Latmosphère contient normalement 20,93% doxygène. Le corps humain est par nature adapté pour respirer loxygène atmosphérique à une pression partielle denviron 160 torr au niveau de la mer. A cette pression, lhémoglobine, cest-à-dire la molécule qui transporte loxygène jusquaux tissus, est saturée à 98% environ. Les pressions doxygène supérieures ne peuvent pas accroître sensiblement le taux de loxyhémoglobine, puisque celle-ci a déjà une concentration initiale proche de 100%. Il peut se faire toutefois que des quantités appréciables doxygène non brûlé passent en solution physique dans le plasma sanguin lorsque la pression augmente. Heureusement, lorganisme est capable de tolérer, pendant de courts laps de temps, une gamme assez étendue de pressions doxygène sans dommages appréciables. Les expositions plus longues peuvent provoquer des problèmes de toxicité de loxygène.
Lorsquune tâche nécessite de respirer de lair comprimé, comme dans la plongée ou le travail en caisson, le problème du manque doxygène (hypoxie) se pose rarement, étant donné que lorganisme sera exposé à une quantité croissante doxygène à mesure que la pression absolue augmente. Un doublement de la pression multiplie par deux le nombre de molécules inhalées lorsquon respire de lair comprimé. Le volume doxygène inspiré est donc égal, en fait, à 42%. Autrement dit, un travailleur qui respire de lair à une pression de 2 atmosphères absolues (ata), ce qui correspond à une profondeur de 10 m sous la mer, inhalera un volume doxygène équivalant à 42% doxygène dans un masque en surface.
A la surface de la terre, lêtre humain peut respirer sans mal 100% doxygène pendant 24 à 36 heures. Au-delà de ce temps, il se produit un effet de toxicité de loxygène pulmonaire (effet Lorrain-Smith). Les symptômes de la toxicité pulmonaire sont des douleurs thoraciques rétro-sternales, une toux sèche, une diminution de la capacité vitale et une perte de production de surfactants; un état appelé atélectasie lobulaire est visible aux rayons X. La poursuite de lexposition entraîne lapparition de microhémorragies et, pour finir, une fibrose pulmonaire permanente. Toutes les étapes de la toxicité de loxygène, jusquaux microhémorragies, sont réversibles, mais lorsque la fibrose est installée, le processus de cicatrisation devient irréversible. Lorsquon respire 100% doxygène à 2 ata (soit à une pression de 10 m deau de mer), les premiers symptômes de toxicité de loxygène se manifestent après 6 heures environ. On notera que, si lon introduit toutes les 20 à 25 minutes de courtes périodes de 5 minutes pendant lesquelles le sujet inhale de lair, on peut doubler la durée de la période après laquelle les symptômes de toxicité de loxygène apparaissent.
Loxygène peut être respiré à des pressions inférieures à 0,6 ata sans effets néfastes. Par exemple, un travailleur peut tolérer de respirer en permanence 0,6 atmosphère doxygène pendant 2 semaines sans subir aucune perte de sa capacité vitale. La mesure de la capacité vitale est sans doute lindicateur le plus sensible de la toxicité initiale de loxygène. Des plongeurs travaillant à grande profondeur peuvent respirer des mélanges gazeux contenant jusquà 0,6 atmosphère doxygène, le reste étant constitué dhélium ou dazote. Six dixièmes datmosphère correspondent à linhalation de 60% doxygène à 1 ata ou au niveau de la mer.
A des pressions supérieures à 2 ata, la toxicité pulmonaire de loxygène cesse dêtre le principal sujet de préoccupation, car les crises que cet oxygène peut provoquer sont secondaires par rapport à sa toxicité cérébrale. La neurotoxicité a été décrite pour la première fois par Paul Bert en 1878; elle est dailleurs connue sous le nom deffet Paul Bert. Toute personne contrainte de respirer 100% doxygène à une pression de 3 ata pendant un peu plus de 3 heures, sans interruption, risquerait très probablement dêtre victime dune crise de grand mal. Malgré plus de 50 ans dactives recherches sur le mécanisme de la toxicité de loxygène pour le cerveau et les poumons, on ne comprend pas encore parfaitement cette réaction. Ce que lon sait, cependant, cest que certains facteurs augmentent cette toxicité et abaissent le seuil de la crise. Lexercice, la rétention du CO2, lemploi de stéroïdes, la fièvre, les frissons, la prise damphétamines, lhyperthyroïdie et la peur peuvent influer sur la tolérance à loxygène. Un sujet reposant calmement dans une chambre sous pression dont latmosphère est sèche aura une tolérance très supérieure à celle dun plongeur qui, par exemple, travaille activement dans de leau froide au-dessous dun navire ennemi. Un plongeur de larmée qui doit affronter le froid, des exercices difficiles, une accumulation toujours possible de CO2 dans un appareil à oxygène à circuit fermé, ainsi que la peur, pourra être victime dune crise après 10 à 15 minutes de travail à une profondeur de 12 m seulement, alors quun patient allongé tranquillement au sec dans une chambre supportera facilement 90 minutes à une pression de 20 m sans grand risque de crise. Les plongeurs en exercice peuvent être exposés à des pressions partielles doxygène atteignant 1,6 ata pour de courtes périodes allant jusquà 30 minutes, ce qui équivaut à respirer 100% doxygène à une profondeur de 6 m. Il est important de noter que lon ne devrait jamais exposer quiconque à 100% doxygène à une pression supérieure à 3 ata, ni pendant plus de 90 minutes à cette pression, même si le sujet est paisiblement couché.
La prédisposition aux crises varie considérablement selon les individus et, curieusement, dun jour à lautre pour un même individu. Cest la raison pour laquelle les tests de «tolérance à loxygène» nont pas grande signification. Ladministration danticonvulsivants comme le phénobarbital ou la phénithoïne peut éviter les crises dues à loxygène, mais elle ne permet nullement de limiter les lésions irréversibles du cerveau ou de la moelle épinière lorsquon dépasse les maxima de pression ou de durée dexposition.
Le monoxyde de carbone peut contaminer gravement lair que respirent les plongeurs ou les travailleurs en caisson. Les sources de monoxyde de carbone les plus courantes sont les moteurs à combustion interne qui entraînent les compresseurs, ou dautres machines qui fonctionnent à proximité des compresseurs. Il importe de sassurer que les entrées dair des compresseurs sont suffisamment éloignées des sources de gaz déchappement de leurs moteurs. Les moteurs diesel produisent généralement peu de monoxyde de carbone, mais ils émettent, en revanche, dimportantes quantités doxydes dazote, qui peuvent être très toxiques pour les poumons. Aux Etats-Unis, la norme fédérale actuellement en vigueur pour les niveaux de monoxyde de carbone dans lair inspiré est de 35 parties par million (ppm) pour une journée de travail de 8 heures. Par exemple, en surface, même 50 ppm nauront pas deffet nocif décelable, alors quà une profondeur de 50 m, du fait de la compression, ce taux aura le même effet que 300 ppm. Cette concentration peut produire jusquà 40% de carboxyhémoglobine sur une période déterminée. Les valeurs en ppm mesurées doivent être multipliées par le nombre datmosphères auxquelles elles sont fournies au travailleur.
Les plongeurs et les travailleurs dans lair comprimé devraient savoir reconnaître les premiers symptômes de lintoxication au monoxyde de carbone, à savoir maux de tête, nausées, vertiges et sensation de faiblesse. On veillera à ce que ladmission dair frais du compresseur soit toujours située au vent par rapport au tuyau déchappement du moteur. Cette position doit être vérifiée en permanence en fonction des changements du vent ou de la situation des navires.
Pendant de nombreuses années, on a pensé que le monoxyde de carbone se combinait à lhémoglobine de lorganisme pour produire de la carboxyhémoglobine, ce qui entraînait la mort en bloquant le transport doxygène vers les tissus. Des travaux plus récents montrent que si cet effet provoque effectivement une hypoxie des tissus, il nest cependant pas mortel par lui-même. Les détériorations les plus graves se produisent au niveau cellulaire du fait de la toxicité directe de la molécule de monoxyde de carbone. La peroxydation lipidique des membranes cellulaires, à laquelle il ne peut être mis fin que par un traitement à loxygène hyperbare, apparaît comme la principale cause des décès et des séquelles à long terme.
Produit normal du métabolisme, le dioxyde de carbone est éliminé des poumons par le processus normal de la respiration. Certains types dappareils respiratoires peuvent cependant affecter son élimination ou entraîner une élévation de sa concentration dans lair inspiré par le plongeur.
Pratiquement, le dioxyde de carbone peut avoir des effets nocifs sur lorganisme de trois manières. Premièrement, à des concentrations très élevées (plus de 3%), il peut entraîner des erreurs de jugement, dabord par un sentiment indu deuphorie, puis par une sorte de dépression si lexposition se prolonge. De tels effets peuvent évidemment avoir de graves conséquences pour un plongeur sous-marin qui doit conserver toute sa capacité de jugement sil veut déjouer les dangers. A mesure que la concentration sélève, le CO2 finit par provoquer une perte de conscience à partir du moment où cette concentration dépasse 8%. Un deuxième effet du dioxyde de carbone est dexacerber ou daggraver la narcose à lazote (voir ci-après). Cet effet du dioxyde de carbone apparaît à des pressions partielles supérieures à 40 mm Hg (Bennett et Elliott, 1993). A des valeurs élevées de PO2, comme celles auxquelles on est exposé en plongée du fait dun taux important de CO2, la régulation respiratoire est atténuée et, dans certaines conditions, il peut arriver que les plongeurs aient tendance à retenir le CO2 au point davoir dans lorganisme des niveaux de dioxyde de carbone susceptibles dentraîner une perte de conscience. Le troisième problème que pose le dioxyde de carbone sous pression vient du fait que, si le sujet respire 100% doxygène à des pressions supérieures à 2 ata, le risque de crise croît à mesure quaugmentent les niveaux de dioxyde de carbone. On a vu certains équipages de sous-marins supporter facilement de respirer 1,5% de CO2 pendant 2 mois daffilée sans problèmes fonctionnels, alors que cette concentration est 30 fois supérieure à la concentration normale dans lair atmosphérique. Une concentration de 5 000 ppm, soit 10 fois celle de lair frais normal, est considérée comme sans risques en termes de valeurs limites industrielles. Pourtant, même un taux de CO2 ne dépassant pas 0,5%, ajouté à 100% doxygène, peut provoquer des crises sil est respiré à des pressions plus élevées.
Lazote est un gaz neutre par rapport au métabolisme humain normal. Il nentre dans aucune forme de combinaison chimique avec des composés ou des substances chimiques de lorganisme. En revanche, il peut être à lorigine de graves perturbations des capacités intellectuelles des plongeurs lorsquil est respiré sous une pression élevée.
Lazote se comporte comme un anesthésique aliphatique à mesure que la pression atmosphérique augmente, ce qui accroît dautant sa concentration. Le cas de lazote est un exemple typique de lhypothèse de Meyer-Overton selon laquelle tout anesthésique aliphatique peut avoir un effet anesthésique directement proportionnel à son taux de solubilité graisse-eau. Cest exactement à ce taux que lazote, qui est cinq fois plus soluble dans la graisse que dans leau, a cet effet anesthésiant.
En pratique, il est possible deffectuer des plongées jusquà une profondeur de 50 m avec de lair comprimé, même si les effets de la narcose à lazote commencent à apparaître entre 30 et 50 m. La plupart des plongeurs peuvent exercer normalement leur activité dans ces limites. A plus de 50 m de profondeur, on emploie dans la majorité des cas des mélanges hélium-oxygène qui évitent ces effets de narcose à lazote. Des plongées à laide dair comprimé ont été effectuées au-delà de 90 m de profondeur mais, sous ces pressions extrêmes, les plongeurs nétaient pratiquement pas capables de travailler et se souvenaient avec peine des tâches quils étaient censés accomplir. Comme nous lavons déjà mentionné, tout excès de concentration de CO2 accentue les effets de lazote. A des pressions élevées, le système ventilatoire est perturbé par la densité de gaz, si bien que le CO2 saccumule automatiquement dans les poumons par suite des variations du flux laminaire dans les bronchioles et de la diminution de la stimulation respiratoire. Il peut donc être extrêmement dangereux de respirer de lair comprimé à plus de 50 m de profondeur.
Lazote exerce son effet par sa seule présence physique à létat dissous dans les tissus nerveux. Il provoque un léger gonflement de la membrane des cellules nerveuses, ce qui la rend plus perméable aux ions de potassium et de sodium. On pense que cest cette interférence avec le processus normal de dépolarisation et de repolarisation qui est responsable des symptômes cliniques de la narcose à lazote.
Une table de décompression établit, en fonction de la profondeur et du temps de séjour, le programme de décompression par lequel doit passer toute personne qui a été exposée à des conditions hyperbares. Certaines considérations dordre général peuvent être formulées au sujet des procédures de décompression. Aucune table de décompression ne peut garantir quun accident de décompression ou une maladie des caissons seront prévenus dans tous les cas. Dailleurs, comme on le verra plus loin, on constate de nombreux problèmes avec certaines des tables en usage actuellement. Il faut se souvenir que des bulles se forment lors de toute décompression normale, même très lente. Cest pourquoi, tout en sachant que plus la décompression est longue plus la probabilité daccident est faible, les accidents de décompression, même sils sont très rares, restent toujours possibles.
Il se produit, chez les plongeurs et chez les travailleurs dans lair comprimé, une accoutumance qui les rend moins sujets à des accidents de décompression après des expositions répétées. Cette accoutumance peut survenir après environ une semaine dexposition quotidienne, mais elle se perd lorsquon arrête de travailler pendant 5 à 7 jours, ou suite à une brusque augmentation de la pression. Il est regrettable que certaines entreprises de construction tirent argument de cette accoutumance pour faire travailler des plongeurs à partir de tables de décompression que lon doit considérer comme tout à fait inadéquates. Pour tirer tout le parti possible du phénomène daccoutumance, les travailleurs nouvellement embauchés sont souvent mis au travail en milieu de poste afin quils puissent shabituer sans risque daccident de décompression. Ainsi, lactuelle table japonaise no 1 pour les travailleurs dans lair comprimé utilise des postes fractionnés, avec une exposition à lair comprimé le matin et une autre laprès-midi, et un intervalle dune heure en surface entre les deux. La décompression de la première exposition ne représente quenviron 30% de celle quexige la Marine américaine et la décompression de la seconde exposition, 4% seulement. Laccoutumance rend néanmoins possible cet écart par rapport à la décompression physiologique. Les travailleurs présentant une sensibilité même ordinaire aux accidents de décompression sexcluent deux-mêmes des travaux dans lair comprimé.
On connaît mal le mécanisme de laccoutumance. On sait toutefois que même si le travailleur ne ressent pas de douleur, il peut subir des lésions cérébrales, osseuses ou tissulaires. Les IRM du cerveau des travailleurs dans lair comprimé montrent jusquà quatre fois plus daltérations que celles des sujets témoins du même âge (Fueredi, Czarnecki et Kindwall, 1991). Ces altérations correspondent probablement à des ramollissements lacunaires.
La majorité des programmes modernes de décompression pour les plongeurs et les travailleurs en caisson sont fondés sur des modèles mathématiques du genre des premiers modèles conçus en 1908 par J.S. Haldane lors dobservations empiriques sur les paramètres de décompression admissibles. Haldane avait observé que les chèvres pouvaient tolérer une réduction de pression de moitié sans apparition de symptômes. A partir de là, il imagina, pour des raisons de commodité mathématique, un modèle comprenant cinq tissus organiques différents accumulant et évacuant lazote à des rythmes variés sur la base de léquation classique de la demi-vie. Ses tables de décompression échelonnée étaient alors conçues pour éviter de dépasser un rapport de 2:1 dans un tissu quelconque. Au fil des années, le modèle de Haldane a été modifié empiriquement pour essayer de le faire concorder avec les tolérances observées chez les plongeurs. Il nempêche que tous les modèles mathématiques relatifs à labsorption et à lélimination des gaz sont biaisés, car il nexiste aucune table de décompression qui reste sûre ou qui devienne plus sûre à mesure que la durée de séjour et la profondeur augmentent.
Les tables de décompression les plus fiables dont on dispose actuellement pour la plongée à lair comprimé sont sans doute celles de la Marine canadienne, connues sous le nom de tables DCIEM (Defence and Civil Institute of Environmental Medecine (Institut militaire et civil de médecine environnementale)). Ces tables ont été très soigneusement testées sur des plongeurs non accoutumés placés dans des conditions fort diverses, et elles nont à leur passif quun tout petit nombre daccidents de décompression. Les autres programmes de décompression bien testés sur le terrain sont les normes nationales françaises mises au point à lorigine par la Comex, entreprise française de travaux sous-marins.
Les tables de décompression à lair de la Marine américaine ne sont pas fiables, en particulier lorsquelles sont poussées à leurs limites. En réalité, les plongeurs de la Marine américaine ont lhabitude de décompresser à des profondeurs supérieures de 3 m ou avec des temps de séjour légèrement plus longs que ceux prescrits, afin déviter les problèmes. Les tables de décompression à lair en cas dexposition exceptionnelle sont particulièrement peu fiables, car elles ont été à lorigine daccidents de décompression dans 17 à 33% des tests de plongée effectués. Dune manière générale, les paliers de décompression de la Marine américaine se situent sans doute à des profondeurs trop faibles.
Aucune des tables de décompression à lair très largement utilisées à lheure actuelle ne peut être considérée comme parfaitement sûre en ce qui concerne les travailleurs affectés au creusement de galeries et de tunnels. Aux Etats-Unis, il a été prouvé que les normes fédérales de décompression (US Bureau of Labor Statistics, 1971), dont lapplication est contrôlée par lAdministration de la sécurité et de la santé au travail (Occupational Safety and Health Administration (OSHA)), avaient été à lorigine daccidents de décompression chez un ou plusieurs travailleurs pendant 42% des jours de travail effectués à des pressions comprises entre 1,29 et 2,11 bars. A des pressions supérieures à 2,45 bars, on a constaté une incidence de 33% des cas de nécrose aseptique des os (ostéonécrose dysbarique). Les tables britanniques de Blackpool sont également critiquables. Lors de la construction du métro de Hong-kong, 83% des travailleurs qui utilisaient ces tables se sont plaints de symptômes de la maladie des caissons. On a également noté une incidence dostéonécrose dysbarique atteignant jusquà 8% à des pressions relativement modestes.
Les nouvelles tables allemandes de décompression à loxygène élaborées par Faesecke en 1992 ont donné de bons résultats lors de la construction dun tunnel sous le canal de Kiel. En France, les nouvelles tables de décompression à loxygène apparaissent également excellentes à lexamen, mais elles nont pas encore été utilisées sur un chantier de grande envergure.
Sur la base dune étude informatique de données couvrant 15 années de plongées commerciales réussies ou non, Kindwall et Edel ont établi en 1983 des tables de décompression à lair comprimé en caisson pour lInstitut national américain de la sécurité et de la santé au travail (National Institute for Occupational Safety and Health (NIOSH)) (Kindwall, Edel et Melton, 1983) en adoptant une approche empirique qui évite la plupart des pièges de la modélisation mathématique. La modélisation na été utilisée que pour interpoler entre valeurs réelles. Les recherches sur lesquelles ces tables étaient fondées ont permis de constater que lorsque la décompression seffectuait conformément à ces tables, aucun cas de maladie des caissons nétait observé. Néanmoins, les temps de décompression étaient beaucoup trop longs pour être applicables dans le secteur de la construction. Létablissement sur ordinateur dune variante de la table pour loxygène a révélé quil était possible de ramener ces temps de décompression à des délais similaires à ceux des tables de décompression quutilise actuellement lOSHA, voire moins longs. Ces nouvelles tables ont ensuite été testées sur des sujets non accoutumés dâges divers, à des pressions allant de 0,95 à 3,13 bars, par paliers de 0,13 bar. On simulait des intensités de travail moyennes par des levers de poids et des marches sur tapis roulant pendant lexposition. Les temps de séjour étaient allongés dans toute la mesure possible, compte tenu dune combinaison temps de travail et temps de décompression adaptée à une journée de travail de 8 heures. Ce sont là les seuls programmes effectivement utilisés pour le travail posté. Aucun accident de décompression na été observé pendant ces tests, et les scintigraphies osseuses, comme les radiographies, nont révélé aucun signe dostéonécrose dysbarique. A ce jour, ce sont les seuls programmes de décompression qui aient été testés en laboratoire pour les travailleurs dans lair comprimé.
Les programmes de décompression à lair de la Marine américaine ont été conçus pour une incidence daccidents de décompression inférieure à 5%. Ce taux, sil est acceptable pour les plongées dintervention, est bien trop élevé dans le cas dun personnel soignant travaillant dans des conditions hyperbares. Les tables de décompression quon applique au personnel des chambres hyperbares peuvent être fondées sur les programmes de décompression à lair de la marine mais, comme les expositions sont si fréquentes quelles se situent, normalement, aux marges de la table, on doit sensiblement les prolonger et, pendant la décompression, remplacer lair comprimé par de loxygène. Par mesure de prudence, il est recommandé de prévoir un palier de 2 minutes avec inhalation doxygène à une profondeur supérieure dau moins 3 m à la valeur prescrite par le programme de décompression retenu. Si, par exemple, le programme en vigueur dans la Marine américaine exige un palier de décompression de 3 minutes à 3 m avec inhalation dair, après un séjour de 101 minutes à 2,5 ata, on peut retenir, comme programme de décompression acceptable pour un opérateur de chambre hyperbare soumis à la même exposition, un arrêt de 2 minutes à 6 m avec inhalation doxygène, suivi dun arrêt de 10 minutes à 3 m avec inhalation doxygène. Si lon applique ces programmes tels que modifiés, il est extrêmement rare que le personnel travaillant à lintérieur des chambres hyperbares soit victime daccidents de décompression (Kindwall, 1994a).
Le fait de respirer de loxygène na pas pour seul avantage de multiplier par cinq la «fenêtre doxygène» nécessaire pour éliminer lazote. Il a été démontré en outre que laugmentation de la PO2 dans le sang veineux diminuait lagrégation des hématies, réduisait la viscosité des leucocytes et le phénomène dabsence de reflux, rendait les érythrocytes plus souples pour leur passage dans les capillaires et contrecarrait limportante réduction de la déformabilité et de la filtrabilité des leucocytes exposés à lair comprimé.
Inutile de dire que tous les travailleurs soumis à une décompression à loxygène doivent être parfaitement informés des risques dincendie correspondants et posséder une formation complète en la matière. Aucun matériau combustible ou inflammable ne doit être présent autour de la chambre de décompression et un système de décharge à lair libre doit être prévu pour lévacuation de loxygène expiré, ainsi que des détecteurs doxygène supplémentaires avec signal dalarme se déclenchant dès que la concentration doxygène dans latmosphère de la chambre dépasse 23%.
Lair comprimé utilisé pour certains travaux ou pour le traitement de patients dans des conditions hyperbares permet parfois deffectuer des tâches ou dobtenir des rémissions qui seraient impossibles autrement. Si lon respecte les règles de sécurité pour lutilisation de ces équipements, les travailleurs ne courent normalement aucun risque significatif de dysbarisme.
Dans les travaux de génie civil, il est parfois nécessaire de creuser des galeries ou des tunnels dans des sols gorgés deau ou situés sous la nappe phréatique, ou encore entièrement sous leau, comme sur le fond dun fleuve ou dun lac. Pour ce faire, lune des méthodes les plus courantes consiste à injecter de lair comprimé dans le site à travailler afin den chasser toute leau et dassécher suffisamment le terrain affleurant pour quil puisse être creusé. Cest cette méthode que lon emploie aussi bien pour la mise en place des caissons servant à la construction des piles de pont que pour le percement de galeries en terrain meuble (Kindwall, 1994b).
Un caisson nest rien dautre quune grande boîte à fond ouvert fabriquée aux dimensions de la fondation à édifier; il est généralement construit sur berge, puis amené par flottage jusquà son emplacement où il est positionné avec précision. Il est ensuite immergé et descendu jusquau fond où il descendra grâce à un lestage au fur et à mesure de la construction de louvrage édifié sur lui. Lutilisation de caissons est une méthode qui permet de traverser les sols meubles pour faire reposer les piles dun pont, par exemple, sur une strate géologique ou sur une roche suffisamment solides pour supporter le poids de louvrage à construire. Lorsque tous les côtés du caisson sont bien enfoncés dans la boue, on injecte de lair comprimé à lintérieur pour en expulser leau et mettre à découvert un sol meuble qui pourra être excavé par les travailleurs se trouvant à lintérieur du caisson. Les bords inférieurs du caisson consistent en un sabot dacier biseauté et tranchant qui favorise lenfoncement à mesure que lon retire de la terre au-dessous du caisson ou quune poussée sexerce sur lui du fait du poids croissant de la construction quil supporte. Lorsquon a atteint lassise rocheuse, le caisson est rempli de béton et devient la fondation définitive.
Il y a près dun siècle et demi que lon utilise des caissons: on sen est servi pour construire des fondations à des profondeurs atteignant 31,4 m au-dessous du niveau moyen des eaux, telle la troisième pile du pont du port dAuckland, en Nouvelle-Zélande, en 1958.
Les caissons comportent habituellement une cheminée daccès pour les travailleurs, qui y descendent à laide dune échelle ou dun ascenseur mécanique, ainsi quune autre cheminée par laquelle les déblais sont évacués dans des godets. Ces cheminées sont équipées, à leurs deux extrémités, de sas hermétiques grâce auxquels la pression dans le caisson reste constante pendant les entrées et les sorties des travailleurs ou des matériaux. Le sas supérieur de la cheminée à déblais est équipé dun presse-étoupe dans lequel coulisse le câble de levage du godet à déblais. On ferme le sas inférieur avant douvrir le sas supérieur. Selon les modèles, les sas peuvent être équipés de systèmes de verrouillage de sécurité. Un sas ne peut être ouvert que lorsque la pression est la même de chaque côté. Etant donné que les parois du caisson sont généralement en acier ou en béton, le risque de fuites à partir du caisson, lorsque celui-ci est sous pression, est faible ou nul, si ce nest au-dessous des bords. La pression est augmentée par paliers jusquà une valeur légèrement supérieure à celle qui est nécessaire pour équilibrer la pression de leau au niveau du sabot.
Les personnes qui travaillent à lintérieur dun caisson pressurisé sont exposées à de lair comprimé et risquent de subir bon nombre des problèmes physiologiques que connaissent les plongeurs en eau profonde. Il sagit notamment de la maladie des caissons, des barotraumatismes au niveau des oreilles, des cavités des sinus et des poumons et, si les programmes de décompression sont mal adaptés, dun risque à long terme de nécrose aseptique des os (ostéonécrose dysbarique).
Il est important dassurer une ventilation efficace pour évacuer le CO2 et les gaz émis par les boues du sol (en particulier le méthane), ainsi que les fumées produites par les opérations de soudage ou de découpage dans la chambre de travail. On compte normalement quil faut un apport denviron 6 m3 dair frais par minute pour chaque travailleur présent dans le caisson. Il convient de tenir compte également des déperditions dair lors du passage par les sas du personnel ou des matériaux. Lorsque leau est forcée exactement au niveau du sabot, un apport dair supplémentaire est nécessaire pour remplacer celui qui séchappe en bulles sous les bords du caisson. Une seconde alimentation en air, de capacité égale à la première, avec une source dénergie indépendante, doit être disponible comme équipement de secours en cas de panne du compresseur ou de lalimentation électrique; elle est souvent exigée par la réglementation en vigueur.
Parfois, lorsque le sol à excaver est homogène et sableux, il est possible dinstaller des conduites dextraction en surface. Sous leffet de la pression qui règne dans le caisson, le sable est expulsé de la chambre de travail et lextrémité de la conduite dextraction placée dans un puisard où le sable est recueilli. Si lon rencontre du gravier ou des blocs de roche, ils seront évacués par godets après avoir été morcelés si nécessaire.
Lorsquun caisson narrive pas à senfoncer, bien quon ait augmenté la poussée exercée sur lui, il pourra être nécessaire de faire sortir les travailleurs et de réduire la pression dair dans la chambre de travail pour permettre la reprise de la descente. On devra couler du béton ou introduire de leau à lintérieur des piles qui entourent les cheminées daérage au-dessus du caisson, afin de réduire les contraintes au niveau du diaphragme qui surmonte la chambre de travail. Avant de commencer une opération quelconque dans un caisson, des cadres ou des étançons de sécurité seront mis en place dans la chambre de travail pour éviter que les travailleurs ne soient écrasés en cas de chute brutale du caisson. Ce sont des considérations pratiques qui déterminent la profondeur à laquelle peuvent être descendus des caissons pour une excavation qui doit être faite à la main. Une pression relative de 3,4 kg/cm2 (3,4 bars ou 35 m deau douce) constitue plus ou moins la limite maximale de tolérance, compte tenu des considérations liées à la décompression des travailleurs.
Les ingénieurs japonais ont mis au point un système automatisé dexcavation en caisson qui fait appel à une pelleteuse hydraulique télécommandée capable datteindre tous les coins du caisson. Lengin, commandé depuis la surface à laide dune télévision en circuit fermé, dépose les déblais dans les godets dont la remontée depuis le caisson est aussi télécommandée. Grâce à un tel système, il ny a pratiquement plus de limite aux valeurs que peut atteindre la pression dans le caisson. Les interventions humaines dans la chambre de travail ne sont plus nécessaires que pour réparer le matériel dexcavation ou pour dégager ou éliminer des obstacles importants qui pourraient se former sous le sabot du caisson et qui ne peuvent être extraits par la pelleteuse. Les travailleurs ne pénètrent alors dans le caisson que pour de courtes périodes du même ordre de grandeur que dans le cas des plongeurs et peuvent donc respirer soit de lair, soit un mélange de gaz à des pressions plus élevées pour éviter la narcose à lazote.
Les personnes qui ont travaillé pendant de longues heures dans lair comprimé sous des pressions dépassant 0,8 kg/cm2 (0,8 bar) devront subir une décompression par paliers. On y procède soit en fixant une grande chambre de décompression au sommet de la cheminée daccès qui permet au personnel de pénétrer dans le caisson, soit, si lon ne dispose pas dun espace suffisant à cet emplacement, en plaquant sur cette cheminée daccès de petits sas ne pouvant accueillir simultanément quun nombre réduit de personnes en position debout. Une décompression préliminaire relativement brève a lieu dans ces sas, puis, alors que lorganisme contient encore un très fort excédent de gaz, les travailleurs sont soumis à une décompression rapide jusquà la pression de surface et transférés sans tarder à une chambre de décompression standard, parfois située sur une barge adjacente, où ils sont soumis à une recompression en vue dune décompression lente ultérieure. Lors des travaux dans lair comprimé, ce procédé est désigné sous le nom de «décompression de transvasement»; il était assez répandu en Angleterre et ailleurs, mais il est interdit aux Etats-Unis. Lobjectif est de ramener les travailleurs à une pression normale en 5 minutes, avant que le diamètre des bulles gazeuses ne puisse augmenter suffisamment pour provoquer des symptômes morbides. Toutefois, le procédé nest pas sans danger, puisquil est difficile de faire passer un nombre important de travailleurs dun sas à un autre. Si un travailleur a des difficultés à équilibrer ses oreilles pendant la recompression, cest lensemble de léquipe qui est mise en danger. Il existe une méthode bien plus sûre, appelée «décompression de surface» et destinée aux plongeurs, dans laquelle une ou deux personnes seulement sont soumises simultanément à une décompression. Lors de la construction du pont du port dAuckland, malgré toutes les précautions prises, on a enregistré des délais atteignant parfois 8 minutes avant que les travailleurs puissent être ramenés à la pression normale.
Avec laccroissement de la population, on a besoin de plus en plus de galeries ou de tunnels pour évacuer les eaux usées, éviter les embouteillages en surface ou assurer une desserte ferroviaire sous les grands centres urbains. Ces galeries doivent souvent être creusées dans des terrains meubles et à grande profondeur sous la nappe phréatique. Sous les cours deau et sous les lacs en particulier, le seul moyen dassurer la sécurité des travailleurs consiste souvent à faire appel à lair comprimé. Cette technique, qui utilise un bouclier à avance hydraulique et de lair comprimé pour retenir leau au front de taille, est appelée procédé à chambre de répartition. Par ailleurs, dans les agglomérations dune certaine taille, il est parfois nécessaire de se servir dair comprimé au-dessous des grands immeubles pour éviter un affaissement du sol. Il existe en effet un risque de fissuration des fondations, daffaissement des trottoirs et des rues et de détérioration des canalisations et autres réseaux de distribution.
Pour mettre en uvre une pression dair dans un tronçon de galerie, on pose des cloisons transversales qui délimitent et ferment la zone sous pression. Dans les petites galeries de moins de 3 m de diamètre, on utilise un sas unique, ou sas combiné, pour le passage des travailleurs et celui du matériel et des déblais. On prévoit près des portes des sections de voies amovibles pour que ces portes puissent être manuvrées sans être gênées par les rails des convois de déblais. Les cloisons comportent de nombreuses traversées pour le passage dair haute pression pour les outils, dair basse pression pour la mise sous pression du tronçon de galerie, des collecteurs dincendie, des tubulures des manomètres, des lignes de communication, des lignes dalimentation électrique pour léclairage et les machines et des conduits daspiration pour la ventilation et lassèchement du radier. La conduite dalimentation en air basse pression, qui peut avoir un diamètre de 15 à 35 cm selon les dimensions de la galerie, devrait aboutir au front de taille, de manière à assurer une bonne ventilation aux travailleurs. Il faut prévoir une deuxième conduite dair basse pression de même diamètre traversant les deux cloisons et aboutissant derrière la cloison intérieure, afin dassurer une alimentation en air en cas de rupture de lalimentation primaire. Ces conduites devraient être équipées de clapets de retenue se fermant automatiquement en cas de rupture de la conduite dalimentation pour éviter une dépressurisation. Le débit dair requis pour assurer une ventilation efficace de la galerie et maintenir un faible niveau de CO2 varie largement selon la porosité du sol et la distance qui subsiste entre le revêtement de béton fini et le bouclier. Les micro-organismes présents dans le sol produisent parfois dimportantes quantités de CO2 et, dans ce cas, il faut évidemment plus dair. La mise en uvre dair comprimé a également lavantage de refouler hors de la galerie certains gaz explosifs comme le méthane qui se forment au voisinage des parois. Il en est de même lorsquon creuse des sols saturés par les déversements de solvants comme lessence ou les agents dégraissants.
Richardson et Mayo (1960) ont établi empiriquement une règle selon laquelle le volume dair nécessaire par minute équivaut plus ou moins à six fois la surface du front de taille en m2, plus 6 m3 par personne; le résultat correspond au débit dair frais en m3/minute. Cette règle est valable pour la plupart des situations.
Le collecteur dincendie doit également se prolonger jusquau front de taille et être équipé, tous les 60 m, de raccords pour les tuyaux souples de lutte contre le feu. Trente mètres de tuyau souple imputrescible seront fixés à chaque branchement du collecteur rempli deau sous pression.
Dans les galeries de plus de 4 m de diamètre, deux sas sont à prévoir: un sas à déblais pour le passage des convois de déblais et un autre pour les travailleurs, disposé généralement au-dessus du premier. Sur les grands chantiers, le sas pour le personnel comprend souvent trois compartiments, de manière que les ingénieurs, les électriciens et les autres catégories de personnel puissent y pénétrer et en ressortir pendant quune autre équipe est en décompression. Ces grands sas pour le personnel sont généralement aménagés en dehors de la cloison principale de béton, pour éviter quils aient à résister à la poussée extérieure exercée par la pression régnant dans la galerie lorsquils sont ouverts vers lextérieur.
Dans les très grandes galeries construites sous leau, un écran de sécurité est érigé dans la moitié supérieure de la galerie pour offrir une certaine protection en cas de brusque inondation à la suite dune irruption deau lors dun percement pratiqué sous une rivière ou sous un lac. Cet écran de sécurité est généralement placé aussi près que possible du front de taille en évitant loutillage dexcavation. Une passerelle suspendue relie lécran et les sas; elle descend jusquà 1 m au moins au-dessous du bord inférieur de lécran, ce qui permet aux travailleurs de rejoindre le sas pour le personnel en cas dinondation subite. Lécran de sécurité peut également servir à retenir les gaz légers qui pourraient être explosifs, et une ligne à déblais peut être disposée à travers lécran et raccordée à une conduite dextraction. En cas de besoin, cette conduite permettra dévacuer les gaz de lespace occupé par les travailleurs. Comme cet écran de sécurité doit descendre presque jusquau centre de la galerie, il nest pas possible dy avoir recours dans les galeries de moins de 3,6 m de diamètre. On avertira les travailleurs de se tenir éloignés de lembouchure de la conduite dextraction, afin déviter que leurs vêtements ne soient aspirés, ce qui pourrait occasionner de graves accidents.
On trouvera au tableau 36.1 une liste de consignes à ladresse des personnes qui travaillent pour la première fois dans de lair comprimé.
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Il appartiendra au médecin ou au responsable de la santé au travail sur le chantier de veiller à ce que les normes de pureté de lair soient respectées et que toutes les mesures de sécurité soient prises. Il conviendra également de voir si les programmes de décompression agréés sont respectés en examinant périodiquement les enregistrements de la pression dans la galerie et dans les sas pour le personnel.
La thérapie hyperbare est de plus en plus utilisée à travers le monde où lon compte aujourdhui près de 2 100 chambres hyperbares en service. Un grand nombre de ces chambres sont des unités multiplaces sous atmosphère dair comprimé à des pressions relatives de 1 à 5 kg/cm2. Sous des pressions relatives ne dépassant pas 2 kg/cm2, on fait respirer aux patients de loxygène à 100%. A des pressions plus élevées, on peut employer des mélanges gazeux pour traiter le mal des caissons. En revanche, le personnel de ces chambres hyperbares respire généralement de lair comprimé, et son exposition est donc semblable à celle dun plongeur ou dune personne travaillant dans de lair comprimé.
Le préposé à une chambre hyperbare multiplace est habituellement un(e) infirmier(ère), un médecin pneumologue de linhalothérapie, un ancien plongeur ou un technicien hyperbare. Ces personnes sont soumises aux mêmes impératifs physiques que les travailleurs en caisson. On notera cependant que les membres de ce personnel sont souvent des femmes; sauf en cas de grossesse, les femmes ne sont pas plus sensibles que les hommes au travail à lair comprimé. Lorsquune femme enceinte est exposée à de lair comprimé, de lazote passe dans le placenta et dans le ftus. Lors de la décompression, des bulles dazote se forment dans le système veineux. Il sagit de bulles silencieuses qui, lorsquelles sont de faibles dimensions, nont pas deffets nocifs, car elles sont efficacement éliminées par le filtre pulmonaire. Il nest pas certain cependant quil soit judicieux de laisser ces bulles apparaître dans un ftus en développement. Les études faites à ce sujet tendent à conclure que le ftus peut en souffrir. Une enquête a montré que les malformations congénitales étaient plus fréquentes chez les enfants de femmes ayant effectué des plongées en scaphandre autonome alors quelles étaient enceintes. Il est donc déconseillé dexposer des femmes enceintes aux conditions prévalant dans les chambres hyperbares et il y a lieu de définir des politiques répondant à des considérations à la fois médicales et juridiques. Il convient dattirer lattention du personnel féminin sur les risques encourus pendant la grossesse et de concevoir en conséquence les programmes daffectation du personnel et les programmes déducation sanitaire, afin déviter que les femmes enceintes naient à subir ce type dexposition.
On notera cependant quil est possible de traiter en chambre hyperbare des patientes enceintes, puisquelles y respirent 100% doxygène et ne risquent donc pas une embolie à lazote. Des essais cliniques très complets ont prouvé que les craintes signalées précédemment dun risque accru de fibroplasie rétrocristallienne du ftus, ou de rétinopathie du nouveau-né, étaient infondées. Aucun lien avec lexposition na pu être établi non plus en ce qui concerne une autre manifestation pathologique, à savoir la fermeture prématurée du canal artériel.
Dune manière générale, les plongeurs sont exposés aux mêmes types daccidents que toute personne travaillant sur les grands chantiers de génie civil. Les ruptures de câbles, les chutes de charges, les blessures par écrasement dues aux machines, aux grues en mouvement, etc., ne sont pas rares. Le plongeur sous-marin est toutefois exposé en plus à certains types daccidents particuliers propres au milieu dans lequel il opère.
Les blessures par aspiration ou par blocage sont des accidents auxquels il faut faire particulièrement attention. Ce genre daccident peut se produire lorsquon travaille à lintérieur ou à proximité dun orifice de la coque dun navire, dans un caisson (lorsque le niveau deau du côté opposé au plongeur est plus bas), ou encore près dun barrage.
Pour éviter quil ne risque davoir un bras, une jambe ou le corps entier aspiré dans la bouche dune conduite dévacuation, par exemple, il est essentiel de veiller scrupuleusement à verrouiller les vannes des conduites et celles de décharge des barrages lorsque le plongeur est à luvre dans leur voisinage. Il en va de même pour les pompes et les conduites des navires.
Ce type daccident peut provoquer un dème et une hypoxie du membre bloqué suffisamment importants pour induire une nécrose musculaire, une détérioration irréversible des nerfs ou même la perte du membre tout entier; il peut également causer un écrasement massif de toute une partie ou de lensemble du corps entraînant la mort par simple traumatisme massif. Une longue immobilisation dans leau froide peut également causer la mort du plongeur. Si celui-ci est équipé dun scaphandre autonome, il risque dépuiser sa réserve dair et de se noyer avant larrivée des secours, à moins que lon ne puisse lui remettre des bouteilles supplémentaires.
Les hélices des navires occasionnent des blessures franches, que lon peut éviter en bloquant le système de propulsion principal dès quun plongeur est à leau à proximité. Il convient cependant de relever que les navires propulsés par des turbines à vapeur font tourner continuellement et très lentement leurs hélices, lorsquils sont au port, en utilisant le vireur de la turbine, pour éviter den refroidir et déformer les aubes. Aussi, un plongeur qui travaille sur une hélice (pour dégager des câbles emmêlés, par exemple) doit-il veiller à se tenir à lécart de lhélice en mouvement lorsque celle-ci passe près de la coque.
Les coups de ventouse, ou «squeezes», sur lensemble du corps sont des accidents spécifiques aux plongeurs en eau profonde qui utilisent un équipement classique constitué dun casque en cuivre relié par une collerette à un vêtement en caoutchouc souple. Si le raccordement du tuyau dair au casque ne comporte pas de clapet de retenue, une interruption de lalimentation en air depuis la surface provoquera immédiatement un vide relatif dans le casque, ce qui pourra avoir pour effet daspirer littéralement le corps entier vers lintérieur du casque. Les effets peuvent être immédiats et dévastateurs. Ainsi, à une profondeur de 10 m, une force de 12 t environ sexerce sur la partie souple du vêtement du plongeur. Cette force comprimera son corps vers lintérieur du casque si celui-ci nest plus pressurisé. Un effet similaire peut se produire si le plongeur est brusquement victime dun malaise et ne parvient pas à mettre en service lalimentation en air de secours. Il peut en résulter de graves lésions, ou même la mort si ce phénomène se produit près de la surface, car à 10 m de profondeur, le volume du vêtement est réduit de moitié, alors quentre 40 et 50 m, la diminution de volume ne serait que de 17% environ. Ces modifications de volume sont conformes à la loi de Boyle.
Les travailleurs affectés au percement de galeries sont exposés à tous les risques daccidents propres aux grands chantiers de génie civil, avec en outre celui dune plus grande fréquence de chutes et de blessures dues aux éboulements et aux effondrements. Il convient de souligner que lorsquun travailleur dans lair comprimé a été blessé et pourrait avoir des côtes cassées, il faut toujours présumer, jusquà preuve du contraire, quil pourrait souffrir dun pneumothorax et, par conséquent, prendre les plus grandes précautions pour sa décompression. En cas de pneumothorax, il faut intervenir à la pression de la chambre de travail avant de tenter la décompression.
Le bruit peut être une cause de graves lésions pour les travailleurs dans lair comprimé, car les compresseurs, les marteaux pneumatiques et les foreuses ne sont jamais équipés de silencieux efficaces. On a mesuré, dans les caissons et les galeries, des niveaux sonores dépassant 125 dB. Outre la douleur physique quils provoquent, ces niveaux de bruit peuvent causer des lésions permanentes de loreille interne. Le problème est encore aggravé par les phénomènes de réverbération par les parois.
Les travailleurs répugnent souvent à porter des protections des oreilles, estimant quil serait dangereux de ne pouvoir entendre lapproche dun convoi à déblais. Cette crainte est dénuée de fondement, car une protection acoustique ne fait au mieux quatténuer le son, mais ne le supprime pas. Non seulement un convoi à déblais peut être entendu par un travailleur portant ce genre de protection, mais il se signale aussi dautres manières, par des ombres en mouvement ou par des vibrations du sol. Ce nest que si le conduit auditif est complètement bouché par un casque antibruit ou une protection acoustique trop serrés que lon peut sinquiéter. Si de lair ne pénètre pas dans le conduit auditif externe pendant la compression, il peut en résulter un coup de ventouse sur loreille externe lorsque le tympan est déformé vers lextérieur du fait de la pénétration dair dans loreille moyenne par la trompe dEustache. On notera cependant que la plupart des casques antibruit ordinaires ne sont pas totalement étanches à lair. Pendant la compression, qui ne dure quune fraction minime du temps total du poste, on pourra desserrer légèrement le casque si légalisation de la pression pose un problème. Les bouchons doreilles en fibres formées, qui peuvent être moulés pour sadapter au conduit externe, apportent une certaine protection et ne sont pas étanches à lair.
Lobjectif est déviter un niveau sonore moyen, pondéré en fonction du temps, qui soit supérieur à 85 dBA. Tous les travailleurs dans lair comprimé devraient être soumis, à leur embauche, à des audiogrammes de référence, afin de pouvoir déterminer les éventuelles pertes daudition liées à leur séjour en milieu bruyant.
Les chambres hyperbares et les sas de décompression peuvent être équipés de silencieux efficaces posés sur la tuyauterie dalimentation en air de la chambre ou du sas. La présence de cet équipement est importante car, dans le cas contraire, les travailleurs, trop gênés par le bruit, pourraient négliger dassurer une ventilation suffisante de la chambre. Il est possible de maintenir une ventilation permanente grâce à une alimentation dair dont le bruit ne dépasse pas 75 dB, soit à peu près le niveau sonore dun bureau ordinaire.
Le feu est toujours un sujet de préoccupation majeur dans les travaux de galerie mettant en uvre de lair comprimé et dans les activités en chambre médicale hyperbare. On peut avoir une impression trompeuse de sécurité lorsquon se trouve dans un caisson dont les parois et le toit sont en acier et dont le sol nest constitué que de boue humide. Toutefois, même dans ces conditions, un feu dorigine électrique peut se déclarer et détruire les isolations, ce qui peut entraîner des émissions de substances très toxiques et causer très rapidement la mort ou de graves lésions parmi les occupants. Le danger est plus grand encore dans les galeries où lon utilise des coffrages en bois pour la coulée du béton. Dans certaines galeries, les fluides hydrauliques et la paille employée pour le calfeutrage sont des sources de combustion supplémentaires.
Un feu est toujours plus intense en milieu hyperbare, car il y a davantage doxygène pour alimenter la combustion. Le passage de 21 à 28% de la teneur en oxygène double la vitesse de combustion. A mesure quaugmente la pression, la quantité doxygène qui peut brûler augmente également. Cette augmentation est égale au pourcentage doxygène disponible multiplié par la pression exprimée en atmosphères absolues. Ainsi, à une pression de 4 ata (égale à 30 m deau de mer), le pourcentage doxygène effectif est en réalité de 84% dans lair comprimé. Il convient cependant de noter que, même si dans de telles conditions la combustion est très fortement accélérée, cela néquivaut pas à une vitesse de combustion dans 84% doxygène à 1 ata, car lazote présent dans lair a un certain effet extincteur. Lacétylène ne peut être employé à des pressions supérieures à 1 bar en raison de ses propriétés explosives, mais on peut utiliser dautres gaz, ainsi que de loxygène, pour découper lacier. Ce genre dopération a été effectuée sans danger à des pressions atteignant 3 bars. Il convient cependant dêtre extrêmement prudent en pareil cas, et prévoir une personne et une lance à incendie pour éteindre immédiatement tout feu naissant au cas où une étincelle viendrait à entrer en contact avec un produit combustible.
Pour quil y ait feu, trois éléments doivent être réunis: un combustible, de loxygène et une source dinflammation. Si lun quelconque de ces trois facteurs est absent, le feu ne peut se déclencher. Dans des conditions hyperbares, il est pratiquement impossible déliminer loxygène, à moins que lon puisse introduire léquipement en question dans lenvironnement, en le remplissant ou en lentourant dazote. Sil nest pas possible non plus déliminer le combustible, il faut éviter quil puisse y avoir une source dinflammation. Dans les activités médicales hyperbares, il convient de veiller à ce que la teneur en oxygène dune chambre multiplace ne dépasse pas 23%. En outre, tous les équipements électriques de la chambre doivent être à sécurité intrinsèque, excluant toute possibilité de formation dun arc électrique. Le personnel travaillant dans la chambre portera des vêtements en coton ignifugés. La chambre comportera une installation à eau du type déluge, ainsi quun extincteur à main à fonctionnement indépendant. Si un feu se déclenche dans une chambre médicale hyperbare multiplace, il est impossible de lévacuer instantanément, et le feu ne peut donc être combattu quavec lextincteur à main et linstallation du type déluge.
Dans une chambre monoplace pressurisée à 100% doxygène, tout incendie est immédiatement mortel pour loccupant. Le corps humain entretient la combustion dans de loxygène à 100%, surtout sous pression. Cest pourquoi le patient doit être vêtu de coton pur afin déviter les décharges délectricité statique que pourraient produire les tissus synthétiques. Il nest cependant pas nécessaire dignifuger ces vêtements, car ils napporteraient aucune protection en cas de feu. Le seul moyen dempêcher que le feu ne prenne dans les chambres monoplaces remplies doxygène est déviter toute source dinflammation.
En cas de pressions doxygène élevées, à des valeurs relatives supérieures à 10 kg/cm2, il faut savoir que léchauffement adiabatique est une source possible dinflammation. Si de loxygène sous pression de 150 kg/cm2 est brusquement insufflé dans une tuyauterie par une vanne à boisseau sphérique à ouverture rapide, il senflammera spontanément en présence de la moindre impureté, ce qui peut provoquer une violente explosion. De tels accidents sétant effectivement produits, les vannes à boisseau sphérique à ouverture rapide sont à proscrire absolument dans les circuits doxygène haute pression.
Nombreux sont les travailleurs qui doivent subir des décompressions (réduction de la pression ambiante) dans le cadre normal de leurs activités professionnelles. Cest le cas des plongeurs (qui proviennent eux-mêmes de différentes professions), des travailleurs en caisson, des tunneliers, des travailleurs en chambres hyperbares (ordinairement des infirmiers(ères)), des aviateurs et des astronautes. Toute décompression peut être et est parfois effectivement la cause de troubles divers. La plupart dentre eux sont bien connus, mais dautres ne le sont pas et, malgré les soins apportés, ils risquent dêtre la source de handicaps pour ces travailleurs. Les troubles dus à la décompression font lobjet dactives recherches.
Les travailleurs hyperbares peuvent être victimes dun accident de décompression sous leffet de deux mécanismes primaires. Le premier est linhalation dun gaz neutre (inerte) pendant lexposition hyperbare, ce qui entraîne la formation de bulles dans les tissus pendant et après la décompression. On estime généralement que les gaz métaboliques, tels que loxygène et le dioxyde de carbone, ne contribuent pas à la formation de ces bulles. Cest là une hypothèse très probablement fausse, mais comme elle est sans conséquence, nous nous y rallierons ici.
Pendant la compression (élévation de la pression ambiante) qui est exercée sur les travailleurs et pendant tout le temps quils passent sous cette pression, la tension du gaz neutre absorbé et véhiculé dans les artères augmente par rapport à la pression atmosphérique normale le ou les gaz neutres sont alors absorbés par les tissus jusquà ce que sétablisse un équilibre entre la tension des gaz neutres inspirés et celle des gaz absorbés par les artères et les tissus. Il faut, pour atteindre cet équilibre, entre moins de 30 minutes et plus dune journée, selon le type de tissu et le type de gaz et, en particulier, en fonction des paramètres suivants:
Lors de la décompression, cest-à-dire lorsque le travailleur hyperbare revient à la pression atmosphérique normale, le processus sinverse: le gaz est rejeté par les tissus et finalement éliminé. La rapidité de cette élimination est fonction des facteurs mentionnés ci-dessus, à ceci près que, pour des raisons encore mal comprises, lélimination est généralement plus lente que labsorption et se trouve encore ralentie sil y a formation de bulles. Les facteurs qui ont un effet sur la formation des bulles sont bien connus qualitativement, mais non quantitativement. Pour quune bulle se forme, il faut quelle possède une énergie suffisante pour vaincre la pression ambiante, la pression de la tension superficielle et la pression des tissus élastiques. Plusieurs raisons sont invoquées pour expliquer les différences entre ce que lon peut prévoir théoriquement quant à la tension superficielle et le volume que doivent atteindre les bulles pour quelles puissent se former, et ce que lon a pu observer réellement. On considère, en particulier, que les bulles se forment dans les défauts de la surface des tissus (vaisseaux sanguins) et à partir des petites bulles (noyaux gazeux) qui se créent dans lorganisme (par exemple, entre les différents plans des tissus ou dans des zones de cavitation). Les conditions requises pour que le gaz se dégage de la solution sont elles aussi mal connues encore que lon suppose que des bulles se forment chaque fois que les tensions du gaz dans les tissus dépassent la pression ambiante. Une fois formées, les bulles provoquent des lésions (voir ci-après) et se stabilisent sous leffet dun phénomène de coalescence et de lapparition de surfactants à leur surface. Des bulles peuvent aussi se former en dehors de toute décompression, lorsquon change le gaz neutre respiré par le travailleur hyperbare. En réalité, cet effet est faible, et il est pratiquement certain que les travailleurs qui sont victimes dun brusque accident de décompression après un changement du gaz neutre avaient déjà des bulles «stabilisées» dans leurs tissus.
Pour que le travail seffectue dans de bonnes conditions de sécurité, il est donc nécessaire de prévoir un programme de décompression qui évite la formation de bulles et, pour ce faire, délaborer un modèle qui prenne en compte les éléments suivants:
On peut affirmer de façon assez certaine quil nexiste à ce jour aucun modèle pleinement satisfaisant de cinétique et de dynamique de la décompression et que les programmes auxquels sont soumis les travailleurs hyperbares ont été mis au point de façon essentiellement empirique.
Le second mécanisme primaire qui peut être à lorigine des accidents de décompression est le processus du barotraumatisme. Celui-ci peut résulter dune compression ou dune décompression. Dans le barotraumatisme par compression, le volume des zones dair de lorganisme qui sont entourées par des tissus mous, et qui subissent donc un accroissement de la pression ambiante (principe de Pascal), diminue. Selon la loi de Boyle, on peut raisonnablement prévoir quun doublement de la pression ambiante entraîne une réduction de moitié du volume de gaz. Lair comprimé est déplacé par le fluide selon la séquence prévisible ci-après:
Cette séquence peut être interrompue à tout moment dès quune quantité de gaz supplémentaire passe dans la zone dair (par exemple, dans loreille moyenne par exécution dune manuvre de Valsalva) et sarrêter dès que le volume de gaz et la pression des tissus sont en équilibre.
Pendant la décompression, le processus sinverse: les volumes de gaz augmentent et vont provoquer des traumatismes localisés sils ne sévacuent pas à lextérieur du corps. Dans les poumons, un tel traumatisme peut provenir dune distension excessive ou dune déchirure entre des zones adjacentes des poumons ayant des compliances sensiblement différentes et, par conséquent, des taux de dilatation différents.
Les accidents de décompression comprennent les barotraumatismes, la formation de bulles dans les tissus et les bulles intravasculaires.
Pendant la compression, tout espace contenant un gaz peut être affecté par un barotraumatisme; cette lésion est particulièrement fréquente au niveau des oreilles. Loreille externe nest atteinte quen cas docclusion du conduit auditif externe (par des bouchons, une cagoule ou du cérumen); en revanche, les lésions de la membrane du tympan et de loreille moyenne sont fréquentes. La probabilité de ces accidents augmente lorsque le travailleur présente une pathologie de lappareil respiratoire supérieur entraînant un dysfonctionnement de la trompe dEustache. Les conséquences possibles sont une congestion de loreille moyenne (comme mentionné ci-dessus) ou une rupture de la membrane du tympan. Des douleurs doreille et une surdité de conduction sont probables. Lentrée deau froide dans loreille moyenne par suite de la rupture de la membrane du tympan peut provoquer des vertiges provisoires. Les vertiges (éventuellement associés à une surdité sensorineurale) résultent plus souvent de barotraumatismes de loreille interne. Pendant la compression, les lésions de loreille interne sont souvent le résultat dune manuvre de Valsalva trop violente (avec transmission dune onde de fluide à loreille interne par le canal cochléaire). Les lésions de loreille interne se situent ordinairement à lintérieur même de celle-ci les ruptures des fenêtres ronde et ovale étant moins fréquentes.
Les sinus paranasaux sont fréquemment impliqués de la même manière, en général par blocage de lostium. Outre des douleurs localisées et rapportées, lépistaxis est fréquente et les nerfs crâniens peuvent être «comprimés». On notera que le nerf facial peut être également affecté par un barotraumatisme de loreille moyenne chez les individus présentant un conduit nerveux auditif perforé. Plus rarement, dautres zones sont susceptibles de subir un barotraumatisme de compression et certains équipements dêtre détériorés. Ce sont les poumons, les dents, les intestins, et les masques de plongée, les vêtements étanches ou les dispositifs de compensation de la flottabilité.
Les barotraumatismes de décompression sont moins fréquents que les barotraumatismes de compression, mais ils ont généralement des conséquences plus graves. Les deux zones affectées en premier lieu sont les poumons et loreille interne. La lésion pathologique type dun barotraumatisme pulmonaire reste encore à décrire. Le mécanisme a été diversement attribué soit à un gonflement excessif des alvéoles, pour «ouvrir les pores» ou mécaniquement pour briser lalvéole, soit à une déchirure des tissus pulmonaires due à une expansion différentielle localisée des poumons. La contrainte maximale sexerce probablement à la base des alvéoles et, sachant que de nombreux travailleurs sous-marins respirent avec de faibles excursions au niveau ou au voisinage de la capacité pulmonaire totale, le risque de barotraumatisme est accru dans ce groupe, car la compliance pulmonaire est minimale à ces volumes. Le gaz rejeté par des poumons détériorés peut traverser linterstice pour entrer dans le hile pulmonaire, le médiastin et peut-être même les tissus sous-cutanés de la tête et du cou. Ce gaz interstitiel peut provoquer une dyspnée, des douleurs sous-sternales et une toux, avec éventuellement des expectorations sanguines modérées. La présence de gaz dans la tête et le cou se manifeste clairement et peut parfois altérer la phonation. La compression cardiaque est extrêmement rare. Du gaz provenant dun poumon barotraumatisé peut également migrer dans la cavité pleurale (et provoquer un pneumothorax) ou dans les veines pulmonaires (et causer à terme une embolie artérielle gazeuse). Ces gaz sont évacués le plus souvent dans le tissu interstitiel et la cavité pleurale ou dans les veines pulmonaires. Les lésions manifestes des poumons ou les embolies artérielles gazeuses sont heureusement peu fréquentes.
Si une phase gazeuse se forme pendant la décompression, elle se produit généralement en premier lieu dans les tissus. Ces bulles tissulaires peuvent provoquer un dysfonctionnement des tissus par divers mécanismes, dont certains sont mécaniques et dautres biochimiques.
Dans les tissus à compliance réduite, comme les os longs, la moelle épinière et les tendons, les bulles peuvent comprimer les artères, les veines, le système lymphatique et les cellules sensorielles. Ailleurs, les bulles tissulaires peuvent entraîner une rupture mécanique des cellules ou, au niveau microscopique, des gaines de myéline. La solubilité de lazote dans la myéline peut expliquer que le système nerveux soit fréquemment impliqué dans les accidents de décompression qui affectent des travailleurs ayant respiré de lair ou un mélange gazeux oxygène-azote. La formation de bulles dans les tissus peut également induire une réponse biochimique à la présence dun corps étranger et provoquer une réponse inflammatoire, ce qui peut expliquer que les accidents de décompression soient couramment présentés comme une maladie de type grippal. Limportance de la réponse inflammatoire est démontrée chez des animaux comme les lapins, où linhibition de la réponse empêche lapparition daccidents de décompression. La réponse inflammatoire se caractérise principalement par une coagulopathie (particulièrement importante chez lanimal, mais moindre chez lhumain) et par la libération de kinines. Ces substances chimiques provoquent des douleurs et un épanchement de fluide. Laction directe des bulles sur les vaisseaux sanguins se traduit également par une hémoconcentration. Le résultat final est que la microcirculation est compromise de manière appréciable. La mesure de lhématocrite présente généralement une bonne corrélation avec la gravité de laffection. On peut prédire que la correction de cette hémoconcentration a un effet positif significatif sur lissue de la maladie.
Les bulles veineuses peuvent soit se former de nouveau lorsque le gaz cesse dêtre en solution, soit être libérées par les tissus. Ces bulles veineuses migrent dans le sang jusquaux poumons où elles sont emprisonnées dans le système vasculaire pulmonaire. La circulation pulmonaire constitue un filtre extrêmement efficace pour les bulles du fait que la pression dans lartère pulmonaire est relativement faible. En revanche, peu de bulles restent longtemps captives dans la circulation sanguine générale, car la pression artérielle générale est sensiblement plus élevée. Le gaz des bulles capturées dans les poumons diffuse dans les zones pulmonaires remplies dair, doù il est exhalé. En revanche, pendant tout le temps où ces bulles demeurent dans les poumons, elles peuvent avoir des effets nocifs soit en provoquant un déséquilibre de la perfusion et de la ventilation pulmonaires, soit en augmentant la pression artérielle pulmonaire et donc la pression dans le cur droit et le système veineux central. Lélévation de la pression dans le cur droit peut entraîner un «shunt droite-gauche» du sang par des dérivations pulmonaires ou des «défauts anatomiques» intracardiaques, de telle sorte que les bulles évitent le «filtre» pulmonaire pour déclencher une embolie artérielle gazeuse. Les élévations de la pression veineuse entravent le retour veineux des tissus, ce qui altère également lélimination du gaz neutre par la moelle épinière et peut provoquer une infiltration hémorragique veineuse. Les bulles veineuses réagissent également avec les vaisseaux sanguins et les constituants du sang. Sur les vaisseaux sanguins, cette réaction a pour effet de détacher le surfactant des cellules endothéliales, et donc daccroître la perméabilité vasculaire qui peut être encore compromise par la dislocation physique des cellules endothéliales. Cependant, même en labsence de telles lésions, les cellules endothéliales accroissent la concentration des récepteurs de la glycoprotéine pour les leucocytes polymorphonucléaires sur la surface de ces cellules. Cet effet, associé à une stimulation directe des leucocytes par les bulles, entraîne une liaison des leucocytes aux cellules endothéliales (réduction du débit sanguin) et une infiltration ultérieure à lintérieur des vaisseaux sanguins et à travers ceux-ci (diapédèse). Les leucocytes polymorphonucléaires infiltrés induisent par la suite des lésions des tissus par émission de cytotoxines, de radicaux libres doxygène et de phospholipases. Dans le sang, les bulles provoquent non seulement lactivation et laccumulation des leucocytes polymorphonucléaires, mais aussi lactivation des plaquettes, de la coagulation et des compléments, ainsi que lapparition dembolies graisseuses. Ces effets ont une importance relativement mineure dans la circulation veineuse qui présente une compliance très élevée, mais des effets similaires dans les artères sont susceptibles de réduire le débit sanguin à des niveaux ischémiques.
La présence de bulles dans les artères (embolie gazeuse) peut résulter:
Lorsquelles sont dans les veines pulmonaires, les bulles retournent à loreillette et au ventricule gauches et sont ensuite pompées dans laorte. Les bulles se trouvant dans la circulation artérielle se distribuent dans les grands vaisseaux selon la flottabilité et le débit sanguin, mais ailleurs selon le débit sanguin uniquement. Cela explique la prédominance de lembolie cérébrale, en particulier dans lartère cérébrale moyenne. La majorité des bulles qui pénètrent dans la circulation artérielle passent dans les capillaires de la circulation générale et dans les veines pour revenir au côté droit du cur (en général pour être capturées dans les poumons). Pendant ce transit, ces bulles peuvent occasionner une interruption temporaire de fonction. Si elles restent enfermées dans la circulation sanguine générale ou si elles ne sont pas redistribuées dans un délai de 5 à 10 minutes, cette perte de fonction peut persister. Si les bulles forment une embolie dans la circulation du tronc cérébral, lissue peut être fatale. Heureusement, la majorité des bulles sont redistribuées dans les minutes qui suivent leur première arrivée au cerveau et la fonction est habituellement récupérée. Pendant ce transit, les bulles provoquent cependant les mêmes réactions vasculaires (vaisseaux sanguins et sang) que celles qui ont été décrites plus haut pour le sang veineux et les veines. Il peut donc se produire une diminution sensible et progressive du débit sanguin cérébral qui peut atteindre des niveaux incompatibles avec le maintien dune fonction normale. Le travailleur hyperbare sera alors victime dune rechute ou dune détérioration des fonctions. En général, les deux tiers environ des travailleurs hyperbares atteints dembolie gazeuse artérielle cérébrale se rétablissent spontanément; un tiers environ dentre eux feront ultérieurement une rechute.
Le déclenchement dun accident de décompression intervient parfois pendant la décompression. On lobserve le plus couramment dans le barotraumatisme de la remontée et il concerne plus particulièrement les poumons. Mais la plupart des accidents de décompression se déclenchent lorsque celle-ci est terminée. Ceux qui sont dus à la formation de bulles dans les tissus et les vaisseaux sanguins apparaissent généralement dans les minutes ou les heures qui suivent la décompression. Lévolution naturelle dun grand nombre de ces accidents de décompression est une disparition spontanée des symptômes. Celle-ci peut toutefois être incomplète et, dans certains cas, un traitement sera nécessaire. Il existe de bonnes indications selon lesquelles plus le traitement est précoce, plus lissue est favorable. Lévolution naturelle des accidents de décompression traités est variable. Dans certains cas, les problèmes résiduels se résolvent dans les 6 à 12 mois qui suivent, tandis que dans dautres les symptômes persistent.
Les accidents de décompression se présentent souvent sous la forme daffections de type grippal. Les autres symptômes dont les sujets se plaignent fréquemment sont des troubles sensoriels variés, des douleurs localisées, en particulier dans les membres, et diverses manifestations neurologiques qui peuvent impliquer les fonctions supérieures, des sensations particulières et une fatigue motrice (la peau et le système lymphatique sont moins fréquemment affectés). Dans certains groupes de travailleurs hyperbares, la manifestation la plus commune de laccident de décompression est la douleur. Il peut sagir dune douleur discrète au niveau dune ou de plusieurs articulations particulières, dune douleur rapportée (la douleur est souvent localisée dans le même membre que celui où lon constate des déficits neurologiques évidents) ou, moins communément, en cas daccident de décompression aigu, de douleurs continues ou brèves, vagues et migratoires. On peut raisonnablement affirmer que les manifestations des accidents de décompression sont changeantes. On devrait partir du principe que, jusquà preuve du contraire, tout accident chez un travailleur hyperbare survenant dans un délai de 24 à 48 heures après une décompression est lié à cette décompression.
Jusquà une date récente, les accidents de décompression étaient classés comme suit:
Les maladies de décompression étaient subdivisées à leur tour en plusieurs catégories: type 1 (douleurs, démangeaisons, gonflements et éruptions cutanées), type 2 (toute autre manifestation) et type 3 (manifestations de lembolie gazeuse artérielle cérébrale et des maladies de décompression). Ce système de classification résultait dune analyse de létat des travailleurs en caisson utilisant de nouveaux programmes de décompression. Il a dû cependant être abandonné, car il ne permettait ni discrimination, ni pronostic, et parce quil ny avait quune faible concordance entre les diagnostics de médecins expérimentés. La nouvelle classification des accidents de décompression tient compte de la difficulté de distinguer entre lembolie gazeuse artérielle cérébrale et les maladies cérébrales de décompression, ainsi quentre les maladies de décompression de type 1 et celles de types 2 et 3. Tous les accidents de décompression sont maintenant classés en tant que tels (voir tableau 36.2). Ce terme est précédé dune description de la nature de la maladie, de lévolution des symptômes et dune liste des systèmes organiques où ces symptômes se manifestent (aucune hypothèse nest faite quant à la pathologie sous-jacente). Par exemple, un plongeur peut être atteint dune maladie de décompression neurologique progressive aiguë. La classification complète des accidents de décompression inclut un commentaire sur la présence ou labsence de barotraumatisme et sur la charge probable de gaz inerte. Ces derniers éléments ont une importance pour le traitement et pour laptitude probable à reprendre le travail.
Durée |
Evolution |
Symptômes |
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Aigu |
Progressive |
Musculo-squelettiques |
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Chronique |
Disparition spontanée |
Cutanés |
Accident de décompression avec ou sans barotraumatisme |
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Statique |
Lymphatiques |
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Rechutes |
Neurologiques |
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Vestibulaires |
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Cardio-respiratoires |
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Certains travailleurs hyperbares, en grande majorité des plongeurs, peuvent être victimes daccidents de décompression et doivent faire lobjet dun sauvetage. Il peut alors être nécessaire soit de les ramener jusquà une plate-forme ou une cloche à plongeurs, soit deffectuer un sauvetage en pleine eau. Le succès des opérations nécessite la définition et lapplication de techniques bien précises. Dune manière générale, un plongeur devrait être sorti de leau en position horizontale pour éviter la chute éventuellement fatale du débit cardiaque lorsquil aura été soumis à nouveau à laction de la pesanteur avec la diruèse qui en résulte (dans toute plongée, il y a perte progressive du volume sanguin consécutif au déplacement du sang des périphéries vers la poitrine); cette position sera maintenue jusquà ce que le plongeur soit placé, si nécessaire, en chambre de recompression.
La réanimation dun plongeur accidenté devrait suivre le même processus que pour tout autre type de réanimation. En particulier, la réanimation dun individu hypothermique devrait se poursuivre au moins jusquà ce quil soit réchauffé. Rien ne prouve que la réanimation dun plongeur accidenté effectuée dans leau soit une méthode réellement efficace. En général, le mieux est de le ramener rapidement à terre ou jusquà une cloche à plongeurs ou à une plate-forme de surface.
Un travailleur hyperbare victime dun accident de décompression devrait être placé en position horizontale pour réduire au minimum les risques de migration des bulles jusquau cerveau, et non la tête inclinée vers le bas, position qui pourrait avoir un effet défavorable sur lissue de laccident. On lui fera respirer de loxygène à 100%, ce qui exige soit une valve pulmo-commandée si la personne est consciente, soit un masque étanche, des débits doxygène élevés et un réservoir. Sil est nécessaire de prolonger ladministration doxygène, on devrait ménager des pauses avec respiration dair pour corriger ou retarder lapparition de la toxicité de loxygène pour les poumons. Toute victime dun accident de décompression devrait être réhydratée. La réhydratation orale est probablement exclue dans les cas de réanimation intensive dune personne gravement accidentée. Dune manière générale, il est difficile dadministrer oralement des fluides à une personne allongée en position horizontale. Ce type de réhydratation nécessite linterruption de ladministration doxygène; elle a alors ordinairement un effet immédiat négligeable sur le volume sanguin. Enfin, sachant quun traitement ultérieur à loxygène hyperbare pourrait provoquer des convulsions, la présence de substances dans lestomac nest pas souhaitable. Lidéal serait donc de pratiquer la réanimation au moyen de fluides par voie intraveineuse. Il nest pas prouvé que les solutions colloïdales présentent un avantage quelconque par rapport aux solutions cristalloïdes, et le mieux est probablement un soluté physiologique. On sabstiendra de donner des solutions contenant un lactate à un plongeur victime du froid ou des solutions de dextrose à une personne dont le cerveau est atteint (une aggravation de latteinte serait possible). Il est essentiel de maintenir un équilibre précis des fluides, car cest là sans doute la meilleure garantie de succès dans la réanimation dun travailleur hyperbare victime dun accident de décompression. Les atteintes de la vessie sont suffisamment fréquentes pour justifier de procéder rapidement à un sondage vésical en labsence de production urinaire.
Il nexiste aucun médicament dont il soit prouvé quil peut favoriser le traitement des accidents de décompression. La lidocaïne suscite néanmoins un intérêt croissant et fait lobjet dessais cliniques. On estime quelle joue à la fois le rôle dun stabilisateur de la membrane et dun inhibiteur de laccumulation des leucocytes polymorphonucléaires et de leur adhérence aux vaisseaux sanguins provoquées par les bulles. On notera que lun des rôles probables de loxygène hyperbare est également dinhiber laccumulation des leucocytes et leur adhérence aux vaisseaux sanguins. Enfin, il nexiste aucune preuve de lutilité des inhibiteurs de plaquettes tels que laspirine ou autres anticoagulants. En fait, comme les hémorragies au niveau du système nerveux central sont associées aux accidents neurologiques graves de décompression, ladministration de ces médicaments pourrait même être contre-indiquée.
Lacheminement dun travailleur hyperbare victime dun accident de décompression jusquà une installation de recompression thérapeutique doit intervenir aussi rapidement que possible, sans comporter toutefois aucune nouvelle décompression. Laltitude maximale à respecter lors dune évacuation sanitaire aérienne est de 300 m au-dessus du niveau de la mer. Pendant le transport, on assurera naturellement les premiers soins et on administrera les traitements adjuvants décrits ci-dessus.
Le traitement de référence de la majorité des accidents de décompression est la recompression en chambre. A cette règle ne font exception que les barotraumatismes ne provoquant pas dembolie artérielle gazeuse. La majorité des victimes dun barotraumatisme auditif nécessitent une audiologie sérielle, des décongestionnants nasaux, des analgésiques et, si lon soupçonne un barotraumatisme de loreille interne, le repos allongé absolu. Il est possible cependant que loxygène hyperbare (associé à un blocage du ganglion étoilé) soit un traitement efficace pour ce dernier groupe de patients. Les autres barotraumatismes appelant souvent un traitement sont ceux des poumons; la plupart dentre eux réagissent bien à une exposition à 100% doxygène à la pression atmosphérique. Une canulation thoracique peut parfois être nécessaire en cas de pneumothorax. Pour les autres patients, il est indiqué de procéder rapidement à une recompression.
Une élévation de la pression ambiante diminue le diamètre des bulles et, par conséquent, leur stabilité (en augmentant la tension superficielle). Ces bulles de plus faible diamètre présentent également un rapport de leur surface à leur volume qui est plus élevé et qui provoque leur désagrégation par diffusion; leurs effets mécaniques de déchirure et de compression sur les tissus sen trouvent réduits. Il se peut également quil existe un seuil de volume des bulles qui simule une réaction de corps étranger; cet effet pourrait être diminué par une réduction des dimensions des bulles. Enfin, la réduction du volume (de la longueur, en fait) des colonnes de gaz captives dans la circulation sanguine générale favorise leur redistribution dans les veines. Lautre résultat de la plupart des recompressions est une augmentation de la pression doxygène inspirée (PiO2) et artérielle (PaO2), ce qui a pour effet de supprimer lhypoxie, dabaisser la pression du fluide interstitiel, dinhiber lactivation et laccumulation des leucocytes polymorphonucléaires qui sont ordinairement provoquées par les bulles, et dabaisser lhématocrite et donc la viscosité sanguine.
La pression idéale pour le traitement des accidents de décompression nest pas établie de manière certaine, mais lon a coutume de retenir comme premier choix une compression à 2,8 bars absolus (18,3 m deau de mer; 280 kPa), suivie dune compression à des valeurs de 4 et 6 bars absolus si la réponse des symptômes et des signes nest pas satisfaisante. Lexpérience sur lanimal suggère quune pression de 2 bars absolus est aussi efficace que des valeurs plus élevées.
Il nest pas établi non plus quel est le gaz qui convient le mieux pour les recompressions thérapeutiques. Il se peut que les mélanges doxygène et dhélium soient plus efficaces pour la diminution de volume des bulles dair que lair ou que loxygène à 100%, et des recherches se poursuivent actuellement dans ce domaine. La PiO2 idéale serait, daprès des recherches in vivo, de lordre de 2 bars absolus, quoiquil soit bien établi, dans le cas des patients atteints à la tête, que la pression idéale devrait être plus faible, soit de lordre de 1,5 bar absolu. Lincidence de la dose en ce qui concerne loxygène et linhibition de laccumulation des leucocytes polymorphonucléaires provoquée par les bulles na pas encore été établie.
Le traitement en chambre de recompression dun travailleur hyperbare accidenté ne doit pas compromettre la nécessité de lui fournir un traitement adjuvant, comme la ventilation, la réhydratation ou le monitorage. Pour constituer une installation de traitement efficace, une chambre de recompression doit être utilisée en liaison avec les équipements couramment employés dans les unités de réanimation.
La persistance et la réapparition de symptômes et de signes daccident de décompression sont fréquentes et la majorité des travailleurs accidentés doivent être soumis à des recompressions répétées. Celles-ci devraient se poursuivre aussi longtemps que laccident naura pas été neutralisé de manière satisfaisante ou, du moins, tant que deux traitements successifs nauront pas réussi à produire damélioration prolongée. La base des investigations est constituée par des examens neurologiques cliniques approfondis (y compris de la santé mentale), étant donné que les techniques dimagerie ou les techniques exploratoires de provocation disponibles ont soit un taux de faux positifs excessif (EEG, scintigraphie osseuse, tomographie monophotonique démission), soit un taux de faux négatifs excessif (scanographie, IRM, tomographie démission à positons (TEP), études de réponses évoquées). Un an après un épisode daccident de décompression, le travailleur devrait subir une radiographie pour déterminer sil existe une nécrose dysbarique (nécrose aseptique) des os longs.
Lissue des accidents de décompression après une thérapie de recompression dépend entièrement du groupe de personnes étudié. La majorité des travailleurs hyperbares (plongeurs militaires et de lexploration pétrolière) réagissent bien au traitement et les déficits résiduels significatifs sont rares. En revanche, parmi les personnes pratiquant la plongée de loisirs, les traitements à la suite dun accident de décompression donnent souvent des résultats médiocres. Les motifs de cette différence ne sont pas établis. Les séquelles courantes des accidents de décompression sont, en ordre de fréquence décroissante: un état dépressif, des difficultés de mémoire à court terme, des symptômes sensoriels comme lengourdissement, des difficultés de miction et des troubles sexuels, ainsi que des douleurs vagues continues ou brèves.
La majorité des travailleurs hyperbares sont heureusement en mesure de reprendre leur travail après un épisode daccident de décompression. La reprise devrait toutefois être différée dun mois au moins (pour permettre un retour à la normale de la physiologie perturbée). Elle devrait être découragée en cas de barotraumatisme pulmonaire ou dantécédents de barotraumatismes récurrents ou graves de loreille interne. Le reprise du travail devrait également être conditionnée par: