un niveau constant, il est nécessaire de modifier le débit de la turbine, ce qui se fait en fonction de la puissance demandée.
Les alternateurs des centrales hydrauliques sont le siège de courants de forte intensité et de tension élevée. Ces courants peuvent donner naissance à des arcs électriques, notamment dans les bobinages dexcitation du rotor. Ces arcs peuvent à leur tour générer de lozone, lequel est susceptible, même à de faibles concentrations, de détériorer les pièces en caoutchouc des tuyaux dincendie et autres équipements.
Les alternateurs alimentent des transformateurs principaux de tranche, puis des transformateurs de puissance qui élèvent la tension et, par conséquent, réduisent lintensité en vue dun transport à distance. Abaisser lintensité permet en effet de limiter les pertes dénergie dues à léchauffement des conducteurs pendant le transport. Dans certains transformateurs, les huiles couramment utilisées comme isolants sont remplacées par de lhexafluorure de soufre à létat gazeux. En fait, les décharges électriques peuvent donner naissance à des produits de décomposition notablement plus dangereux que lhexafluorure de soufre (SF6), mais beaucoup moins importants quantitativement que le diélectrique SF6 lui-même.
Les circuits électriques sont équipés de disjoncteurs (sectionneurs) permettant disoler rapidement et parfois automatiquement un alternateur du réseau de distribution. Certains modèles utilisent un souffle dair comprimé pour provoquer le sectionnement; en cas de déclenchement, ces appareils produisent un bruit extrêmement intense.
La plupart des gens connaissent mal la façon dont sont exploitées les entreprises de production délectricité; cest pourtant ce qui détermine généralement leur image aux yeux du public. Elles ont pour rôle dassurer sans interruption un service fiable et disposent de leurs propres bureaux détudes. Au siège central, leurs organes directeurs sont assistés par des équipes dingénieurs et de techniciens et par un personnel administratif. Au niveau de lexploitation, on trouve des chefs de centrale, des surveillants, des répartiteurs, des opérateurs et des équipes chargées dassurer la maintenance des installations et deffectuer les réparations qui peuvent être entreprises sur place. Cela peut conduire à démonter et à déplacer des pièces extrêmement lourdes et encombrantes au moyen de ponts roulants ou dengins de levage spéciaux. Ces diverses opérations présentent les mêmes risques que les opérations analogues effectuées dans dautres secteurs dactivité et appellent les mêmes précautions.
La production régulière dénergie électrique consiste à gérer de manière rationnelle une série dopérations mais, à la différence dautres processus (ceux de lindustrie chimique, par exemple), les centrales hydrauliques sont bien souvent commandées à distance, parfois de très loin. Ce mode de fonctionnement exige, en contrepartie, des systèmes de commande, de régulation et de protection souvent sophistiqués, particulièrement efficaces et fiables. Les centrales ne possèdent pas, dans ces cas, de véritable personnel dexploitation: la quasi-totalité des tâches du personnel sur place consistent en travaux de maintenance et de réparation courantes.
Les entreprises de production et de distribution délectricité sont gérées traditionnellement selon une structure ascendante; cela signifie quelles ont, de tout temps, permis à leurs employés de sélever dans la hiérarchie et même daccéder à des fonctions dirigeantes. Par contre, lintroduction latérale de personnel est plutôt rare. Il en découle un facteur qui joue un rôle très positif pour la sécurité et la santé du personnel: les membres de la direction et, dans tous les cas, les cadres supérieurs, intermédiaires et subalternes, auront connu, à un moment ou lautre de leur carrière, les mêmes conditions de travail (cest-à-dire aussi les mêmes conditions de sécurité ou dinsécurité) que les personnes qui occupent actuellement des postes moins élevés et travaillent sur le terrain. Cela devrait avoir pour résultat une prise de conscience plus aiguë, aux échelons supérieurs de la hiérarchie, des risques encourus par le personnel dexploitation. Dun autre côté, le fait que des personnes désormais éloignées des sources de risques puissent voir les atteintes à leur santé demeurer ignorées sous prétexte quelles ny sont plus exposées devrait conduire à une certaine prudence. Sagissant du bruit, par exemple, dont on sait quil peut avoir des effets cumulatifs, il est possible que des personnes travaillant au siège de lentreprise aient subi antérieurement des pertes appréciables daudition alors quelles exerçaient sur le terrain des emplois impliquant une exposition professionnelle à ce type de nuisance. Ces lésions auraient pu saggraver entre-temps, mais elles échapperaient aux contrôles audiométriques périodiques institués par lentreprise, puisque ces examens sont généralement réservés aux seules personnes exposées actuellement à des niveaux de bruit potentiellement dangereux.
La maintenance de ces installations comprend deux grandes catégories: la maintenance électrique et la maintenance mécanique, dont les risques peuvent être présents simultanément. Toutes deux peuvent être effectuées en parallèle, bien que les compétences et les précautions quelles appellent soient totalement différentes.
La maintenance mécanique peut nécessiter la mise à larrêt et le démontage dun groupe turbo-alternateur entier. Le débit des turbines est contrôlé par les vannes placées au bas des conduites forcées, immédiatement en amont des groupes. Ces vannes peuvent être fermées pour interrompre lécoulement de leau, par exemple lorsquil faut accéder à la bâche ou aux parties mobiles dune turbine ou encore à son canal dévacuation pour voir sils présentent des signes dusure ou des fuites. Une fois le canal vidé, le plan deau sera ramené bien au-dessous de lextrémité inférieure de la turbine et il sera possible de travailler dans lespace ainsi créé.
En cas de nécessité, il simpose parfois de retirer le rotor dun alternateur ou la roue dune turbine de leur logement et de les déposer sur le sol de la centrale pour nettoyer, réparer ou remplacer les bobinages, paliers, coussinets, freins, organes hydrauliques, etc., ou encore pour procéder à des travaux de peinture. Les pales, roues, aubes directrices, injecteurs, déflecteurs et bâches de turbines peuvent avoir été endommagés par la cavitation, phénomène qui se produit lorsque, par suite du mouvement de leau, sa pression devient inférieure à la tension de la vapeur deau. Il se forme alors des bulles de gaz au sein du liquide, et la turbulence causée par ces bulles entraîne une érosion des matériaux exposés. Il faut alors procéder à des réparations par soudage ou métallisation ou réparer et repeindre des surfaces en acier ou en béton. Les effets de la corrosion sur des pièces de métal devraient aussi être réparés.
Des risques très divers sont liés à la production dénergie hydroélectrique. Certains sont communs à tous les travailleurs employés dans ce secteur dactivité, alors que dautres ne concernent que les personnels affectés à des tâches de maintenance électrique ou mécanique. La plupart des risques potentiels sont passés en revue dans les tableaux 76.1 et 76.2, qui énumèrent également les professions exposées et les précautions requises.
Exposition |
Origine |
Personnel concerné |
Méthodes de réduction |
Amiante |
L’amiante peut être présent dans les freins d’alternateurs, les isolants des tuyaux et des câbles, les peintures appliquées au pistolet, l’amiante-ciment et d’autres produits; l’exposition dépend de la friabilité du matériau et de la proximité de la source |
Personnel de maintenance électrique; personnel de maintenance mécanique |
Adoption des meilleures pratiques en usage pour les travaux effectués avec des produits contenant de l’amiante |
Chlore |
Une exposition au chlore peut se produire lors des opérations de raccordement des bouteilles de chlore aux circuits de traitement de l’eau et des effluents |
Opérateurs présents |
Suivre les instructions du fabricant pour l’utilisation des bouteilles de chlore |
Biphényles polychlorés (BPC) |
Des BPC étaient employés comme liquides d’isolation électrique jusqu’au début des années soixante-dix; on peut encore trouver ces liquides ou des résidus de ceux-ci dans les câbles, les condensateurs, les transformateurs ou d’autres équipements; l’exposition se fait par inhalation ou contact avec la peau. La survenue d’un incendie ou d’une chaleur intense lorsque ces équipements sont en service peut transformer les BPC en furannes et en dioxines |
Personnel de maintenance électrique |
Equipement de protection individuelle |
Emissions des moteurs diesel |
Les émissions comprennent principalement du dioxyde d’azote, de l’oxyde nitrique, du monoxyde de carbone, du dioxyde de carbone, du dioxyde de soufre et des particules contenant des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) émis par des véhicules ou des moteurs fonctionnant dans la centrale |
Ensemble du personnel |
Interdiction de faire fonctionner les automobiles et les camions à l’intérieur des locaux |
Fumées de soudage et de brasage |
Présence de cadmium, de plomb et d’argent dans les soudures |
Personnel de maintenance électrique |
Ventilation par aspiration à la source |
Hexafluorure de soufre et produits de décomposition |
La décomposition de l’hexafluorure de soufre sous l’action d’un arc électrique produit des substances gazeuses ou solides considérablement plus toxiques que celui-ci |
Personnel de maintenance électrique |
Ventilation par aspiration à la source |
Huiles et lubrifiants |
Les enroulements des rotors et des stators sont recouverts d’une couche d’huile et de liquides hydrauliques; la décomposition d’hydrocarbures au contact de surfaces chaudes peut produire des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) |
Personnel de maintenance électrique; personnel de maintenance mécanique |
Equipement de protection individuelle (selon les circonstances) |
Ozone |
L’ozone produit par la formation d’arcs électriques dans les rotors et dans d’autres équipements électriques peut poser un problème d’exposition, selon la proximité de la source |
Ensemble du personnel |
Entretien des installations électriques pour éviter la formation d’arcs |
Poussières abrasives (sablage) |
Les poussières peuvent contenir des produits de sablage et des débris de peinture |
Personnel de maintenance mécanique |
Système de captage des poussières |
Produits de décomposition des peintures |
Emissions: monoxyde de carbone, pigments inorganiques contenant du chromate de plomb et d’autres chromates; produits de décomposition des résines des peintures. Les plastifiants utilisés avant 1971 peuvent contenir des byphényles polychlorés (BPC). |
Personnel de maintenance mécanique |
Ventilation par aspiration à la source |
Produits d’explosion de batteries |
Les courts-circuits entre bornes des batteries d’accumulateurs peuvent causer des explosions et des incendies ainsi qu’une exposition à l’électrolyte liquide et aux aérosols |
Personnel de maintenance électrique |
Protection des bornes des accumulateurs et des conducteurs non isolés |
Restes d’insectes |
Certains insectes se reproduisent dans les eaux courantes au voisinage des centrales; après l’accouplement, les adultes meurent et leur carcasse se désagrège et se dessèche |
Ensemble du personnel |
Les insectes qui passent une partie de leur vie dans les eaux courantes perdent leur habitat à la suite de la construction d’une centrale hydroélectrique. Ces organismes peuvent rechercher dans les canalisations d’eau de la centrale un habitat de substitution. Les poussières de leurs restes desséchés peuvent entraîner une sensibilisation allergique |
Solvants de nettoyage |
Le nettoyage des équipements électriques nécessite l’emploi de solvants qui possèdent des propriétés spécifiques d’inflammabilité et de solubilité et qui s’évaporent rapidement sans laisser de résidus; les solvants répondant à ces caractéristiques sont volatils et peuvent présenter des risques à l’inhalation |
Personnel de maintenance électrique |
Ventilation par aspiration à la source |
Vapeurs de peinture |
Les aérosols des peintures contiennent de la peinture et du diluant pulvérisés; les solvants en gouttelettes ou en vapeurs peuvent former un mélange inflammable; des résines peuvent contenir des isocyanates, des époxydes, des amines, des peroxydes et d’autres produits intermédiaires réactifs |
Personnes présentes, peintres |
Cabine de peinture au pistolet |
Exposition |
Origine |
Personnel concerné |
Méthodes de réduction |
Bruit |
Le bruit constant des alternateurs et d’autres sources ou opérations peut dépasser les limites réglementaires |
Ensemble du personnel |
Application des techniques de réduction du bruit |
Chaleur |
Les alternateurs dégagent une chaleur considérable; les alternateurs et les échangeurs de chaleur peuvent rejeter de l’air chaud à l’intérieur de la centrale; la structure de la centrale peut absorber et rayonner l’énergie solaire à l’intérieur du bâtiment; des accidents dus à la chaleur sont possibles pendant les mois les plus chauds, selon le climat et l’effort fourni |
Personnel travaillant à l’intérieur |
Déviation de l’air chaud vers le toit, protections, systèmes de régulation thermique |
Champs électro-magnétiques (y compris à fréquences radio-électriques) |
Les équipements de production d’énergie électrique ainsi que d’autres équipements électriques produisent des champs continus ou des champs alternatifs basse fréquence; l’exposition dépend de la proximité de la source et de la protection offerte par les structures. Les champs magnétiques sont particulièrement difficiles à atténuer par un blindage. L’effet de l’exposition reste à établir |
Ensemble du personnel |
Risque non établi au-dessous des limites actuelles |
Ecrans de visualisation |
Une bonne utilisation des postes de travail informatiques exige l’application des principes de l’ergonomie propres aux écrans de visualisation et au matériel de bureau |
Personnel de bureau (personnel de direction, administratif et technique) |
Application des principes ergonomiques concernant le matériel de bureau à la sélection et à l’utilisation des écrans |
Electrocutions |
Dans les centrales, plusieurs zones contiennent des conducteurs non protégés sous tension; des équipements renfermant des conducteurs protégés peuvent être sous tension si l’on enlève la protection. Les risques d’électrocution résultent de l’entrée délibérée dans des zones non autorisées ou d’une défaillance accidentelle des systèmes de protection |
Ensemble du personnel |
Mise en place de pratiques et de procédures pour assurer la sécurité des personnes travaillant avec des équipements électriques |
Espaces confinés |
Les barrages, ouvrages de retenue, vannes de contrôle, conduites, équipements des alternateurs et des turbines comportent un grand nombre de puits, cuves, enceintes et autres espaces entièrement ou partiellement clos où l’oxygène peut venir à manquer et où l’accumulation de substances ou la présence d’autres risques peuvent se révéler dangereuses |
Ensemble du personnel |
Dispositifs de contrôle de l’air |
Noyades |
Des noyades peuvent se produire à la suite d’une chute dans les eaux courantes de la retenue, du point de restitution ou d’un autre secteur. Aux latitudes élevées, l’eau est extrêmement froide au printemps, en automne et en hiver |
Ensemble du personnel |
Barrières de protection |
Postures de travail incommodes |
Un travail prolongé dans une posture incommode peut conduire à des lésions de l’appareil locomoteur |
Ensemble du personnel |
Equipements conçus selon les principes de l’ergonomie |
Problèmes climatiques |
Le rayonnement ultraviolet peut occasionner des coups de soleil, des cancers de la peau et des cataractes |
Personnel travaillant à l’extérieur |
Vêtements de protection contre le froid |
Travail posté |
Le travail posté peut produire des tensions physiologiques et psychosociales; celles-ci peuvent être particulièrement graves pour les quelques personnes employées au sein de groupes petits et isolés où ce type de travail se rencontre souvent |
Opérateurs intéressés |
Adoption d’horaires qui tiennent compte de ce que l’on sait sur le rythme circadien |
Vibrations mains-bras |
Les vibrations produites par les outils électriques et autres équipements à main sont transmises par les poignées |
Personnel de maintenance électrique; personnel de maintenance mécanique |
Utilisation d’outils répondant aux normes actuelles en matière de vibrations mains-bras |
Vibrations transmises au corps entier |
Les vibrations structurelles ayant pour origine la rotation des alternateurs et les turbulences de l’eau sont transmises par le sol et les parois |
Ensemble du personnel |
Contrôle et entretien des éléments rotatifs pour réduire au minimum les vibrations |
La production dénergie hydroélectrique a été présentée par le passé comme une activité sans danger pour lenvironnement. Certes, la fourniture dénergie et la stabilisation des cours deau présentent de grands avantages pour la société, mais elle saccompagne toujours dun coût pour lenvironnement, qui fait lobjet dune prise de conscience et dune attention croissantes depuis quelques années. Ainsi, on sait aujourdhui que le fait de submerger de grandes étendues de terres et de roches par des eaux acides peut libérer les métaux contenus dans ces matériaux. Une bioaccumulation de mercure a été constatée sur des poissons capturés dans les eaux de zones inondées.
La submersion modifie également les caractéristiques de turbulence de leau ainsi que son degré doxygénation. Ces deux éléments peuvent avoir des effets écologiques sérieux. Ainsi, les remontes de migrations anadromes des saumons ont disparu dans les rivières sur lesquelles des barrages ont été édifiés. Ce phénomène est dû en partie au fait que les poissons sont dans lincapacité de repérer ou demprunter les échelles à poissons qui pourraient les conduire au plan deau supérieur. De plus, létendue deau retenue par une digue ou un barrage ressemble davantage à un lac quà une rivière, et lon sait que les eaux calmes dun lac ne sont pas compatibles avec les migrations des saumons.
Les mises en eau détruisent également les habitats des poissons et aussi parfois les zones de reproduction des insectes, qui servent à la nourriture des poissons et dautres organismes. Dans certains cas, ce sont également des terres agricoles productives et des forêts qui ont disparu. La submersion de zones étendues fait également craindre des changements climatiques ou dautres modifications de léquilibre écologique. Par ailleurs, le fait de retenir des eaux douces qui, jusque-là, sécoulaient dans des eaux salées suscite des inquiétudes quant à de possibles variations de la salinité en aval.
Lexploitation des centrales électriques alimentées au charbon ou aux hydrocarbures appelées aussi centrales thermiques implique toute une série dopérations au cours desquelles les travailleurs peuvent être exposés à des traumatismes et à des agents chimiques ou physiques dangereux. Il est possible de limiter ces risques en conjuguant une conception adéquate, lemploi dune main-duvre qualifiée et une bonne planification des tâches. Une conception adéquate garantit que tous les éléments de la centrale répondent aux prescriptions en matière dintégrité et de sécurité de fonctionnement. La sécurité des opérations de fonctionnement et de maintenance sera également assurée par un aménagement rationnel des équipements (moyens daccès, etc.). Il importe didentifier les risques potentiels et dappliquer les mesures de sécurité requises consistant par exemple à mettre des circuits hors tension, à installer des protections et à porter, en cas de besoin, des équipements de protection individuelle appropriés. Les centrales modernes offrent, dans le domaine de la sécurité, des résultats comparables à ceux dautres industries mécaniques lourdes. La plus forte proportion daccidents ayant entraîné un arrêt de travail se rencontre chez le personnel de maintenance. Les lésions consistent fréquemment en entorses ou contusions des tissus mous du corps et, le plus souvent, en problèmes dorsaux. On trouve aussi des maladies professionnelles associées à une exposition chronique au bruit et, parfois, à lamiante.
Lexploitation dune centrale moderne alimentée au charbon comprend plusieurs opérations.
Il sagit dopérations comprenant la réception du charbon (arrivé par train ou par bateau), son stockage et la reprise des quantités nécessaires pour alimenter les turbo-alternateurs. Elles exigent la mise en uvre déquipements lourds (tracteurs-décapeurs et bouteurs) pour former des tas compactés, ce qui est nécessaire pour éviter que des incendies ne se déclenchent par combustion spontanée. Le charbon est ensuite acheminé par des transporteurs mécaniques jusquà la centrale. Afin de réduire lexposition du personnel aux poussières de charbon, qui peuvent causer une pneumoconiose, on pulvérise de leau sur le charbon en tas et on utilise des cabines de commande fermées équipées de filtres à poussières. Pour certaines tâches entraînant une exposition à des concentrations particulièrement élevées de poussières de charbon, il est nécessaire dutiliser des appareils de protection respiratoire comportant des absorbeurs de particules à haut rendement (HEPA). La plupart des personnes travaillant dans ces zones des centrales sont exposées à des niveaux de bruit supérieurs à 85 dBA qui peuvent causer des pertes daudition. Les mesures de protection consistent dans le port de bouchons auriculaires ou de casques antibruit et dans la mise en uvre dun programme de protection de louïe.
Plusieurs risques courants sont à prendre en compte pour les travailleurs dans cette zone de la centrale. Si les travailleurs opèrent à proximité dun plan deau, il convient dapporter une attention particulière aux méthodes de travail et de prévoir des équipements de sauvetage. Le charbon stocké forme un sol irrégulier et la conduite de nuit de gros engins exige que la zone soit bien éclairée. En ce qui concerne les goulottes de transport du charbon qui sobstruent assez facilement, en particulier pendant les hivers rigoureux et qui doivent être dégagées manuellement, la meilleure prévention consiste à mettre en place des couvercles amovibles qui permettent un accès facile. Par ailleurs, la sécurité dexploitation et de maintenance des grands systèmes de transporteurs mécaniques conduit à prévoir des carters de protection sur les mécanismes dentraînement, les tambours dextrémité, les tendeurs et tous les autres points où le personnel risque dêtre coincé ou happé.
Le fonctionnement dun groupe chaudière-turbine à haute pression exige une série de contrôles rigoureux pour assurer des conditions de sécurité satisfaisantes. Ces contrôles portent sur lintégrité matérielle des équipements ainsi que sur les qualifications et lexpérience du personnel dexploitation. Lintégrité des éléments à haute pression quant à elle est assurée à la fois par lexistence de spécifications appropriées, précisées dans des normes techniques, et par une inspection périodique des joints soudés à laide dun examen à lil nu et de techniques dimagerie non destructives (rayons X et méthodes fluoroscopiques). La pose de soupapes de décharge, contrôlées périodiquement, permet déviter les surpressions dans la chaudière. Les connaissances requises du personnel sont garanties par un programme interne de formation continue associé à un système dautorisation officielle valable pour plusieurs années.
Lenvironnement technique dune centrale est constitué par un ensemble de systèmes complexes servant à alimenter la chaudière en combustible, en air de combustion, en eau déminéralisée et en eau de refroidissement. En plus des risques propres à la vapeur sous haute pression, cet environnement présente divers autres risques courants ou physico-chimiques. En périodes de fonctionnement, le risque le plus courant est le bruit. Des études montrent que pour le personnel affecté à lexploitation ou à la maintenance, lexposition moyenne pondérée en fonction du temps est supérieure à 85 dBA, ce qui nécessite le port dune protection auditive (bouchons auriculaires ou casque antibruit) dans une grande partie de la centrale, ainsi que des contrôles audiométriques périodiques pour vérifier labsence de troubles de laudition. Les principales sources de bruit sont les pulvérisateurs de charbon, les groupes turbo-alternateurs et les compresseurs dair auxiliaires. Les concentrations de poussières dans la centrale pendant les périodes de fonctionnement dépendent de lattention accordée par la maintenance à létat de lisolation thermique. Il sagit dune question particulièrement préoccupante dans la mesure où les matériaux isolants les plus anciens sont en grande partie constitués damiante. Lapplication de mesures rigoureuses (consistant essentiellement à recoller et à confiner lisolant là où il est détérioré) permet dobtenir des concentrations damiante dans lair qui sont à la limite de la détection (< 0,01 fibre/cm3).
Dans lexploitation dune centrale, la dernière étape qui peut présenter des risques est celle de la collecte et de la manutention des cendres. La collecte des cendres seffectue généralement à lextérieur de la centrale au moyen de grands dépoussiéreurs électrostatiques; lusage de filtres en tissu sest développé au cours des dernières années. Dans les deux cas, les cendres sont extraites des gaz de combustion et conservées dans des silos de stockage. Tous les procédés employés pour leur manutention ultérieure causent nécessairement des émissions de poussières, malgré les efforts importants qui sont faits pour limiter les concentrations. Ces cendres (à savoir les cendres volantes, différentes des cendres résiduelles qui saccumulent dans la partie inférieure de la chaudière) contiennent une proportion appréciable de matières respirables (de 30 à 50%) pouvant avoir des effets néfastes sur la santé des travailleurs exposés. Deux constituants de ces cendres ont une importance particulière à cet égard: la silice cristalline (agent de la silicose puis, éventuellement, du cancer du poumon) et larsenic (associé aux cancers de la peau et du poumon). Dans les deux cas, il est nécessaire dévaluer le degré dexposition pour déterminer si les limites réglementaires sont dépassées et si lon doit mettre en place des programmes de lutte spécifiques. Ces analyses, qui peuvent comporter lemploi dappareils de prélèvement individuels, devraient être étendues à tous les travailleurs susceptibles dêtre affectés, y compris ceux qui peuvent être exposés pendant linspection des systèmes de dépoussiérage et des surfaces de broyage et de chauffage de la chaudière, où il est connu que de larsenic se dépose. Le vanadium peut aussi poser un problème lorsque les brûleurs consomment du pétrole. Les programmes de prévention devront, si nécessaire, prévoir des campagnes dinformation pour expliquer aux travailleurs quil est important déviter lingestion de cendres (ne pas manger, boire ou fumer dans les zones de manutention des cendres) et de se laver soigneusement après un contact avec ce type de résidu. Les concentrations de poussières mesurées lors de ces examens atteignent généralement des valeurs telles quil est justifié de mettre en place un programme de protection respiratoire en ce qui concerne lexposition aux poussières nocives totales. Il est à noter à ce propos que la base de données sur la mortalité industrielle aux Etats-Unis, gérée par lInstitut national de la sécurité et de la santé au travail (National Institute for Occupational Safety and Health (OSHA)), ne fournit aucune indication quant aux décès attribuables à une exposition à la silice ou à larsenic dans lindustrie américaine de production dénergie électrique.
Cest pendant les activités de maintenance que lexposition aux facteurs nocifs courants est la plus forte. En raison de la complexité des centrales modernes, il est extrêmement important de prévoir des dispositifs de coupure efficaces des circuits alimentant les diverses parties des installations, de manière quelles ne puissent pas être remises sous tension pendant la durée des interventions. On a généralement recours à cette fin à des systèmes élaborés de verrouillage des appareils de coupure et à des mises en garde.
Les activités de maintenance présentent toute une série de risques courants, en particulier:
Dans tous les cas, ces risques peuvent être pris en compte et gérés au moyen dune analyse systématique consistant à les identifier et à prendre à temps les mesures qui simposent.
Les activités de maintenance impliquent la présence et lutilisation dune grande diversité de produits commerciaux dangereux. Lamiante est encore très répandu, étant donné quil a été largement utilisé comme isolant thermique et quil entre dans la composition de nombreux produits commerciaux. Il convient donc de mettre en uvre toutes les mesures de protection voulues pour faire en sorte que les matériaux contenant de lamiante soient correctement identifiés par une analyse microscopique (lorsquun matériel approprié est disponible sur place, les délais sont nettement plus courts). Le choix des méthodes de protection dépend également de léchelle des opérations. Pour les tâches de grande ampleur, on construira des enceintes fonctionnant sous légère dépression (pour éviter les pertes vers lextérieur) et lon adoptera toutes les dispositions relatives aux «chantiers propres». On veillera également à ce que les travailleurs soient équipés dune protection respiratoire et lon prendra des dispositions rigoureuses pour prévenir une contamination externe. Tout matériau contenant de lamiante devra être intégralement humidifié, placé dans des sacs et repéré par un marquage en vue de son élimination. Avant la reprise des activités, on procédera à un examen approfondi pour sassurer que lamiante a été totalement éliminé. Les concentrations régnant sur les lieux de travail seront enregistrées et lon effectuera périodiquement les examens complémentaires dimagerie médicale jugés nécessaires, conjugués à des explorations fonctionnelles respiratoires pour déceler les débuts déventuelles lésions. En cas de résultat positif, le travailleur sera immédiatement soustrait à toute nouvelle exposition. Fort heureusement, on est parfaitement conscient à lheure actuelle des risques liés à une exposition à lamiante.
Dans leur grande majorité, les autres produits dangereux mis en uvre sont présents en petites quantités seulement et font lobjet dune utilisation sporadique, de sorte que leurs effets sont globalement insignifiants. Les expositions les plus significatives à des produits dangereux tiennent plus à des opérations spécifiques quà des produits particuliers.
Le soudage, par exemple, est une opération courante susceptible de causer des atteintes à la santé. Lexposition aux rayonnements ultraviolets de larc électrique peut entraîner une cécité temporaire et une grave irritation des yeux (ophtalmie des soudeurs à larc). Les vapeurs doxydes métalliques inhalées peuvent causer la «fièvre des fondeurs», tandis que les oxydes dazote et lozone formés aux températures élevées de larc peuvent être à lorigine de pneumonies chimiques et, dans certains cas, de problèmes respiratoires chroniques. Les mesures de protection à appliquer incluent les adaptations du poste de travail, le port décrans oculaires pour protéger de la lumière diffuse les personnes travaillant à proximité, la mise en place dun système dextraction par aspiration localisée ou dune protection respiratoire (appareil de protection respiratoire à adduction dair filtré).
Dautres activités courantes sont le meulage et le sablage, qui présentent des risques dinhalation doxydes métalliques et de particules abrasives. Pour les prévenir, il convient en général de bien choisir lagent abrasif (le sable a été abandonné au profit dagents moins agressifs comme la grenaille dacier ou les coques de végétaux) et de lui associer un système approprié de captage à la source.
Une autre activité comportant des expositions importantes est lapplication de revêtements protecteurs sur des surfaces métalliques. Ces revêtements peuvent contenir des solvants qui vont se dégager dans latmosphère du lieu de travail. Le degré dexposition des travailleurs peut être limité ici aussi par un captage à la source ou, si cette solution est impraticable, par une protection respiratoire appropriée.
Dans tous les réacteurs nucléaires, lénergie thermique est produite par une fission en chaîne des noyaux atomiques du combustible. Le combustible nucléaire le plus courant est luranium 235. A chaque fission, un noyau se scinde en deux parties en libérant également des neutrons qui provoquent de nouvelles fissions. La majeure partie de lénergie ainsi libérée est emportée par les produits de fission et convertie à son tour en énergie thermique dans les atomes voisins qui arrêtent ces produits de fission et absorbent leur rayonnement. Les neutrons emportent environ 3% de lénergie de fission.
Pour éviter un échauffement excessif du cur du réacteur, on utilise un fluide caloporteur liquide ou gazeux qui sert à produire également, de manière directe ou indirecte, la vapeur servant à entraîner la turbine. Le réglage de la réaction de fission au niveau souhaité seffectue au moyen de barres de commande renfermant des absorbeurs de neutrons que lon enfonce ou retire au sein de cavités ménagées dans le cur du réacteur. Dans les réacteurs à eau sous pression, les matériaux absorbants peuvent être introduits dans le circuit de refroidissement du réacteur sous la forme de produits solubles.
La majorité des produits de fission sont instables et donc radioactifs. Ils se désintègrent en émettant des rayonnements dont le type et le taux sont caractéristiques de chacun deux et laissent un produit de filiation qui peut également être radioactif. Cette suite de désintégrations se poursuit jusquà donner des produits qui sont stables, cest-à-dire non radioactifs. Dautres produits radioactifs sont formés dans le réacteur par absorption de neutrons dans les noyaux des atomes de matériaux non fissiles, comme luranium 238, et dans les matériaux des structures, comme les guides, les supports et le gainage des éléments combustibles.
Dans les réacteurs, après un certain temps de fonctionnement, la désintégration des produits de fission et la création de nouveaux produits de fission atteignent un quasi-équilibre. A ce stade, le rayonnement et lénergie résultant de la désintégration des produits radioactifs représentent près dun dixième de lénergie produite dans le réacteur.
Cest la présence de ces grandes quantités de produits radioactifs qui est à lorigine des risques propres aux centrales nucléaires. Dans des conditions normales dexploitation, la majorité de ces produits radioactifs se comportent comme des solides; dautres réagissent comme des gaz ou deviennent volatils aux températures élevées dans le réacteur. Certains de ces produits radioactifs peuvent être facilement absorbés par les organismes vivants et ils ont des effets marqués sur les processus biologiques. Ils présentent donc un danger sils sont émis ou dispersés dans lenvironnement.
Les réacteurs à neutrons thermiques utilisent des matériaux appelés modérateurs pour ralentir les neutrons rapides produits par la fission et en faciliter la capture par les atomes duranium 235 fissile. Leau ordinaire est fréquemment employée comme modérateur. On utilise également le graphite et le deutérium, isotope de lhydrogène, sous la forme doxyde de deutérium, ou eau lourde. Leau ordinaire est essentiellement de loxyde dhydrogène, avec une faible proportion (0,015%) doxyde de deutérium.
La chaleur est extraite du combustible à laide dun fluide caloporteur, qui produit directement ou indirectement la vapeur servant à entraîner la turbine et agit sur la température du cur du réacteur de manière à éviter dans celui-ci une surchauffe qui détériorerait le combustible ou le matériau des structures. Les fluides caloporteurs normalement rencontrés dans les réacteurs à neutrons thermiques sont leau ordinaire, leau lourde et le dioxyde de carbone. Leau, qui a de bonnes caractéristiques en tant que caloporteur (chaleur spécifique élevée, faible viscosité, facilité de pompage), est lagent le plus couramment utilisé dans les centrales nucléaires. Le refroidissement du cur dun réacteur avec de leau sous pression ou de leau bouillante permet datteindre des puissances volumiques élevées, de sorte quil est possible de construire des unités de grande puissance dans des cuves de dimensions relativement modestes. En revanche, les circuits de refroidissement à eau du réacteur doivent fonctionner sous des pressions importantes pour que la vapeur atteigne une pression et une température utiles favorables à un rendement efficace du groupe turbine à vapeur-alternateur. Il est donc capital que les parties extérieures du circuit de refroidissement du réacteur demeurent intactes dans toute centrale nucléaire refroidie par eau, car elles forment une barrière qui assure la sécurité à la fois des travailleurs, du public et de lenvironnement.
Le combustible employé dans tous les réacteurs nucléaires refroidis par eau et dans la plupart des autres réacteurs est le dioxyde duranium sous forme dun composé céramique placé dans une gaine métallique en acier inoxydable ou en alliage de zirconium. Le dioxyde duranium fritté est un produit non inflammable, qui peut être utilisé pendant de longues durées et qui peut retenir ses produits de fission à des températures élevées sans déformation importante ni rupture. Les seuls réacteurs à neutrons thermiques en service qui font appel à un combustible autre que le dioxyde duranium sont ceux des centrales du type magnox, refroidies par du dioxyde de carbone. Ces installations sont en voie de disparition; elles ne sont pas remplacées lorsquelles parviennent à la fin de leur vie utile.
Les absorbeurs de neutrons comme le bore, le cadmium, le hafnium ou le gadolinium, employés sous différentes formes, par exemple comme barres de commande sous gaine dacier ou en solution dans les fluides caloporteurs ou encore comme modérateurs, sont introduits dans le cur du réacteur ou retirés pour régler le taux de fission au niveau fixé. A la différence des procédés de production dénergie dorigine fossile, il nest pas nécessaire daugmenter la quantité de combustible pour accroître le niveau dénergie produit dans une réaction de fission en chaîne.
Une fois amorcée, la montée en puissance se poursuit jusquà ce que lon freine le processus en insérant dans le cur du réacteur une quantité appropriée dabsorbeurs de neutrons et de modérateurs. La montée en puissance est causée par un excédent de neutrons dans la réaction en chaîne par rapport à ce qui est nécessaire pour maintenir léquilibre. Il est donc possible de régler avec une grande précision le taux de fission et la production dénergie qui en résultent en ajoutant ou en retirant de très faibles quantités de matériaux absorbant les neutrons. Lorsquune diminution soudaine de lénergie produite est nécessaire, on introduit dans le cur du réacteur une quantité relativement importante dabsorbeurs de neutrons. Chaque type de réacteur possède ses propres caractéristiques de réactivité qui déterminent la conception des dispositifs dabsorption employés pour le réglage du processus et la mise à larrêt, de manière à assurer une régulation efficace de lénergie produite et, si nécessaire, un arrêt rapide et sûr des opérations. Tous les réacteurs fonctionnent cependant selon les mêmes principes de base en matière de réglage et de sécurité.
Les principaux types de réacteurs thermiques en service à lheure actuelle sont représentés à la figure 76.1, et leurs principales caractéristiques sont indiquées au tableau 76.3. Dans les schémas de principe présentés à la figure 76.1, on remarque des blindages en béton qui entourent les réacteurs et les circuits primaires de refroidissement. Ces blindages, de formes diverses, ont en général le double rôle dassurer une protection contre les rayonnements produits directement par le réacteur et de circonscrire les fuites des circuits de refroidissement ou de modération du réacteur; ils sont normalement conçus pour résister aux fortes pressions qui pourraient être atteintes à la suite dune défaillance grave des circuits de refroidissement.
Type de réacteur |
Combustible |
Modérateur |
Caloporteur et pression approximative (bar) |
Production de vapeur |
Nombre d’unités en service |
Puissance nette (MWe) |
PWR |
Dioxyde d’uranium enrichi |
Eau ordinaire |
Eau ordinaire (160 bar) |
Indirecte |
251 |
223 717 |
PHWR |
Dioxyde d’uranium non enrichi |
Eau lourde |
Eau lourde (90 bar) |
Indirecte |
34 |
18 927 |
BWR |
Dioxyde d’uranium enrichi |
Eau ordinaire |
Eau ordinaire bouillant dans le cur (70 bar) |
Directe |
93 |
78 549 |
GCR |
Uranium métallique non enrichi |
Graphite |
Dioxyde de carbone (20 bar) |
Indirecte |
21 |
3 519 |
AGR |
Dioxyde d’uranium enrichi |
Graphite |
Dioxyde de carbone (40 bar) |
Indirecte |
14 |
8 448 |
LWGR |
Dioxyde d’uranium enrichi |
Graphite |
Eau ordinaire bouillant dans le cur (70 bar) |
Directe |
18 |
13 644 |
FBR |
Mélange d’oxydes |
Néant |
Sodium (10 bar) |
Indirecte |
3 |
928 |
Dans les centrales équipées dun réacteur à eau sous pression (Pressurized Water Reactor (PWR)), le fluide de refroidissement primaire du réacteur et le modérateur sont identiques: on emploie de leau ordinaire purifiée, qui est isolée du circuit secondaire deau dalimentation et de vapeur par une paroi métallique dans léchangeur du générateur de vapeur (appelé parfois chaudière), au travers de laquelle la chaleur est transmise par conduction. La vapeur alimentant le turbo-alternateur nest donc pas radioactive, et le groupe turbine à vapeur-alternateur peut fonctionner comme dans une centrale classique. Etant donné que lhydrogène présent dans leau servant à la modération et au refroidissement primaire absorbe une proportion appréciable de neutrons, il est nécessaire daccroître la concentration en uranium 235 fissile dans le combustible jusquà des valeurs comprises entre 2 et 5% pour maintenir des réactions en chaîne convenant à une production dénergie sur des périodes prolongées.
Dans toutes les centrales actuelles à réacteurs à eau lourde sous pression (Pressurized Heavy Water Reactors (PHWR)), on utilise comme modérateur et comme fluide de refroidissement primaire de leau lourde avec une teneur très élevée en oxyde de deutérium (> 99%). Dans les PHWR de type CANDU, qui représentent la quasi-totalité des PHWR en service, le modérateur est distinct du fluide de refroidissement primaire et il est maintenu à une température et à une pression relativement basses, ce qui permet de disposer dun environnement bien adapté pour limplantation des instruments de contrôle et de commande, ainsi que dune capacité de refroidissement de réserve intégrée en cas de défaillance du circuit de refroidissement primaire. Dans les réacteurs de type CANDU, le combustible et le fluide caloporteur primaire sont disposés dans des tubes de force horizontaux à lintérieur du cur. Comme dans les PWR, le circuit primaire de refroidissement et le circuit secondaire de vapeur et dalimentation en eau sont séparés par une paroi métallique dans léchangeur du générateur de vapeur, paroi à travers laquelle la chaleur est transférée du circuit primaire deau lourde au circuit de vapeur et dalimentation en eau ordinaire. La vapeur injectée dans le turbo-alternateur est donc de la vapeur deau ordinaire, non radioactive (sauf en faible proportion par suite de fuites), et le groupe turbo-alternateur peut fonctionner comme dans une centrale thermique classique. Leau lourde servant de modérateur et de fluide caloporteur nabsorbe quune très faible proportion des neutrons produits pendant la fission, ce qui permet dobtenir une réaction bien adaptée à la production dénergie sur de longues périodes avec de luranium naturel (contenant 0,071% duranium 235). Les PHWR actuellement en service peuvent fonctionner avec un combustible légèrement enrichi en uranium 235, ce qui permet dextraire du combustible une énergie totale proportionnellement plus élevée.
Dans une centrale à réacteur à eau bouillante (Boiling Water Reactor (BWR)), leau de refroidissement primaire est partiellement vaporisée dans le cur même du réacteur et la vapeur ainsi produite est injectée directement dans le turbo-alternateur. La pression de fonctionnement du réacteur est inférieure à celle des réacteurs PWR, mais la pression de la vapeur à la turbine est similaire. Par contre, la vapeur injectée dans la turbine est légèrement radioactive, de sorte que certaines précautions doivent être prises en raison dun risque de contamination modérée de lensemble formé par la turbine et leau dalimentation. Cependant, ce risque ne présente apparemment pas de danger important pour lexploitation et la maintenance des réacteurs BWR. Avec ce type de réacteur, lénergie produite dépend de la quantité de vapeur présente dans le cur, phénomène quil faut compenser par la régulation du débit de caloporteur ou par des accroissements de réactivité lorsque lénergie demandée au réacteur varie.
Les réacteurs magnox, appelés également réacteurs graphite-gaz (Gas Cooled Reactors (GCR)), utilisent comme combustible de luranium métallique non enrichi dans une gaine de magnox, alliage de magnésium à faible teneur en aluminium. Ils sont refroidis au dioxyde de carbone sous pression modérée, mais ils produisent de la vapeur à une température relativement élevée, ce qui donne un bon rendement thermique. Le cur se caractérise par des dimensions importantes et une faible puissance volumique, de sorte que lenceinte sous pression, qui est aussi la seule structure de confinement, atteint également des dimensions élevées. Les enceintes sous pression des premiers réacteurs magnox étaient en acier. Dans les modèles ultérieurs, une enceinte en béton précontraint contient à la fois le cur et les échangeurs de chaleur générateurs de vapeur.
Les réacteurs AGR (Advanced Gas-cooled Reactors) emploient comme combustible du dioxyde duranium enrichi (2,3% duranium 235). Ils sont refroidis au dioxyde de carbone sous des pressions plus élevées que dans les réacteurs magnox et ils présentent des caractéristiques de transfert de chaleur et de rendement thermique améliorées. Les réacteurs de la filière AGR offrent, par rapport aux réacteurs magnox, une plus grande puissance volumique du cur qui leur permet dêtre plus compacts par rapport à leur puissance. La cuve sous pression en béton précontraint, qui contient à la fois le cur du réacteur et les échangeurs de chaleur générateurs de vapeur, fait également fonction denceinte de confinement.
Les réacteurs eau-graphite (Light Water Graphite Reactors (LWGR)) sont un hybride de différents systèmes de production dénergie nucléaire. Les seules centrales de cette filière en service à lheure actuelle sont les réacteurs RBMK (Reaktory Bolshoi Moshchnosti Kanalnye) situés dans lex-Union soviétique, en Russie, en Ukraine et en Lituanie. Dans les réacteurs de ce type, le caloporteur, qui est de leau ordinaire ou légère, coule vers le haut dans des tubes verticaux contenant le combustible et entre en ébullition à lintérieur du cur. La vapeur produite dans le cur est injectée directement dans le turbo-alternateur, comme dans un réacteur à eau bouillante (Boiling Water Reactor (BWR)). Le modérateur en graphite qui entoure les circuits de refroidissement est porté à une température dépassant suffisamment celle du fluide caloporteur pour que la chaleur produite dans le graphite par la modération des neutrons soit éliminée par les circuits de refroidissement. Les réacteurs RBMK ont des dimensions importantes et comportent un grand nombre de tubes de refroidissement (> 1 500).
Les réacteurs surgénérateurs rapides (Fast Breeder Reactors (FBR)) nécessitent un enrichissement du matériau fissile de lordre de 20% et entretiennent la réaction en chaîne de fission essentiellement par labsorption des neutrons rapides produits pendant le processus de fission. Ces réacteurs nont pas besoin de modérateur pour ralentir les neutrons et ils peuvent utiliser les neutrons excédentaires pour produire du plutonium 239, combustible possible pour les réacteurs. Ils produisent donc plus de combustible quils nen consomment. Un certain nombre de ces réacteurs ont été construits dans neuf pays, répartis dans le monde pour la production délectricité, mais lintérêt pour cette filière a progressivement disparu à cause des difficultés techniques et pratiques liées à lutilisation de métaux liquides (sodium) comme caloporteurs et dune consommation spécifique de chaleur très élevée. On ne compte plus actuellement en service que trois ou quatre réacteurs surgénérateurs rapides refroidis par métal liquide (Liquid Metal Fast Breeder Reactors (LMFBR)) exploités pour produire de lénergie. De dimensions relativement modestes, ils produisent au total moins de 1 000 mégawatts dénergie électrique (MWe) et sont progressivement mis hors service. Un très gros effort de développement et beaucoup détudes ont cependant été consacrés à la technologie des surgénérateurs en vue dun recours futur à cette filière si cela se révélait nécessaire.
Le processus qui commence par lextraction du minerai duranium et qui se termine par lévacuation définitive du combustible usé et de tous les déchets produits par le traitement du combustible est appelé habituellement cycle du combustible nucléaire. Ce cycle présente de nombreuses variantes selon le type de réacteur et la conception des dispositifs dextraction de la chaleur du cur. Les cycles des combustibles sont fondamentalement identiques dans les réacteurs PWR et BWR et ne se différencient que par le coefficient denrichissement et sur des points de détail concernant la conception des éléments combustibles. Le cycle comprend les opérations ci-après, qui seffectuent en général en des lieux et avec des équipements différents:
Des précautions doivent évidemment être prises pendant ces opérations pour que la quantité de combustible enrichi présente en un lieu quelconque reste inférieure à la quantité susceptible de produire une réaction en chaîne suffisamment importante, sauf naturellement dans le réacteur. Il en résulte des limitations despace pour les opérations de fabrication, de transport et de stockage.
Les réacteurs de type CANDU, en revanche, utilisent de luranium naturel et se caractérisent par un cycle simple depuis lextraction du minerai jusquà lévacuation du combustible, doù sont exclues les opérations denrichissement et de retraitement. Le combustible pour ces réacteurs est fabriqué de manière semi-automatique sous la forme de faisceaux cylindriques de 50 cm de long qui regroupent 28 ou 37 barres de combustible contenant des pastilles de dioxyde duranium (UO2). Il nexiste pas de limitation despace, ni pour la fabrication de luranium naturel, ni pour le transport ou le stockage du combustible neuf ou irradié. En 1998, limmobilisation et lévacuation du combustible irradié des réacteurs CANDU faisaient lobjet détudes depuis 17 ans au Canada, et lapproche proposée en était au stade de lautorisation.
Dans tous les réacteurs de production dénergie en service, à lexception de ceux du type magnox, le composant de base du combustible est une pastille cylindrique contenant de la poudre de dioxyde duranium (UO2) qui a été compactée puis frittée sous la forme dun matériau céramique ayant la densité et les caractéristiques requises. Ces pastilles frittées, qui sont placées dans une gaine sans soudure en alliage de zirconium ou en acier inoxydable pour produire des barres, ou éléments combustibles, sont chimiquement inertes avec leur gainage aux températures et aux pressions normales du réacteur. Même si la gaine est endommagée ou rompue et que le caloporteur entre au contact de lUO2, le matériau céramique retient la majorité des produits de fission radioactifs et résiste à la détérioration causée par leau à haute température.
Les réacteurs magnox utilisent comme combustible de luranium naturel métallique dans une gaine dalliage de magnésium, et ils fonctionnent avec succès à des températures relativement élevées parce que le caloporteur, du dioxyde de carbone, ne réagit pas à sec avec ces métaux.
Fondamentalement, les barres de combustible dun réacteur nucléaire ont pour fonction de transférer au caloporteur la chaleur de fission produite dans le combustible en demeurant intactes dans les conditions transitoires les plus rigoureuses. Pour tous les réacteurs en service, des essais approfondis de combustibles simulés, effectués dans des laboratoires détudes du transfert de chaleur, ont démontré que les conditions maximales transitoires prévues à lintérieur du réacteur pouvaient être supportées avec une marge de sécurité suffisante par les éléments combustibles spécifiquement conçus et autorisés pour la filière concernée.
Le combustible neuf fourni à la centrale par lusine de fabrication est très peu radioactif et il peut être manipulé à la main ou avec des engins de levage et de manutention commandés manuellement, sans blindage. Un assemblage combustible type pour un réacteur PWR ou BWR est constitué dun ensemble en carré de quelque 200 barres de combustible denviron 4 m de long et pesant approximativement 450 kg. Un grand réacteur PWR ou BWR nécessite environ 200 assemblages. Le combustible est transporté par des ponts roulants et empilé au sec dans la zone de stockage du combustible neuf. Toutes les opérations de chargement du combustible neuf dans un réacteur à eau ordinaire en service comme un PWR ou un BWR sont conduites sous une profondeur deau suffisante pour protéger les personnes se trouvant au-dessus du réacteur. On doit dabord enlever le couvercle à bride de la cuve du réacteur et décharger une partie du combustible irradié (normalement entre le tiers et la moitié du cur) au moyen dun pont roulant et de descenseurs de combustible. Le combustible irradié est placé dans des bassins de stockage remplis deau. Dans le cur, dautres assemblages combustibles irradiés peuvent être déplacés (en général rapprochés du centre du cur) pour régulariser lénergie produite dans le réacteur. Des assemblages combustibles neufs sont alors installés dans tous les emplacements vacants. Le rechargement en combustible dun grand réacteur peut prendre de deux à six semaines selon les effectifs disponibles et la quantité de combustible à remplacer.
Les réacteurs CANDU et certains réacteurs refroidis au gaz sont rechargés en marche au moyen déquipements commandés à distance qui extraient le combustible irradié et insèrent de nouveaux éléments combustibles ou de nouveaux faisceaux. Dans le cas du réacteur CANDU, le combustible se présente sous la forme de faisceaux de barres de combustible de 50 cm de long, dun diamètre de 10 cm environ et dun poids approximatif de 24 kg. Le combustible est envoyé par le fabricant dans des emballages en carton et stocké dans une zone spéciale avant dêtre chargé dans le réacteur. Dans un réacteur en service, on procède généralement à des chargements quotidiens pour maintenir la réactivité du réacteur. Le rechargement seffectue normalement à raison de douze faisceaux par jour dans les grands réacteurs CANDU. Les faisceaux sont déposés manuellement sur un dispositif de chargement du combustible neuf qui les transfère dans une machine de chargement commandée à distance depuis la salle de contrôle de la centrale. Pour le chargement dun combustible neuf dans un réacteur, deux machines de chargement sont manuvrées à distance et couplées aux extrémités du canal horizontal à recharger. Les machines de chargement ouvrent le canal à ses deux extrémités, alors que le circuit de refroidissement est à sa pression et à sa température de service, et le combustible neuf est inséré par une extrémité tandis que le combustible irradié est retiré par lautre. Lorsque le nombre requis de faisceaux a été installé, la machine de rechargement remet en place les obturateurs du canal et peut ensuite procéder au rechargement dun autre canal ou au déchargement du combustible épuisé dans une cuve de stockage remplie deau.
Le combustible irradié déchargé des réacteurs en service est toujours très radioactif et nécessite un refroidissement pour éviter une surchauffe, ainsi quun blindage pour prévenir une irradiation directe des organismes vivants ou des équipements à proximité. La solution retenue en général consiste à limmerger dans un bassin sous une hauteur deau de 4 m au moins pour assurer une protection suffisante. On peut ainsi observer en toute sécurité le combustible dans leau et y accéder pour le transférer sous leau par des systèmes automatisés jusquà un site de stockage de plus longue durée.
Un an après le déchargement dun réacteur, la radioactivité globale du combustible irradié et sa production de chaleur seront réduites à 1% environ de leur valeur initiale au moment du déchargement et, dix ans après, à 0,1% environ. Cinq à dix ans après le déchargement, la production de chaleur aura suffisamment diminué pour permettre de sortir le combustible du bassin afin de le stocker au sec dans un conteneur refroidi uniquement par la circulation naturelle de lair sur les surfaces en ailettes. Le combustible reste cependant très radioactif, et un blindage de protection contre son rayonnement direct est nécessaire pendant plusieurs décennies encore. Une prévention de lingestion de particules de combustible par des organismes vivants est également nécessaire pendant une période bien plus longue.
Les procédés dévacuation définitive du combustible provenant des réacteurs de production dénergie en sont encore au stade des études et de lautorisation. Le stockage de ce combustible dans diverses formations géologiques fait lobjet détudes intensives dans plusieurs pays mais, jusquà présent, il na été autorisé nulle part dans le monde. En 1998, le stockage à grande profondeur dans des formations rocheuses stables était en voie dêtre approuvé au Canada en tant que méthode sûre et pratique pour lévacuation définitive de ces déchets hautement radioactifs. On prévoit cependant que, même dans le cas où cette méthode serait autorisée vers lan 2000, lévacuation effective du combustible irradié nentrerait pas en pratique avant 2025 environ.
Dans les 33 pays mettant en uvre des programmes dénergie nucléaire, il existe des organismes chargés détablir des règles de sûreté et de sécurité pour lexploitation des installations nucléaires et de veiller à leur application. Toutefois, cest en général lentreprise productrice dénergie propriétaire et exploitante des installations nucléaires qui est responsable à tous égards de la sécurité de leur exploitation. Les opérateurs ont en fait un rôle de gestion consistant à recueillir linformation, à planifier et à prendre des décisions, et ils nexercent quoccasionnellement un rôle plus actif en cas dinterruption des opérations courantes. Lexploitant nest pas linstance primaire de sécurité.
Toutes les centrales nucléaires modernes disposent de systèmes de contrôle et de sûreté automatiques, extrêmement fiables et très rapides, qui protègent en permanence le réacteur et les autres éléments de la centrale et qui sont généralement conçus pour assurer, grâce à des défenses en profondeur, la sûreté en cas de perte de courant. Il nincombe pas aux opérateurs dassurer parallèlement les mêmes tâches que ces systèmes automatiques ni de les remplacer. Ils doivent cependant être capables darrêter presque instantanément le réacteur en cas de besoin, ainsi que de déceler tout problème de fonctionnement de la centrale et de réagir en conséquence, de manière à élargir la gamme des mesures de protection. Les opérateurs doivent être aptes à comprendre, à diagnostiquer et à prévoir lévolution de la situation générale sur la base du grand volume dinformations fourni par les systèmes automatiques de transmission de données.
Un opérateur doit:
La manière dont lopérateur sacquittera de ces tâches dépend à la fois de la conception de la centrale et des compétences et de la formation quil possède.
Toute centrale nucléaire doit disposer en permanence déquipes dopérateurs compétents, stables et suffisamment formés. Les futurs opérateurs dune centrale nucléaire reçoivent une instruction complète comprenant généralement des cours et une formation pratique portant sur les bases scientifiques, les équipements et les réseaux électriques, la radioprotection, ainsi que les politiques et les principes dexploitation. Aux Etats-Unis, dans les centrales nucléaires de production dénergie électrique, on entraîne les opérateurs sur des simulateurs pour quils acquièrent une expérience pratique de lexploitation dune centrale, pendant un incident et dans des conditions inhabituelles. Linterface entre les opérateurs et les systèmes est constituée par linstrumentation de la salle de contrôle. Une instrumentation bien conçue aide les opérateurs à interpréter les situations et à y répondre correctement.
Il est de pratique courante de nommer les cadres dexploitation dune centrale nucléaire alors quelle est encore en construction, afin quils puissent donner leur avis du point de vue technique et constituer léquipe qui sera chargée de sa mise en service et de son fonctionnement. Ils sont également chargés de définir toutes les procédures dexploitation avant quelle ne soit mise en service et autorisée à fonctionner. Ces procédures sont examinées par des spécialistes de la conception des centrales et par des représentants des organismes de réglementation qui sassurent de la conformité entre paramètres de conception et pratiques dexploitation.
Il est demandé au personnel de faire fonctionner la centrale avec méthode et rigueur, conformément aux procédures dexploitation et aux autorisations de travail. Le personnel dexploitation veille en permanence à assurer la sécurité du public en procédant à des essais et à des contrôles complets des systèmes de sûreté et des barrières de protection et en conservant la capacité de faire face à toutes les situations durgence. Lorsque les opérateurs doivent prendre des mesures à la suite dune dégradation de la situation dans une centrale, ils ont à leur disposition des procédures écrites systématiques pour les guider et leur apporter les informations détaillées nécessaires à la maîtrise des installations. Ces procédures sont révisées par les commissions de sécurité de la centrale et des organismes officiels indépendants.
Une bonne gestion de la sécurité nécessite:
En plus des procédures adoptées pour lexploitation normale, il existe dans chaque centrale nucléaire un système de notification des événements pour analyser et documenter les défaillances ou les détériorations déquipements, les défauts de conception ou de construction et les erreurs dexploitation détectées par les systèmes de surveillance ou lors des essais et inspections périodiques. Son but est de déterminer la cause principale de chaque événement pour pouvoir prendre des mesures correctives ou préventives. Les rapports sur ces événements, avec les résultats de lanalyse et des recommandations, sont examinés par la direction de la centrale ainsi que par des spécialistes de la sûreté et des facteurs humains qui ne font généralement pas partie du personnel.
LAgence internationale de lénergie atomique (AIEA) a établi un système de notification des incidents qui est utilisé dans le monde entier en complément des systèmes nationaux et qui permet de diffuser linformation dans tous les pays participants. LAssociation mondiale des exploitants de centrales nucléaires (World Association of Nuclear Operators (WANO)) assure également des échanges dinformations détaillées en matière dexploitation.
Les réacteurs nucléaires ainsi que tous leurs systèmes auxiliaires et systèmes importants pour la sûreté font lobjet dun programme de maintenance et de contrôle conformément aux normes dassurance qualité et selon une périodicité déterminée, afin que leur fiabilité soit garantie pendant toute leur vie utile. En plus du programme de surveillance automatique, il est prévu des contrôles et des examens systématiques manuels pour déceler les anomalies ou les défaillances des équipements. Ces actions comprennent une surveillance régulière sur les lieux, une maintenance préventive des contrôles périodiques et létude des changements intervenus.
Des objectifs de performance très élevés sont fixés pour les systèmes dexploitation et de sûreté, afin que le risque pour le public et le personnel des centrales demeure suffisamment faible. Pour les systèmes dexploitation, qui sont actifs pendant la production délectricité, les taux de défaillance sont comparés aux objectifs de performance et il peut en résulter des changements dans la conception si la performance est inférieure à la normale attendue. Les systèmes de sûreté nécessitent une approche différente, du fait quils ne sont activés quen cas de défaillance dun système dexploitation. Ces systèmes et leurs éléments sont surveillés par des programmes de contrôle complets, dont les résultats permettent de déterminer la probabilité pour chaque système dêtre hors service pendant une partie du temps. Une fois calculé, le temps dindisponibilité total des systèmes de sûreté est comparé à une norme de performance très élevée. Si lon détecte un défaut dans un système de sûreté, ce dernier est immédiatement réparé ou le réacteur mis à larrêt.
Des programmes étendus de contrôle et de maintenance sont également prévus pendant les arrêts programmés. Par exemple, la totalité des cuves et des composants sous pression, ainsi que leurs soudures, sont inspectés systématiquement par des méthodes non destructives selon la réglementation des codes de sécurité.
Quatre aspects de la réaction en chaîne de fissions sont potentiellement dangereux; comme ils sont indissociables de lutilisation de lénergie nucléaire pour produire de lélectricité, ils exigent des mesures de sécurité:
Les prescriptions de sûreté quappellent les phénomènes ci-dessus expliquent les principales différences que lon peut relever pour ce qui est des équipements de sécurité et de la stratégie dexploitation entre les centrales nucléaires et les centrales à combustibles fossiles. Les méthodes permettant de satisfaire à ces prescriptions diffèrent selon le type de centrale nucléaire, mais les principes fondamentaux de sécurité sont les mêmes pour toutes.
Dans les procédures dautorisation, il est exigé dapporter, pour chaque installation nucléaire, la preuve que les émissions radioactives seront inférieures à des limites réglementaires spécifiées, aussi bien dans les conditions normales dexploitation quen cas de défaillance ou daccident. Lobjectif prioritaire est déviter les défaillances ou de se limiter à en atténuer les effets, mais la conception doit permettre de faire face aux défaillances qui peuvent néanmoins se produire malgré toutes les précautions prises. Il faut pour cela le plus haut niveau dassurance et de contrôle de la qualité pour lensemble des équipements, des constructions, des fonctions et des opérations. Des caractéristiques de sécurité intrinsèques et des équipements de sécurité ont pour rôle de prévenir et de limiter les accidents, et de contenir et dabaisser le plus possible les émissions de matières radioactives.
En particulier, il faut à tout moment que la capacité de refroidissement corresponde à la production de chaleur. Pendant lexploitation, la chaleur est extraite du réacteur par un fluide caloporteur qui est pompé dans un système de canalisations raccordé au réacteur et qui sécoule sur la surface de la gaine du combustible. En cas de perte de puissance des pompes ou de défaillance soudaine des canalisations, le refroidissement du combustible serait interrompu et il pourrait en résulter une élévation rapide de sa température et, éventuellement, une détérioration du gainage et une fuite de matières radioactives du combustible dans la cuve du réacteur. Un arrêt rapide de la réaction en chaîne, associé le cas échéant à lactivation de systèmes de refroidissement de secours ou durgence, permet déviter une détérioration des éléments combustibles. Ces mesures de sécurité sont prévues dans toutes les centrales nucléaires.
Même lorsque le réacteur a été arrêté, un échauffement anormal du combustible peut se produire en cas de perte de la capacité de refroidissement et de défaillance des systèmes de refroidissement de secours ou durgence; en effet, la production de chaleur se poursuit du fait de la radioactivité et des fissions résiduelles, comme le montre la figure 76.2. Bien que la chaleur résiduelle ne représente que 1 à 2% de la chaleur produite à plein régime, si elle nest pas éliminée, la température du combustible peut atteindre des niveaux susceptibles de provoquer une défaillance dans les minutes qui suivent la perte complète de refroidissement. La sûreté des centrales nucléaires repose sur le principe selon lequel toutes les conditions pouvant conduire à un échauffement anormal du combustible, à des dommages et au rejet de matières radioactives provenant du combustible doivent être soigneusement évaluées et évitées grâce à des mesures de prévention technique et de protection.
La sûreté des centrales nucléaires est assurée par trois types déquipements: les systèmes intrinsèques, les systèmes passifs et les systèmes actifs, qui sont associés de différentes manières dans les centrales en fonctionnement.
Les dispositifs de sûreté intrinsèque tirent parti des lois de la nature. Par exemple, certains combustibles nucléaires ont des caractéristiques telles que la vitesse de la réaction en chaîne ralentit lorsque la température du combustible augmente. Certains systèmes de refroidissement sont conçus de manière que la chaleur de désintégration soit éliminée par une circulation naturelle du caloporteur autour du combustible sans recourir à des pompes. Enfin, la plupart des structures métalliques ont des propriétés telles quelles fléchissent ou se dilatent lorsquelles sont exposées à des charges extrêmement élevées au lieu déclater ou de se rompre.
Les dispositifs de sûreté passive comprennent le déclenchement de vannes de décharge par gravité sous leffet de la pression du fluide à évacuer, ou lutilisation de lénergie stockée dans des systèmes dinjection de secours de fluide caloporteur, ou encore la présence denceintes de confinement conçues pour absorber lénergie dégagée par la défaillance de circuits entraînant la production de chaleur de désintégration.
Les dispositifs de sécurité active comprennent tous les systèmes qui nécessitent le déclenchement de signaux et une forme quelconque dalimentation électrique. Les systèmes actifs permettent généralement de gérer une plus grande diversité de situations que les systèmes intrinsèques ou passifs, et ils peuvent être vérifiés sans restriction pendant le fonctionnement du réacteur.
La conception des centrales nucléaires du point de vue de la sûreté sappuie sur une combinaison déterminée de systèmes intrinsèques, passifs et actifs visant à répondre aux prescriptions de sûreté applicables sur le territoire où la centrale est implantée. Il est nécessaire que les systèmes liés à la sûreté soient hautement automatisés pour éviter, dans toute la mesure possible, que le personnel dexploitation ne doive prendre des décisions à la hâte et agir en situation de stress. Les filières de réacteurs nucléaires sont conçues pour sadapter automatiquement aux variations de la puissance appelée, et ces variations sont généralement progressives. Il est particulièrement important que les systèmes liés à la sûreté puissent à tout moment réagir avec rapidité, efficacité et fiabilité en cas de besoin. Pour atteindre ce niveau élevé de performance, ils doivent satisfaire à des critères dassurance de la qualité extrêmement rigoureux et être conçus selon les principes bien établis de la sûreté, à savoir la redondance, la diversité et la séparation physique.
La redondance consiste à prévoir plus de composants ou de sous-systèmes quil nest nécessaire pour le seul fonctionnement du système; on prévoira, par exemple, trois ou quatre composants alors quil suffit que deux fonctionnent pour que le système marche correctement.
La diversité consiste à prévoir, pour exécuter la même fonction de sûreté, deux systèmes ou plus fondés sur des principes de conception ou de fonctionnement différents.
La séparation physique de composants ou de systèmes conçus pour remplir la même fonction de sûreté assure une protection contre des dommages localisés qui pourraient autrement compromettre lefficacité des systèmes de sûreté.
Lapplication de ces principes à la conception des installations trouve notamment son illustration dans lalimentation électrique des centrales nucléaires, pour laquelle on prévoit plus dune connexion au réseau, avec en outre, sur le site, plusieurs groupes diesel ou turbines à gaz à démarrage automatique ainsi que des batteries daccumulateurs et des groupes électrogènes, de manière à obtenir une alimentation électrique fiable pour les systèmes essentiels à la sûreté.
Pour prévenir le rejet de matières radioactives dune centrale nucléaire, il existe une mesure élémentaire très simple: le principe consiste à ériger une série de barrières étanches entre ces matières et lenvironnement pour assurer une protection contre les rayonnements directs et un confinement des matières radioactives. Au cur de ces barrières, on trouve le combustible céramique ou métallique lui-même, qui forme une matrice dans laquelle sont captées la majorité des matières radioactives. La deuxième barrière est constituée par la gaine étanche et résistante à la corrosion. La troisième barrière est lenveloppe du fluide primaire sous pression du circuit de refroidissement. Enfin, les installations nucléaires sont disposées pour la plupart à lintérieur dune enceinte de confinement résistant à la pression, conçue pour ne pas céder en cas de défaillance de la principale canalisation placée à lintérieur et pour retenir les matières radioactives qui pourraient être rejetées.
Le principal objectif de la conception de sûreté des centrales nucléaires est de maintenir lintégrité de ces barrières multiples par une défense en profondeur, qui peut être caractérisée par des mesures de sûreté prises à trois niveaux: mesures et dispositifs de prévention, de protection et datténuation.
Les mesures de prévention visent à garantir le plus haut niveau dassurance de la qualité pendant létude, la construction et lexploitation; disposer dopérateurs ayant une formation poussée et soumis à un recyclage périodique; mettre à profit les caractéristiques de sécurité intrinsèques; se donner des marges suffisantes à létape de conception; effectuer des travaux de maintenance préventive minutieux; mener continuellement des activités de contrôle, dinspection et de correction des anomalies; assurer une surveillance permanente; procéder à des évaluations approfondies de la sûreté et à des réévaluations au besoin; étudier les incidents et les erreurs, en analyser les causes; et effectuer les modifications nécessaires.
Les dispositifs de protection comprennent: des systèmes darrêt rapide; des vannes et des systèmes de détente automatiques et sensibles; des circuits de verrouillage pour assurer une protection contre les fausses manuvres; une surveillance automatique des fonctions de sûreté fondamentales; le mesurage et le contrôle continus des niveaux de rayonnement et de la radioactivité des effluents pour éviter de dépasser les limites admissibles.
Les mesures et les dispositifs datténuation comprennent: des systèmes de refroidissement durgence du réacteur; des systèmes très fiables dalimentation en eau en cas durgence; des systèmes divers et redondants pour lalimentation électrique de secours; une enceinte de confinement destinée à éviter les fuites de matières radioactives à lextérieur de la centrale et conçue pour résister à différents événements naturels et artificiels, tels que tremblements de terre, vents violents, inondations ou écrasements davions; et enfin des plans dintervention et une gestion des accidents, ce qui comprend une surveillance radiologique, linformation des autorités responsables de la sûreté et des conseils à la population, ainsi que la limitation de la contamination et la distribution de substances permettant den atténuer les effets.
Toutefois, la sûreté nucléaire ne dépend pas uniquement de facteurs techniques et scientifiques; les facteurs humains jouent eux aussi un rôle très important. Le contrôle réglementaire permet une vérification indépendante de tous les aspects des centrales nucléaires touchant à la sûreté. Mais la sûreté nucléaire est assurée en premier lieu, non par des lois et des règlements, mais par le sérieux de la conception, de lexploitation et de la gestion des installations, ce qui suppose que les études indispensables soient réalisées et les approbations voulues données par des personnes possédant les compétences et lautorité nécessaires.
Le seul accident de centrale nucléaire qui ait eu de très graves conséquences pour la population sest produit lors dun essai de la capacité de refroidissement dans une configuration inhabituelle dans une centrale RBMK à Tchernobyl (Ukraine) en 1986. Lors de cet accident particulièrement grave, le réacteur a été détruit et une grande quantité de matières radioactives a été rejetée dans lenvironnement. On a constaté par la suite que le réacteur ne possédait pas de système darrêt adéquat et quil était instable à faible puissance. Laccident a été la résultante de faiblesses de conception, derreurs humaines et dune gestion inadaptée. Des modifications ont été apportées aux autres réacteurs RBMK restés en service pour corriger les insuffisances de conception les plus graves, et les consignes dexploitation ont été améliorées pour faire en sorte que ce regrettable accident ne se reproduise pas.
De nombreux enseignements ont été tirés de cette catastrophe ainsi que dautres accidents moins graves survenus dans des centrales nucléaires (comme celui de Three Mile Island aux Etats-Unis en 1978) et dun grand nombre daccidents mineurs et dincidents enregistrés au cours de plus de trente années dexploitation de centrales nucléaires. Lobjectif de lindustrie nucléaire est de veiller à ce quaucun incident de centrale nucléaire ne mette en danger le personnel, le public et lenvironnement. Grâce à la coopération étroite qui sest instaurée dans le cadre de programmes tels que le système de notification des incidents de lAIEA et le programme du WANO, et grâce aussi au contrôle minutieux exercé par les groupes industriels et par les organismes de réglementation ainsi quà la vigilance des propriétaires et des exploitants de centrales, cet objectif apparaît désormais réalisable.
Remerciements: Lauteur remercie Tim Meadler et lUranium Institute pour les renseignements présentés au tableau 76.3.
La fourniture dénergie électrique comporte trois étapes: la production, le transport et la distribution. Chacune delles se caractérise par des processus, des activités et des risques qui ne sont pas nécessairement les mêmes.
La majorité de lélectricité est produite à des tensions de 13 200 à 24 000 V. Les risques liés à la production dénergie électrique comprennent les explosions et les brûlures résultant de défaillances imprévues des équipements. Des accidents peuvent également survenir lorsquon ne respecte pas les procédures appropriées de verrouillage et de signalisation. Ces procédures sont mises en place pour assurer la maîtrise des sources dénergie. Avant dintervenir sur une installation ou un circuit où une mise sous tension, un démarrage ou un dégagement dénergie stockée pourraient se produire de manière inopinée et occasionner un accident, il est nécessaire que linstallation ou le circuit soient isolés de la source dénergie ou rendus inopérants. Labsence dune isolation adéquate de la source dénergie (notamment par verrouillage en position ouverte, signalisation, vérification dabsence de tension, mises à la terre et en court circuit) peut provoquer de graves lésions et même la mort.
Lélectricité produite est transportée à distance par des lignes partant des postes de transformation situés dans lenceinte des centrales. Ces lignes peuvent être aériennes, suspendues à des pylônes, ou souterraines. Elles fonctionnent sous des tensions élevées et transportent dimportantes quantités dénergie électrique sur des distances considérables. A la sortie de la centrale, des transformateurs élèvent la tension à des valeurs allant de 138 000 à 765 000 V. Dans la zone dexploitation, dautres postes abaissent la tension transportée jusquà des valeurs comprises entre 34 500 et 138 000 V. Cette énergie est ensuite acheminée par des lignes jusquaux réseaux de distribution de la zone de desserte locale. Les principaux dangers, pendant ces opérations de transport, sont de nature électrique. Le non-respect des distances de sécurité ou la non-utilisation des équipements de protection (gants, manchettes en caoutchouc, etc.) peuvent être la cause daccidents graves, voire mortels. Les chutes risquant de se produire pendant les travaux sur des lignes aériennes et lorsquon se trouve agrippé à un poteau ou installé dans une nacelle peuvent également occasionner des accidents lourds de conséquences.
Le réseau de distribution relie le réseau de transport aux installations des clients. Les postes de distribution ramènent la tension de lélectricité transportée à des valeurs allant de 2 400 à 19 920 V. Un transformateur de distribution permet de réduire encore la tension. Les risques liés aux travaux sur les réseaux de distribution sont également de nature électrique, avec toutefois le danger supplémentaire que comporte le fait de travailler dans des espaces confinés dans le cas dun réseau de distribution enterré.
Les postes de transport et de distribution sont des installations où la tension, le nombre de phases ou dautres caractéristiques de lénergie électrique sont modifiés pendant la phase finale du processus de distribution. Les électrocutions sont le principal risque rencontré dans ces postes. Elles se produisent généralement parce que lon na pas respecté les consignes (distances de sécurité par rapport aux équipements électriques sous tension, etc.) ou que lon a négligé dutiliser des équipements de protection individuelle adéquats, notamment des manchettes et des gants isolants en caoutchouc.
La norme sur la production, le transport et la distribution dénergie électrique (Electric Power Generation, Transmission and Distribution Standard) appelée également norme sur lentretien des installations électriques (Electric Maintenance Standard), portant le code 29 CFR 1910.269, a été promulguée par lAdministration de la sécurité et de la santé au travail (Occupational Safety and Health Administration (OSHA)), aux Etats-Unis, le 31 janvier 1994. Elle sapplique à tous les travailleurs des services publics affectés à lexploitation et à lentretien des installations de production, de transport et de distribution de lénergie électrique ainsi que des équipements annexes. Ses dispositions sappliquent également au personnel des entreprises extérieures chargées de travaux sur les lignes ou de lélagage des arbres à proximité, ainsi quaux producteurs dénergie indépendants. Dautres pays ont une réglementation similaire.
Les risques directement visés par la norme OSHA sont les risques électriques susceptibles doccasionner une électrocution ou des lésions à la suite dun choc électrique. Un contact accidentel avec un courant électrique délivré sous haute tension entraîne fréquemment la mort ou de graves lésions, comme des brûlures au second ou au troisième degré, des lésions nécessitant lamputation dun membre, ainsi que des atteintes des organes internes et des dommages neurologiques.
La norme traite également des risques de lésions associées à quatre autres types daccidents: le heurt par ou contre un objet; les chutes dune échelle, dun échafaudage, dun poteau ou de tout autre endroit élevé; le happement par une machine ou le coincement entre deux parties dune machine à la suite de sa mise en route intempestive pendant des travaux dentretien courants; et les expositions à des températures très élevées en cas de dégagement accidentel de vapeur à haute pression au cours de travaux sur des chaudières. LEastern Research Group (ERG), qui avait préparé létude dimpact économique pour le projet de réglementation de lOSHA, a déclaré que les accidents en rapport avec les lignes de transport et de distribution ont été plus nombreux que ceux survenus à des postes électriques ou dans des installations de production dénergie électrique. Il a précisé que, dans le secteur des lignes de transport et de distribution, les victimes de la majorité des accidents mortels et des accidents graves étaient des personnes travailleurs qualifiés, apprentis ou contremaîtres qui travaillaient sur ces lignes. Dans les postes électriques et les installations de production dénergie électrique, ce sont les électriciens et les équipes de maintenance générale qui sont le plus fréquemment victimes daccidents.
LOSHA a estimé que, aux Etats-Unis, il survient en moyenne chaque année 12 976 accidents entraînant un arrêt de travail parmi le personnel affecté à la production, au transport et à la distribution de lénergie électrique, ainsi que 86 décès. Elle a calculé que, si les dispositions de la norme de 1994 citée plus haut et des autres normes auxquelles elle se réfère étaient respectées, 1 633 accidents avec arrêt et 61 décès pourraient être prévenus chaque année. Le nombre daccidents ainsi évités se répartit en deux catégories. Cest dans les entreprises publiques de production délectricité, qui comptabilisent environ 80% des décès, que la plus grande amélioration est attendue. Les sous-traitants des entreprises publiques, y compris les fournisseurs délectricité et les entreprises chargées de lélagage à proximité des lignes, ainsi que les sociétés privées productrices délectricité, représentent les 20% restants. LOSHA considère par ailleurs que ce sont les entreprises publiques de production délectricité qui devraient connaître la plus forte réduction du nombre daccidents avec arrêt. La seconde catégorie a trait aux normes existantes auxquelles il est fait référence dans la norme 1910.269. Ainsi, selon lOSHA toujours, lemployeur devrait assurer les services médicaux et de premiers soins prévus dans la norme 1910.151.
Les travaux dexcavation doivent être conformes à la section P du groupe de normes 1926; les équipements de protection individuelle à la section I du groupe de normes 1910; les dispositifs individuels antichute à la section E du groupe de normes 1926; et les échelles à la section D du groupe de normes 1910. Ce sont là quelques exemples des normes de lOSHA auxquelles il est fait référence dans la norme de 1994 sur la production, le transport et la distribution dénergie électrique. LOSHA considère que ces textes contribueront à une meilleure reconnaissance des normes de sécurité applicables et que, associés à une bonne formation des employés et à leur sensibilisation aux risques existants, ils devraient permettre déviter en plus, chaque année, 2 décès et 1 310 accidents avec arrêt.
La norme américaine de 1994 sur la production, le transport et la distribution dénergie électrique adopte une approche globale dans la maîtrise des risques. Elle est axée sur la performance, en ce sens que lemployeur a la possibilité de mettre en uvre dautres programmes sil est en mesure de démontrer quils offrent un niveau de sécurité équivalent à celui qui est visé par la norme. Les dispositions générales de la norme portent sur les points suivants: besoins de formation; maîtrise des énergies dangereuses (verrouillage et signalisation) aux étapes de la production, du transport et de la distribution dénergie électrique; procédures daccès aux espaces confinés et procédures pour travailler en sécurité dans les installations souterraines; travaux effectués sur des éléments découverts sous tension ou à proximité; travaux sur les lignes aériennes; mises à la terre; élagage des arbres à proximité des lignes; procédures à suivre par le personnel travaillant dans les postes électriques; outils isolants et outillage électrique portable; échelles; et équipements de protection individuelle. La norme aborde tous les aspects de lexploitation et de la maintenance des installations et des équipements de production, de transport et de distribution dénergie électrique.
Certaines des dispositions les plus importantes de la norme sont celles qui prévoient pour le personnel une formation aux secours durgence, des séances dinformation sur les tâches à exécuter ainsi quune formation aux pratiques de travail conformes à la sécurité et aux procédures durgence, y compris le sauvetage de personnes dans des trous de visite ou au sommet des poteaux. Il existe également des prescriptions particulières en matière de protection individuelle et de vêtements de protection pour les interventions sur des équipements sous tension et pour lentrée dans des structures souterraines, ainsi que pour le contrôle des sources dénergie dangereuses. Autre aspect important, les employeurs doivent certifier que leur personnel possède une formation appropriée et maîtrise les pratiques de travail spécifiées dans la norme. Quelques-uns de ces éléments sont examinés plus en détail ci-après.
LOSHA demande que le personnel effectuant des travaux sur des lignes aériennes ou des installations ou matériels connexes soumis à des tensions de 50 V ou davantage soit formé aux premiers soins et à la réanimation cardio-pulmonaire. Pour toute équipe travaillant sur le terrain et comprenant plusieurs personnes, deux au moins doivent avoir reçu une telle formation. Sur les lieux de travail fixes comme les centrales, il faut que le nombre demployés possédant cette formation soit suffisant pour quune personne ayant reçu une décharge électrique puisse être secourue en quatre minutes au plus.
Le chef dune équipe doit organiser une réunion dinformation avec le personnel concerné avant le début de chaque tâche. Linformation doit porter sur les risques liés au travail, les méthodes de travail, les précautions particulières à prendre, les moyens de contrôle des sources dénergie et les équipements de protection individuelle. Pour les tâches répétitives, on devra prévoir une réunion dinformation avant le début de la première tâche de chaque journée ou de chaque prise de poste de travail. En cas de changement important, il faut organiser une séance supplémentaire. Lexamen des tâches nécessite une planification des travaux, ce qui contribue à réduire le nombre des accidents.
LOSHA demande également à lemployeur de certifier que chaque membre de son personnel a reçu la formation nécessaire pour acquérir la qualification et les compétences requises. Cette attestation sera délivrée lorsque lemployé aura démontré quil maîtrise les pratiques de travail; elle sera maintenue pendant toute la durée de lemploi. Mais la formation à elle seule est insuffisante; la preuve doit être fournie que lemployé est compétent, ce qui se fait habituellement en vérifiant quil possède les connaissances requises. On sassure de cette manière que les interventions sur des installations sous tension seront effectuées par des personnes qualifiées.
Il existe également des prescriptions concernant lhabillement des travailleurs susceptibles dêtre exposés à des flammes ou à des arcs électriques. Lemployeur doit veiller à ce que tout travailleur exposé à ces risques ne porte pas de vêtements susceptibles daggraver les conséquences dun accident éventuel. Les vêtements faits dacétate, de Nylon, de polyester, de rayonne ou constitués dun mélange de ces matières sont interdits, à moins que lemployeur puisse apporter la preuve que le tissu a été traité de manière satisfaisante. Le personnel peut choisir des vêtements de coton, de laine ou en tissu ignifugé, mais il appartient à lemployeur de déterminer, en fonction de lexposition, si des fibres naturelles comme le coton ou la laine sont acceptables, étant donné que ces matières peuvent senflammer dans certaines conditions. Cette disposition de la norme a soulevé de nombreuses controverses dans lindustrie; il nen reste pas moins que linterdiction des matières synthétiques est un facteur important de la prévention des accidents dans la production, le transport et la distribution dénergie électrique.
Dans le préambule à la norme sur la production, le transport et la distribution dénergie électrique (29 CFR 1910.269), lAdministration de la sécurité et de la santé au travail (Occupational Safety and Health Administration (OSHA)), aux Etats-Unis, indique que «la fréquence globale des accidents dans lindustrie des services publics délectricité (Standard Industrial classification (SIC-491)) est légèrement inférieure aux taux correspondants pour lensemble du secteur privé» et que, «sauf pour les risques électriques et les risques de chute, le personnel des services publics délectricité est exposé à des risques dune nature et dun niveau comparables à ceux que lon rencontre dans beaucoup dautres branches» (OSHA, 1994). Ce préambule fait aussi référence aux publications du Bureau des statistiques du travail (Bureau of Labor Statistics (BLS)) qui définissent comme suit les principales sources daccidents dans lindustrie considérée:
Le préambule souligne le fait que les chocs électriques ne constituent pas une catégorie daccidents fréquemment signalés. Les dossiers des services de la main-duvre, de lindustrie et de lOSHA révèlent cependant que les accidents dorigine électrique représentent le type le plus fréquent daccidents graves ou mortels dans les entreprises publiques délectricité, avant les accidents de véhicules à moteur, les chutes et les accidents dans lesquels une personne est heurtée ou écrasée par un objet.
Les travailleurs des entreprises publiques délectricité sont exposés à beaucoup dautres risques au cours de leur travail, dont quelques-uns sont mentionnés ci-après.
Les lésions musculo-squelettiques sont les plus fréquentes chez les personnes qui exercent un travail physique; elles comprennent:
Le personnel est appelé à travailler dans des environnements très variés: travail en hauteur sur des pylônes; jonction de câbles souterrains; exposition à la chaleur dans les étages supérieurs des centrales pendant lété et au froid lors des réparations des lignes aériennes de distribution abattues par le vent. Il est par ailleurs exposé à des forces énormes. Dans les centrales, par exemple, la vapeur circule à une pression telle quil risque dêtre ébouillanté ou étouffé en cas de rupture dune conduite. Outre la chaleur, les risques physiques dans les centrales comprennent le bruit, les champs électromagnétiques, les rayonnements ionisants (centrales nucléaires) et les risques dasphyxie (espaces confinés). Lexposition à lamiante a été à lorigine de nombreuses maladies et de multiples procès, et dautres matériaux isolants sont actuellement mis en cause. Des produits chimiques comme les caustiques, les corrosifs et les solvants sont largement utilisés. Des personnes sont également affectées à des tâches spécialisées, comme la lutte contre le feu ou la plongée en scaphandre autonome (pour inspecter les circuits dadmission deau et dévacuation).
Dans les centrales nucléaires modernes, on est parvenu à réduire lexposition des travailleurs aux rayonnements pendant les périodes de fonctionnement, mais des expositions importantes peuvent se produire lors des arrêts pour maintenance ou rechargement du combustible; il importe dexercer une surveillance radiologique avec des instruments performants et fiables pour protéger efficacement les travailleurs qui pénètrent dans des zones dangereuses. Du fait que de nombreuses entreprises de sous-traitance peuvent être appelées à travailler successivement dans plusieurs centrales nucléaires à larrêt, il est nécessaire dinstaurer une coordination étroite entre les organismes de réglementation et lindustrie pour surveiller en permanence la dose cumulée à laquelle les travailleurs ont été exposés.
Si les réseaux de transport et de distribution présentent certains des risques que lon rencontre dans les centrales, ils se caractérisent toutefois par des expositions professionnelles qui leur sont propres. Les tensions et les intensités très élevées de ces réseaux prédisposent à des chocs électriques mortels et à des brûlures graves lorsque les travailleurs négligent les consignes de sécurité ou sont mal protégés. En cas de surchauffe, un transformateur peut prendre feu et exploser en dégageant de lhuile, et éventuellement des biphényles polychlorés (PCB) et leurs produits de dégradation. Dans les postes électriques, comme dans les centrales, la possibilité existe dune exposition à des matériaux isolants ou diélectriques, des champs électromagnétiques ou des atmosphères confinées. Sur les réseaux de distribution, une exposition au plomb et à dautres métaux, présents sous forme de poussières et de fumées, est à craindre pour les personnes occupées à couper, brûler ou épisser des câbles électriques. Les structures souterraines de ces réseaux présentent évidemment les risques propres aux espaces confinés. Le pentachlorophénol, pesticide employé pour la protection des poteaux électriques en bois, occasionne des nuisances qui nexistent pratiquement que sur les réseaux de distribution.
Enfin, les releveurs de compteurs et les travailleurs employés à lextérieur peuvent être exposés à des actes de violence urbaine; les décès survenant à la suite dune tentative de vol ne sont pas non plus inconnus dans cette catégorie de personnel.
Toute activité humaine a, sur lenvironnement, des incidences dont lampleur et les conséquences sont variables. Des dispositions législatives ont été élaborées pour les contrôler et les réduire au minimum.
La production dénergie électrique comporte plusieurs risques majeurs, potentiels ou réels, pour lenvironnement, notamment les émissions de substances dans lair et la contamination de leau et du sol (voir tableau 76.4). Les centrales à combustibles fossiles sont une source de préoccupation particulière du fait quelles rejettent dans latmosphère des oxydes dazote (voir ci-après «Lozone»), des oxydes de soufre (ce qui pose la question des pluies acides), du dioxyde de carbone (voir ci-après «Les changements climatiques mondiaux») et des particules, dont on a déterminé quelles sont sources de problèmes respiratoires.
Type de centrale |
Air |
Eau* |
Sol |
Combustibles fossiles |
Dioxyde d’azote (NO2) |
Byphényles polychlorés (BPC) |
Cendres |
Dioxyde de soufre (SO2) |
Solvants |
Amiante |
|
Particules |
Métaux |
Byphényles polychlorés (BPC) |
|
Monoxyde de carbone (CO) |
Huiles |
Solvants |
|
Dioxyde de carbone (CO2) |
Acides/bases |
Métaux |
|
Composés organiques volatils |
Hydrocarbures |
Huiles |
|
Nucléaire |
Comme ci-dessus, plus émission de radioactivité |
||
Hydroélectrique |
Principalement lixiviat rejeté par le sol dans l’eau en amont des barrages |
||
Perturbation de l’habitat de la faune |
* Devrait inclure des effets «locaux» comme l’élévation de la température de la masse d’eau qui reçoit les rejets de la centrale et la réduction de la population de poissons en raison de l’action mécanique des dispositifs d’admission d’eau.
Dans le cas des centrales nucléaires, les préoccupations majeures concernent le stockage à long terme des déchets nucléaires et la possibilité de catastrophes entraînant le rejet de contaminants radioactifs dans latmosphère. Laccident survenu en 1986 à Tchernobyl, en Ukraine, est un exemple classique de ce qui peut se produire en labsence de précautions appropriées dans les centrales nucléaires: le lecteur peut se reporter à ce propos à deux articles pertinents de la présente Encyclopédie : «Tchernobyl, ou la méconnaissance des principes de conception ergonomique», au chapitre no 29, «Lergonomie», et «Les mesures de sécurité et de santé dans les régions agricoles contaminées par des radionucléides: lexpérience de Tchernobyl», au chapitre no 39, «Les catastrophes naturelles et technologiques».
Pour ce qui est des centrales hydroélectriques, les inquiétudes tiennent principalement au lessivage de métaux, à la perturbation des habitats de la faune aquatique et terrestre et à la rupture éventuelle dun barrage ou dune digue.
Les travaux de recherche sur les effets des champs électromagnétiques se sont développés dans le monde entier depuis létude publiée par Wertheimer et Leeper en 1979. Ces auteurs postulaient lexistence dun lien entre les cancers de lenfant et la présence de lignes électriques à proximité des habitations. Les études effectuées depuis cette date nont pas été concluantes et nont pas confirmé lexistence dun lien de causalité; en fait, elles ont mis en évidence les aspects sur lesquels il serait nécessaire davoir une connaissance plus étendue et des données de meilleure qualité pour tirer des conclusions valables sur le plan épidémiologique. Certaines des difficultés rencontrées dans ce domaine tiennent à lévaluation (mesure de lexposition, caractérisation de la source, fréquence des expositions et intensité des champs magnétiques dans les habitations). Bien que létude publiée par le Conseil national de la recherche de lAcadémie nationale des Sciences, aux Etats-Unis (National Research Council of the National Academy of Sciences, 1996) ait conclu quil nexistait pas de preuve suffisante pour dire que les champs électromagnétiques dextrêmement basse fréquence constituent une menace pour la santé humaine, la question continuera probablement de préoccuper les populations tant quelles nauront pas été rassurées par des études et des recherches qui auront démontré labsence dune telle menace.
Ces dernières années, lopinion publique a pris davantage conscience des répercussions des activités humaines sur le climat du globe. On estime que la moitié environ de toutes les émissions de gaz à effet de serre produites par ces activités sont constituées de dioxyde de carbone (CO2). De nombreuses recherches ont été consacrées et sont en cours dans ce domaine aux niveaux national et international. Comme les activités des entreprises de production dénergie électrique contribuent de manière significative aux émissions de CO2 dans latmosphère, toute réglementation visant à réduire ces émissions est de nature à avoir de graves conséquences pour lindustrie considérée. La Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, le plan daction des Etats-Unis sur le changement climatique (Climate Change Action Plan) et la loi américaine de 1992 sur la politique de lénergie (Energy Policy and Conservation Act) ont largement incité cette industrie à rechercher des moyens de sadapter à une législation future.
Parmi les domaines étudiés actuellement, on peut citer la modélisation des émissions, la détermination des effets des changements climatiques, le calcul du coût des plans à prévoir pour gérer les changements climatiques, la réduction des émissions de gaz à effet de serre et ses avantages pour lêtre humain, et la prévision des changements climatiques.
Une cause de préoccupation majeure tient aux éventuelles répercussions négatives des changements climatiques sur les systèmes écologiques. On considère que les systèmes non encore pris en charge sont les plus sensibles et les plus exposés à des effets dommageables à léchelle mondiale.
LAgence américaine de protection de lenvironnement (Environmental Protection Agency (EPA)) a adressé au Congrès un rapport intérimaire sur les polluants atmosphériques dangereux produits par les entreprises publiques délectricité, comme cela avait été demandé dans le cadre de la révision de la loi de 1990 sur la lutte contre la pollution de lair (Clean Air Act Amendments) (EPA, 1998). LEPA avait été chargée danalyser les risques posés par les centrales thermiques à combustibles fossiles. Elle a conclu que ces émissions ne constituent pas un danger pour la santé publique. Les auteurs ont différé leurs conclusions au sujet du mercure dans lattente de travaux complémentaires. Une étude très complète de lElectric Power Research Institute (EPRI) sur les centrales à combustibles fossiles indique que plus de 99,5% de celles-ci noccasionnent pas de risques de cancer supérieurs au seuil de 1 pour 1 million (Lamarre, 1995). A titre de comparaison, des chercheurs ont calculé que le risque dû à toutes les sources démissions pouvait atteindre 2 700 cas par an.
La réduction des concentrations dozone dans lair stratosphérique constitue une préoccupation majeure dans de nombreux pays. Les oxydes dazote (NOx) et les composés organiques volatils (COV) produisent de lozone. Comme les centrales à combustibles fossiles contribuent largement au volume total des émissions de NOx dans le monde, leurs responsables peuvent sattendre à des mesures de contrôle plus rigoureuses à mesure que les pays renforceront leurs normes de protection de lenvironnement. Il en sera ainsi jusquà ce que soient définies avec plus de précision les données destinées aux modèles photochimiques à grille utilisés pour la modélisation du transport de lozone troposphérique.
Le moment est venu pour les entreprises publiques de calculer ce que pourrait coûter le démantèlement des usines à gaz et la réhabilitation de leurs sites. Ces usines ont été créées à lorigine pour la production de gaz à partir de charbon, de coke ou de pétrole, de sorte que du goudron de houille et dautres sous-produits ont été évacués dans de grands bassins sur place ou sur des terrains à lextérieur du site. Les décharges de ce type sont de nature à contaminer les eaux souterraines et les sols. En raison des travaux de recherche quil faudra entreprendre pour déterminer létendue de la contamination des eaux souterraines et des sols à ces emplacements ainsi que les moyens dy remédier de manière économique, le problème restera sans doute à létude pendant un certain temps encore. Des remarques analogues pourraient sappliquer aux sites des centrales nucléaires.