La surveillance des maladies professionnelles et des accidents du travail appelle le contrôle systématique des problèmes de santé dans la population active, afin de prévenir et de maîtriser les risques professionnels, ainsi que les maladies et les accidents qui en résultent. Cette surveillance comporte quatre étapes essentielles (Baker, Melius et Millar, 1988; Baker, 1986):
Pour employer une formule concise, on peut dire que la surveillance de la santé au travail consiste à dénombrer, à évaluer et à agir (Landrigan, 1989).
Le concept de surveillance se rapporte généralement à deux grands ensembles dactivités relatives à la santé au travail. La surveillance de la santé publique aux Etats-Unis renvoie aux activités entreprises par les autorités locales, celles des Etats ou celles du gouvernement fédéral, selon leurs compétences respectives, afin de prévenir et de suivre les maladies professionnelles et les accidents du travail. Ce type de surveillance porte sur une population exerçant une activité professionnelle, cest-à-dire sur les travailleurs. Les cas de maladie ou daccident enregistrés sont ceux dont lorigine professionnelle a été établie ou est présumée telle. Nous examinerons ici quelles sont ces activités.
La surveillance médicale se rapporte aux tests et examens médicaux auxquels sont soumis les travailleurs susceptibles dêtre exposés à un risque de morbidité professionnelle, afin de mettre en évidence une maladie éventuelle. La surveillance médicale a généralement une large portée et constitue la première étape dans le dépistage dun problème de santé lié au travail. Si une personne ou une population est exposée à un agent toxique dont les effets sont connus, et si lobjectif premier des examens et des tests est de déceler chez ces individus la présence probable dun ou de plusieurs de ces effets, cette activité de surveillance est alors plus correctement qualifiée de dépistage médical (Halperin et Frazier, 1985). Un programme de surveillance médicale comprend des examens et des tests effectués chez un groupe de travailleurs exposés au même risque, en vue didentifier les individus susceptibles dêtre atteints de maladie professionnelle et de déceler les symptômes des maladies résultant dexpositions professionnelles parmi les participants au programme. Un tel programme est généralement entrepris à la demande de lemployeur, du syndicat ou du salarié.
La fonction première dune surveillance de la santé au travail est de déterminer lincidence et la prévalence des maladies pro-fessionnelles connues et des accidents du travail déclarés. Une collecte précise et complète des données épidémiologiques descriptives y relatives constitue la condition préalable essentielle à létablissement dune démarche rationnelle de prévention des maladies professionnelles et des accidents du travail. Lévaluation de la nature, de lampleur et de la répartition de ces lésions dans une zone géographique quelconque exige une base de données épidémiologiques solide. Seule une évaluation épidémiologique de létendue de la maladie professionnelle peut raisonnablement déterminer son importance par rapport à dautres problèmes de santé publique, les moyens financiers nécessaires pour y remédier et lurgence dune réglementation. En outre, la collecte de données sur lincidence et la prévalence permet danalyser les tendances des maladies professionnelles et des accidents du travail dans différents groupes, en différents endroits et au cours de périodes différentes. La détection de ces tendances sert à établir un ordre de priorité et des stratégies en matière de lutte et de recherche, ainsi quà évaluer lefficacité des actions entreprises (Baker, Melius et Millar, 1988).
La deuxième grande fonction dune surveillance de la santé au travail est didentifier les cas individuels de maladies professionnelles et daccidents du travail, afin de découvrir et dexaminer dautres individus, sur le même lieu de travail, susceptibles dêtre exposés à des lésions du même ordre. Ce procédé permet également de mettre en place des activités de contrôle destinées à faire diminuer les risques associés aux cas initiaux identifiés (Baker, Melius et Millar, 1988; Baker, Honchar et Fine, 1989). Par «cas initial» dune maladie professionnelle ou dun accident de travail, on entend le premier individu malade ou blessé sur un lieu de travail donné qui a reçu des soins médicaux et, par conséquent, a attiré lattention sur lexistence dun risque professionnel et dune nouvelle population qui y est exposée. Lidentification dun cas vise aussi à sassurer que la victime bénéficie dun suivi clinique approprié, point dautant plus important que le nombre de médecins du travail est faible (Markowitz et coll., 1989; Castorino et Rosenstock, 1992).
Enfin, la surveillance de la santé au travail est un moyen important pour mettre en évidence de nouvelles associations entre les facteurs professionnels et les maladies qui en résultent, étant donné que lon ignore la toxicité potentielle de la plupart des produits chimiques utilisés sur le lieu de travail. Grâce à la surveillance du milieu de travail, la découverte de maladies rares, de concentrations de cas de maladies banales ou dassociations suspectes exposition-maladie peut apporter des indices essentiels pour une meilleure évaluation scientifique du problème et la reconnaissance éventuelle de nouvelles maladies professionnelles.
Plusieurs facteurs importants entravent la capacité quont les systèmes de surveillance et de déclaration des maladies professionnelles de remplir les fonctions susmentionnées. Tout dabord, la détermination de la cause ou des causes sous-jacentes de toute maladie est la condition sine qua non de lenregistrement et de la déclaration des maladies professionnelles. Cependant, dans un modèle médical traditionnel privilégiant le diagnostic et les soins, lidentification et la suppression des causes de la maladie peuvent ne pas constituer une priorité. De plus, les prestataires de soins nont bien souvent pas la formation nécessaire pour soupçonner que le travail est à lorigine de la maladie (Rosenstock, 1981) et ninterrogent pas systématiquement leurs patients sur leurs antécédents professionnels (Institute of Medicine, 1988). Cette constatation na rien de surprenant étant donné que, aux Etats-Unis, létudiant en médecine type ne suit que six heures de formation en médecine du travail pendant ses quatre années détudes (Burstein et Levy, 1994).
Certaines caractéristiques des maladies professionnelles en contrarient la mise en évidence. A quelques exceptions près plus précisément, langiosarcome du foie, le mésothéliome malin et les pneumoconioses , la plupart des maladies susceptibles dêtre liées à des expositions professionnelles ont également des causes non professionnelles. Cette non-spécificité rend difficile létablissement de la contribution professionnelle à lapparition de la maladie. En effet, linteraction des expositions professionnelles avec dautres facteurs de risque peut faire augmenter considérablement le risque dapparition de la maladie; cest le cas de lexposition à lamiante et du tabagisme. Les maladies professionnelles chroniques, comme le cancer et les affections respiratoires chroniques, présentent toujours une longue période de latence entre le début de lexposition professionnelle et lapparition des signes cliniques. Ainsi, le mésothéliome malin a généralement un temps de latence de 35 ans, voire plus. Le médecin soupçonne dautant moins une éventuelle étiologie professionnelle quun travailleur atteint de cette affection peut très bien avoir pris sa retraite.
Le fait que lévaluation de la toxicité potentielle de la plupart des produits chimiques du commerce na jamais été effectuée est également à lorigine de la considérable sous-estimation de limportance des maladies professionnelles. Une étude conduite par le Conseil national de la recherche (National Research Council (NRC)) aux Etats-Unis dans les années quatre-vingt a révélé labsence dinformations sur la toxicité denviron 80% des 60 000 substances chimiques utilisées dans le commerce. Même dans le groupe de substances les plus strictement réglementées et sur lesquelles on détient le plus dinformations médicaments et additifs alimentaires , on ne dispose de renseignements assez complets sur des effets nocifs éventuels que pour une minorité de produits (NRC, 1984).
Les travailleurs ont parfois de la peine à dresser un inventaire précis des produits toxiques auxquels ils ont été exposés. Malgré quelques progrès réalisés dans certains pays tels que les Etats-Unis dans les années quatre-vingt, nombreux sont les travailleurs qui ne sont pas informés de la nature dangereuse des matières avec lesquelles ils travaillent. Même si ces informations sont fournies, il peut être difficile de se rappeler limportance des expositions à de multiples agents dans différents emplois au cours dune vie professionnelle. Par conséquent, même les prestataires de soins qui sefforcent dobtenir de leurs patients des informations sur leurs antécédents professionnels voient parfois leurs tentatives échouer.
Les employeurs peuvent constituer une excellente source dinformations relatives aux expositions professionnelles et à lapparition de maladies associées au travail. Cependant, évaluer limportance des expositions sur le lieu de travail ou déterminer si une maladie est liée à la profession nest pas toujours de la compétence dun grand nombre demployeurs. En outre, la recherche ou la découverte de lorigine professionnelle dune maladie entraîne des dépenses qui peuvent décourager les employeurs dutiliser correctement ces informations. Les intérêts potentiellement divergents de la santé financière de lentreprise et de la santé physique et mentale du travailleur représentent un obstacle majeur à loptimisation de la surveillance des maladies professionnelles.
Les registres internationaux de maladies professionnelles constituent un développement très intéressant de la santé au travail. Ils présentent un avantage manifeste, la possibilité de conduire dimportantes études qui pourraient permettre détablir le risque de maladies rares. Deux registres similaires de maladies professionnelles ont été crées dans les années quatre-vingt.
Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a établi le registre international des personnes exposées aux contaminants et aux herbicides phénoxy en 1984 (CIRC, 1990). En 1990, le registre comptait 18 972 travailleurs provenant de 19 cohortes de 10 pays différents. Par définition, toutes les personnes enregistrées travaillaient dans des industries liées aux herbicides phénoxy ou aux chlorophénols, voire aux deux, notamment dans les industries de production ou de transformation, ou utilisaient ces produits. Les expositions des cohortes participantes ont été évaluées (Kauppinen et coll., 1993), mais les analyses de la mortalité et de lincidence du cancer nont pas encore été publiées.
Un registre international des cas dangiosarcome hépatique est actuellement tenu par Bennett, de ICI Chemicals and Polymers Limited, au Royaume-Uni. Lexposition professionnelle au chlorure de vinyle en constitue lunique étiologie connue. Les cas sont rapportés par un groupe de scientifiques bénévoles travaillant dans des entreprises fabriquant du chlorure de vinyle, des institutions gouvernementales et des universités. En 1990, le registre recensait 157 cas dangiosarcome hépatique, diagnostiqués entre 1951 et 1990 dans 11 pays ou régions. Le tableau 32.1 montre également que la plupart des cas enregistrés proviennent de pays où la production de poly(chlorure de vinyle) a commencé avant 1950. Ce registre a recensé 6 groupes de 10 cas au moins dangiosarcomes hépatiques chez des travailleurs dans des entreprises dAmérique du Nord ou dEurope (Bennett, 1990).
Pays/région |
Nombre d’usines produisant du PVC |
Première année de production du PVC |
Nombre de cas d’angiosarcome hépatique |
Etats-Unis |
50 |
(1939?) |
39 |
Canada |
5 |
(1943) |
13 |
République fédérale d’Allemagne |
10 |
(1931) |
37 |
France |
8 |
(1939) |
28 |
Royaume-Uni |
7 |
(1940) |
16 |
Autres pays occidentaux |
28 |
(1938) |
15 |
Europe de l’Est |
23 |
(avant 1939) |
6 |
Japon |
36 |
(1950) |
3 |
Amérique centrale et du Sud |
22 |
(1953) |
0 |
Australie |
3 |
(1950-1960) |
0 |
Moyen-Orient |
1 |
(1987) |
0 |
Total |
193 |
|
157 |
Source: Bennett, B.: World Register of Cases of Angiosarcoma of the Liver (ASL) due to Vinyl Chloride Monomer, 1990.
Les employeurs sont parfois tenus par la loi de déclarer les maladies professionnelles et les accidents du travail qui surviennent dans leur entreprise. Comme toutes les autres informations relatives au lieu de travail nombre de salariés, salaires, heures supplémentaires, etc. , les données relatives aux maladies et aux accidents peuvent être systématiquement recueillies par les institutions gouvernementales afin de surveiller la santé au travail.
Aux Etats-Unis, le Bureau des statistiques du travail (Bureau of Labor Statistics (BLS)) du ministère du Travail effectue, depuis 1972, une enquête annuelle des maladies professionnelles et des accidents du travail (sous le titre anglais de Survey of Occupational Injuries and Illnesses), aux termes de la loi sur la sécurité et la santé au travail (BLS, 1993b). Lobjectif est de recueillir le nombre et de calculer le taux de maladies et daccidents déclarés par les employeurs privés comme ayant une origine professionnelle (BLS, 1986). Cette enquête annuelle exclut les exploitations agricoles employant moins de 11 salariés, les travailleurs indépendants et les fonctionnaires des administrations locales, du gouvernement des Etats et du gouvernement fédéral. Lenquête de 1992 présente les données recueillies par questionnaire auprès dun échantillonnage aléatoire stratifié denviron 250 000 établissements du secteur privé aux Etats-Unis (BLS, 1994).
Le questionnaire de lenquête du BLS rempli par lemployeur est tiré dun registre des maladies professionnelles et des accidents du travail que les employeurs sont tenus de mettre à jour par lAdministration de la sécurité et de la santé au travail (Occupational Safety and Health Administration (OSHA)) (registre 200 de lOSHA). Bien que cet organisme exige que lemployeur soit en mesure de présenter ce registre sur demande de ses inspecteurs en cas de contrôle, cela ne signifie pas que les employeurs soient tenus de rendre automatiquement compte du contenu du registre à lOSHA, sauf sils font partie de léchantillon demployeurs participant à ladite enquête (BLS, 1986).
En raison de quelques lacunes bien connues, lenquête du BLS ne peut fournir un décompte complet et précis des maladies professionnelles aux Etats-Unis (Pollack et Keimig, 1987). Comme les données sont fournies par les employeurs, toute maladie dont le salarié ne signale pas à lemployeur lorigine professionnelle ne sera pas déclarée dans lenquête annuelle. Dans la population active, cette omission peut être due à la peur déventuelles conséquences fâcheuses pour le travailleur. Un autre obstacle majeur à la déclaration tient au fait que le médecin traitant peut ne pas diagnostiquer le caractère professionnel dune maladie, notamment dans le cas des maladies chroniques. Les maladies professionnelles survenant chez les travailleurs retraités ne sont pas soumises à lobligation de déclaration du BLS. En effet, il est peu probable que lemployeur soit informé de lapparition dune maladie associée au travail chez un retraité. Etant donné quun grand nombre de cas de maladies professionnelles chroniques, y compris le cancer et les affections pulmonaires, présentent un long temps de latence et risquent dapparaître après le départ en retraite, un grand nombre de ces cas ne figure pas dans les données recueillies par le BLS. Ce dernier a reconnu ces lacunes dans un récent rapport sur son enquête annuelle (BLS, 1993a). En réponse aux recommandations de lAcadémie nationale des sciences (National Academy of Sciences (NAS)), il a repensé la conception générale de son enquête et en a lancé une nouvelle en 1992.
Selon lenquête de 1992, 457 400 maladies professionnelles étaient recensées dans le secteur privé aux Etats-Unis (BLS, 1994), soit une augmentation de 24% ou de 89 100 cas par rapport aux 368 300 maladies enregistrées dans lenquête annuelle de 1991. Lincidence des nouvelles maladies professionnelles était de 60,0 pour 10 000 travailleurs en 1992.
Les troubles associés à un traumatisme répétitif, tels que le syndrome du canal carpien, la tendinite du poignet et du coude et le déficit auditif, occupent une place prépondérante dans les maladies professionnelles enregistrées dans lenquête annuelle du BLS, et ce, depuis 1987 (voir tableau 32.2). En 1992, ils représentaient 62% de la totalité des cas de maladies enregistrés dans lenquête annuelle. Les affections cutanées et pulmonaires et les troubles associés à un traumatisme physique forment dautres catégories importantes de maladies.
Catégorie de maladie |
1986 |
1992 |
Variation en % |
Maladies cutanées |
41 900 |
62 900 |
+ 50,1% |
Maladies pulmonaires liées à l’inhalation de poussières |
3 200 |
2 800 |
– 12,5% |
Affections respiratoires dues aux agents toxiques |
12 300 |
23 500 |
+ 91,1% |
Intoxications |
4 300 |
7 000 |
+ 62,8% |
Troubles dus aux agents physiques |
9 200 |
22 200 |
+141,3% |
Troubles associés à un traumatisme répété |
45 500 |
281 800 |
+519,3% |
Toutes les autres maladies professionnelles |
20 400 |
57 300 |
+180,9% |
Total |
136 900 |
457 400 |
+234,4% |
Total sans les troubles associés à un traumatisme répété |
91 300 |
175 600 |
+ 92,3% |
Nombre annuel moyen d’emplois dans le secteur privé |
83 291 200 |
90 459 600 |
+ 8,7% |
Sources: Bureau of Labor Statistics (BLS): Occupational Injuries and Illnesses in the United States by Industry, 1991, 1993a; US Department of Labor (USDL), Bureau of Labor Statistics (BLS), données non publiées, 1994.
Bien que les troubles associés à un traumatisme répété soient en grande partie responsables de laugmentation des cas de maladies professionnelles, on note également une hausse de 50% de lincidence des maladies professionnelles enregistrées dues à dautres causes entre 1986 et 1992, période au cours de laquelle lemploi a augmenté de 8,7% aux Etats-Unis.
Laugmentation du nombre et du pourcentage de maladies professionnelles déclarées par les employeurs et notifiées au BLS ces dernières années aux Etats-Unis est considérable. Cette évolution rapide est la conséquence de changements dans lapparition de la maladie et dans la détermination et la déclaration de ces affections. Par comparaison, au cours de la même période 1986-1991, le pourcentage daccidents du travail enregistrés par le BLS pour 100 travailleurs à temps plein est passé de 7,7 en 1986 à 7,9 en 1991, soit une augmentation de 2,6%. Le nombre daccidents mortels enregistrés sur le lieu de travail na pas non plus augmenté sensiblement au cours de la première moitié des années quatre-vingt-dix.
En plus de lenquête conduite par le BLS, un grand nombre demployeurs nord-américains se chargent du contrôle médical de leurs salariés et fournissent par conséquent une grande quantité dinformations utiles à la surveillance des maladies professionnelles. Ces programmes de surveillance sont entrepris pour de nombreuses raisons: respecter les dispositions de lOSHA; conserver un personnel en bonne santé grâce au diagnostic et au traitement des maladies non professionnelles; sassurer que le travailleur est apte à exécuter les tâches qui lui incombent, par exemple lorsquil est appelé à porter un masque de protection respiratoire; mener une surveillance épidémiologique pour mettre en évidence des relations entre types dexposition et maladies. Ces activités exigent des ressources considérables et pourraient contribuer utilement à la surveillance des maladies professionnelles relevant de la santé publique. Cependant, ces données ne sont pas uniformes, leur qualité est incertaine et elles sont largement inaccessibles à lextérieur des entreprises où elles sont recueillies: aussi leur exploitation pour la surveillance de la santé au travail a-t-elle été très limitée (Baker, Melius et Millar, 1988).
LOSHA exige également que les employeurs mettent en place une surveillance médicale spéciale pour les travailleurs exposés à un nombre restreint dagents toxiques. En outre, pour 14 agents cancérogènes de la vessie et du poumon bien identifiés, lOSHA demande un examen clinique, ainsi quune anamnèse professionnelle et médicale. Les données recueillies conformément aux présentes dispositions de lOSHA ne sont pas automatiquement notifiées aux institutions gouvernementales ou à dautres banques de données centralisées et ne sont pas accessibles aux fins des systèmes de déclaration des maladies professionnelles.
Les systèmes de déclaration des maladies professionnelles des salariés du secteur public peuvent différer de ceux du secteur privé. Aux Etats-Unis, par exemple, lenquête annuelle des maladies professionnelles et des accidents du travail conduite par le ministère du Travail (enquête annuelle du BLS) exclut les salariés du secteur public qui représentaient pourtant environ 17% (18,4 millions de travailleurs) de lensemble de la population active américaine en 1991. Plus des trois quarts de ces travailleurs sont employés par une administration locale ou par le gouvernement dun Etat.
Aux Etats-Unis, les données relatives aux maladies professionnelles des fonctionnaires fédéraux sont recueillies par le Programme de réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles des fonctionnaires fédéraux. En 1993, 15 500 cas de maladies professionnelles ont été recensés dans cette catégorie, ce qui correspond à un taux de 51,7 cas de maladies professionnelles pour 10 000 travailleurs à temps plein (Slighter, 1994). Les taux et le nombre des maladies professionnelles ne sont disponibles que dans certains Etats et administrations locales. Une étude conduite chez les fonctionnaires des administrations locales et du gouvernement de lEtat du New Jersey, Etat fortement industrialisé, recensait 1 700 maladies professionnelles en 1990, soit une incidence de 50 pour 10 000 travailleurs du secteur public (Roche, 1993). Relevons que les taux des maladies professionnelles chez les employés fédéraux ou non correspondent exactement à ceux des mêmes maladies chez les travailleurs du secteur privé enregistrés dans lenquête annuelle du BLS. Comme secteur privé et secteur public ne demandent pas le même type de travail, la répartition des maladies par catégorie y est différente.
Les systèmes de réparation des maladies professionnelles et des accidents du travail constituent a priori un outil de surveillance intéressant pour la santé au travail, car on peut penser que le caractère professionnel dune maladie a été établi par un expert. Les affections aiguës dont létiologie est facilement reconnaissable sont fréquemment enregistrées par les régimes de réparation. Les intoxications, linhalation massive de toxiques respiratoires et les dermatoses en sont quelques exemples.
Malheureusement, lusage qui peut être fait des dossiers des systèmes de réparation pour obtenir des données de surveillance fiables est très limité en raison de la non-normalisation des demandes, de labsence de définition standard des cas, des obstacles qui dissuadent les travailleurs et les employeurs de déposer une demande de réparation, en raison aussi du manque daptitude des médecins à diagnostiquer les maladies professionnelles chroniques comportant de longues périodes de latence, ou encore à cause du laps de temps de plusieurs années qui peut sécouler entre le dépôt initial dune demande de réparation et son règlement. Tous ces obstacles font que lon assiste à une déclaration des maladies professionnelles auprès des régimes de réparation qui est inférieure à la réalité.
Ainsi, selon une étude conduite par Selikoff au début des années quatre-vingt, moins dun tiers des travailleurs nord-américains du secteur de lisolation atteints de maladies dues à lamiante, dont lasbestose et le cancer, entraînant une incapacité de travail, avaient déposé une demande de réparation pour maladie professionnelle; un nombre encore inférieur à ce tiers, pourtant déjà faible, avait obtenu réparation (Selikoff, 1982). De même, une étude conduite par le ministère du Travail des Etats-Unis chez les travailleurs ayant déclaré une incapacité de travail consécutive à une maladie professionnelle a montré que moins de 5% de ces travailleurs avaient obtenu réparation (USDOL, 1980). Une étude plus récente réalisée dans lEtat de New York a montré que le nombre de sujets hospitalisés pour une pneumoconiose est bien supérieur au nombre de sujets indemnisés pour ce type de pathologie au cours de la même période (Markowitz et coll., 1989). Comme les systèmes de réparation enregistrent beaucoup plus facilement les problèmes de santé simples, du type dermatoses ou lésions musculo-squelettiques, et que les maladies complexes ont un long temps de latence, lutilisation de ces données conduit à des conclusions erronées sur lincidence et la distribution réelles des maladies professionnelles.
Les laboratoires danalyses médicales peuvent constituer une excellente source dinformations sur les concentrations excessives de certaines substances toxiques présentes dans les liquides biologiques. Leurs avantages sont la déclaration en temps opportun, les programmes de contrôle de qualité déjà en place et la conformité aux normes dépendant de lagrément de ces laboratoires par les autorités publiques. Aux Etats-Unis, un grand nombre dEtats exigent en effet que les laboratoires danalyses médicales communiquent à leur administration de la santé les résultats des tests à un certain nombre dagents toxiques professionnels dont le plomb, larsenic, le cadmium et le mercure, ainsi que les substances qui révèlent une exposition aux pesticides (Markowitz, 1992).
Aux Etats-Unis, lInstitut national de la sécurité et de la santé au travail (National Institute for Occupational Safety and Health (NIOSH)) a commencé à collecter, en 1992, les résultats des tests de plombémie dans la population adulte au titre du programme de surveillance et dépidémiologie de la toxicité du plomb dans le sang (Chowdhury, Fowler et Mycroft, 1994). Vers la fin de lannée 1993, vingt Etats, représentant 60% de la population des Etats-Unis, ont communiqué au NIOSH des taux élevés de plombémie et dix autres Etats ont mis au point un système de collecte et de déclaration des résultats des tests de plombémie. En 1993, 11 240 adultes présentaient une plombémie supérieure ou égale à 25 µg/dl de sang dans les vingt Etats susmentionnés. La grande majorité des sujets qui avaient des niveaux élevés de saturnisme (plus de 90%) étaient exposés au plomb sur leur lieu de travail. Le niveau de plombémie de plus dun quart de ces sujets (3 199) était supérieur ou égal à 40 µg/dl, seuil à partir duquel lOSHA exige que des mesures soient prises pour protéger les travailleurs contre une exposition au plomb.
La déclaration de niveaux élevés dagents toxiques à ladministration de la santé de chaque Etat peut déboucher sur une enquête de santé publique. Des entretiens confidentiels sont alors conduits avec les sujets affectés pour pouvoir identifier en temps opportun les lieux de travail où lexposition a eu lieu, le classement des cas par catégories selon la profession et la branche, lestimation du nombre dautres travailleurs susceptibles dêtre exposés au plomb sur le lieu de travail, et pour garantir un suivi médical (Baser et Marion, 1990). Des visites sur le lieu de travail sont organisées, suivies de recommandations sur les mesures à prendre laissées à la discrétion des entreprises pour réduire la durée dexposition. Ces visites peuvent aussi amener à informer les autorités habilitées à faire appliquer la loi.
Cherchant à reprendre la stratégie utilisée avec succès pour la surveillance et la prévention des maladies infectieuses, un nombre croissant dEtats, aux Etats-Unis, demandent aux médecins de déclarer une ou plusieurs maladies professionnelles (Freund et coll., 1989). Depuis 1988, 32 Etats exigent la déclaration des maladies professionnelles: il est à noter cependant que, dans 10 de ces Etats, une seule maladie professionnelle, en loccurrence le plus souvent les intoxications par le plomb ou par les pesticides, est soumise à déclaration. Dans dautres Etats, comme lAlaska et le Maryland, toutes les maladies professionnelles doivent être déclarées. Dans la plupart des Etats, ces déclarations ont pour seule fin de comptabiliser le nombre de sujets atteints de maladie. La déclaration dun cas de maladie professionnelle conduit à des activités de suivi, telle linspection du lieu de travail, mais dans un tiers seulement des Etats exigeant la déclaration des maladies (Muldoon et coll., 1987).
Bien quelle fasse depuis peu lobjet dun intérêt croissant, il est communément admis que la déclaration des maladies professionnelles par les médecins aux autorités compétentes des Etats reste très au-dessous de la réalité (Pollack et Keimig, 1987; Wegman et Froines, 1985). Même en Californie, où un système de déclaration par les médecins praticiens existe depuis un certain nombre dannées (cest dans cet Etat qua été établie la première déclaration de maladie professionnelle et daccident du travail par un médecin) et où presque 50 000 maladies professionnelles ont fait lobjet dune déclaration en 1988, le respect de cette obligation de déclaration par les médecins est jugé insuffisant (BLS, 1989).
Lémergence du concept dun «relais sentinelle», selon une initiative menée par le NIOSH, le Système de déclaration des événements sentinelles en matière de risques professionnels (Sentinel Event Notification System for Occupational Risks (SENSOR)) est une innovation prometteuse pour la surveillance de la santé au travail aux Etats-Unis. Un relais sentinelle est un établissement, un médecin ou tout autre prestataire de soins susceptible dapporter, du fait de sa spécialité ou de sa situation géographique, les soins nécessaires aux travailleurs atteints daffections dorigine professionnelle. Etant donné que les relais sentinelles représentent un petit sous-groupe de lensemble des prestataires de soins, on peut penser que les services de santé sont en mesure de mettre en place un système efficace de déclaration des maladies professionnelles en réalisant des interventions médico-sociales de proximité, en proposant des formations et en fournissant en temps utile des informations en retour à ces relais. Dans un récent rapport communiqué par trois Etats participant au programme SENSOR, les cas dasthme professionnel déclarés par les médecins ont brusquement augmenté après la mise sur pied, par le département de la santé de chaque Etat, de programmes concertés dinterventions médico-sociales et de formation destinés à identifier et à recruter des relais sentinelles (Matte et coll., 1990).
Létablissement de centres de soins spécialisés en médecine du travail, indépendants du lieu de travail et spécialisés dans le diagnostic et le traitement des maladies professionnelles, constitue une nouvelle ressource en voie de développement pour la surveillance de la santé au travail. Il existe actuellement des dizaines détablissements de ce type aux Etats-Unis. Ces centres peuvent contribuer à optimiser la surveillance de la santé au travail (Welch, 1989). Premièrement, ils peuvent jouer un rôle primordial dans la reconnaissance des affections sentinelles dorigine professionnelle, étant donné quils représentent une source de compétences exceptionnelle et bien organisée en médecine du travail clinique. Deuxièmement, ils peuvent servir de laboratoires pour lélaboration et le perfectionnement des définitions des cas de maladies professionnelles. Troisièmement, ils peuvent faire office détablissements médicaux de première orientation pour le diagnostic et lévaluation des travailleurs employés sur un lieu de travail où un cas initial de maladie professionnelle a été constaté.
Aux Etats-Unis, les centres de soins spécialisés en médecine du travail se sont regroupés en association nationale (Association of Occupational and Environmental Clinics) afin de se faire mieux connaître de la population et de collaborer à des études cliniques et à des travaux de recherche (Welch, 1989). Dans certains Etats, tel celui de New York, un réseau de centres de soins a été mis en place sur lensemble du territoire par le département de la santé de cet Etat. Il bénéficie dun financement stable grâce à une surtaxe sur les primes versées aux régimes de réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles (Markowitz et coll., 1989). Les centres de soins de lEtat de New York ont collaboré à lélaboration de systèmes dinformation, de protocoles cliniques et dactions de formation professionnelle. Ils commencent actuellement à produire des données substantielles sur le nombre de cas de maladies professionnelles dans lEtat.
Les certificats de décès sont des instruments potentiellement très utiles pour la surveillance des maladies professionnelles dans un grand nombre de pays. La plupart tiennent des registres détat civil et, qui plus est, comme ils y consignent le plus souvent les causes de la mort selon les critères de la Classification internationale des maladies, ces données sont uniformes et comparables. En outre, de nombreuses autorités administratives ajoutent, sur le certificat de décès, des informations relatives à la profession et à la branche dactivité du défunt. Une des limites à lemploi de ces certificats pour la surveillance des maladies professionnelles tient au fait quils nétablissent pas de liens entre les expositions professionnelles et les causes spécifiques du décès.
Lutilisation des données de mortalité pour la surveillance des maladies professionnelles convient plus précisément aux maladies dont lunique étiologie est professionnelle. Les pneumoconioses et un type de cancer, le mésothéliome de la plèvre, figurent parmi ces maladies. Le tableau 32.3 indique le nombre de décès attribués à ces diagnostics en tant que cause principale ou en tant quune des diverses causes de décès indiquées sur le certificat aux Etats-Unis. La cause principale du décès est considérée comme celle qui a provoqué la mort, alors que lénumération de causes multiples précise toutes les conditions ayant concouru à la mort dune manière jugée importante.
Code CIM-9 |
Cause du décès |
Nombres de décès |
|
|
|
Cause principale |
Causes multiples |
500 |
Pneumoconiose |
693 |
1 990 |
501 |
Asbestose |
269 |
948 |
502 |
Silicose |
153 |
308 |
503-505 |
Autres pneumoconioses |
122 |
450 |
|
Sous-total |
1 237 |
3 696 |
163,0, 163,1, et 163,9 |
Mésothéliome malin de la plèvre |
452 |
553 |
|
Total |
1 689 |
4 249 |
Source: United States National Center for Health Statistics.
En 1991, sur les 1 237 décès par maladies pulmonaires liées à linhalation de poussières en tant que cause principale, 693 décès chez les mineurs de charbon étaient dus à la silicose et 269 à lasbestose. Pour ce qui concerne le mésothéliome malin, 452 décès par mésothéliome de la plèvre ont été recensés. Il est impossible dindiquer le nombre de décès par mésothéliome du péritoine, également causé par lexposition professionnelle à lamiante, parce que la Classification internationale des maladies ne donne pas de code spécifique pour ce type de mésothéliome malin.
Le tableau 32.3 indique également le nombre de décès dus aux pneumoconioses et au mésothéliome de la plèvre en 1990 aux Etats-Unis quand ces maladies constituent lune des causes du décès indiquées sur le certificat. Le nombre total de décès où les pneumoconioses apparaissent comme lune des causes diverses est élevé, car celles-ci cxistent souvent avec dautres maladies pulmonaires chroniques.
Le fait que des pneumoconioses échappent au diagnostic et ne figurent donc pas comme cause de décès sur les certificats constitue un problème important. Létude la plus complète de cette sous-estimation a été conduite chez les travailleurs spécialistes de lisolation par Selikoff et ses collègues aux Etats-Unis et au Canada (Selikoff, Hammond et Seidman, 1979; Selikoff et Seidman, 1991). Entre 1977 et 1986, 123 décès de travailleurs de cette branche attribués à lamiante ont été dénombrés daprès les certificats de décès. Or, quand les chercheurs ont examiné les dossiers médicaux, les radiographies thoraciques et les examens anatomo-pathologiques tissulaires dont ils disposaient, ils ont estimé que 259 décès étaient attribuables à lamiante chez ces travailleurs au cours de la période étudiée. Plus de la moitié des décès par pneumoconiose étaient, par conséquent, passés inaperçus dans ce groupe bien connu pour avoir été massivement exposé à lamiante. Malheureusement, il nexiste pas assez dautres études sur cette tendance à ignorer les pneumoconioses dans les certificats de décès pour quil soit possible de corriger de manière fiable les statistiques de mortalité.
Les décès attribués à des causes non spécifiquement liées aux expositions professionnelles ont également été utilisés dans la surveillance des maladies professionnelles quand la profession ou la branche dactivité étaient précisées sur le certificat de décès. Lanalyse de ces données, dans une zone géographique précise et au cours dun intervalle de temps déterminé, peut permettre dobtenir des taux et des ratios de maladie par cause dans différentes professions et branches dactivité. Le rôle des facteurs non professionnels dans les décès examinés ne peut pas être défini de cette façon. Cependant, les différences relevées dans les taux de maladies selon les professions et les branches dactivité suggèrent que les facteurs professionnels peuvent être importants et incitent à de nouvelles études plus approfondies. La possibilité détudier des professions qui sont généralement dispersées sur un grand nombre de lieux de travail (les cuisiniers ou les employés des teintureries, par exemple), lutilisation de données recueillies régulièrement, un échantillon de grande taille, des coûts relativement faibles et des résultats tangibles en matière de santé, tels sont les autres avantages de cette approche (Baker, Melius et Millar, 1988; Dubrow et coll., 1987; Melius, Sestito et Seligman, 1989).
Plusieurs études sur la mortalité professionnelle ont été publiées au cours des dernières décennies au Canada (Gallagher et coll., 1989), aux Etats-Unis (Guralnick, 1962, 1963a; 1963b) et au Royaume-Uni (Registrar General, 1986). Ces dernières années, Milham a utilisé cette approche pour étudier la distribution professionnelle de tous les hommes décédés entre 1950 et 1979 dans lEtat de Washington aux Etats-Unis. Il a comparé le pourcentage de tous les décès liés à une cause spécifique dans un groupe professionnel donné au pourcentage correspondant pour lensemble des professions et a obtenu ainsi des taux de mortalité relatifs (Milham, 1983). Exemple des résultats de cette approche, Milham a noté que 10 des 11 professions associées à une exposition probable aux champs électriques et magnétiques ont montré une augmentation du taux relatif de mortalité par la leucémie (Milham, 1982). Il sagit là dune des premières études du rapport entre lexposition professionnelle à un rayonnement électromagnétique et le cancer. Cette étude a été suivie de nombreuses autres qui ont corroboré les premiers résultats (Pearce et coll., 1985; McDowell, 1983; Linet, Malker et McLaughlin, 1988).
Suite à un effort de collaboration entre le NIOSH, lInstitut national du cancer (National Cancer Institute) et le Centre national des statistiques de santé (National Center for Health Statistics) au cours des années quatre-vingt, les schémas de mortalité par profession et par branche dactivité conduits dans 24 Etats des Etats-Unis entre 1984 et 1988 ont été analysés et publiés (Robinson et coll., 1995). Ces études, portant sur un total de 1,7 million de décès, ont confirmé lexistence de plusieurs relations entre lexposition et la pathologie et ont mis à jour de nouvelles associations entre certaines professions et des causes de décès bien précises. Les auteurs soulignent que les études sur la mortalité professionnelle peuvent servir à ouvrir de nouvelles pistes pour les recherches, à évaluer dautres résultats et à trouver des possibilités daméliorer la santé.
Plus récemment, Figgs et ses collègues de lInstitut national du cancer ont utilisé la base de données relative à la mortalité professionnelle des 24 Etats susmentionnés pour étudier les associations entre profession et lymphomes non hodgkiniens (Figgs, Dosemeci et Blair, 1995). Une analyse cas-témoins portant sur environ 24 000 décès par lymphomes non hodgkiniens survenus entre 1984 et 1989 a confirmé un risque élevé dapparition de cette pathologie chez les agriculteurs, les mécaniciens, les soudeurs, les dépanneurs, les conducteurs de machines et un certain nombre de professions chez les cols blancs.
Les diagnostics portés sur des patients hospitalisés constituent une excellente source de données pour la surveillance des maladies professionnelles. Des études récemment conduites dans plusieurs Etats des Etats-Unis montrent que les rapports de sortie de lhôpital peuvent se révéler plus fiables que les déclarations adressées aux régimes de réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles et que les données statistiques démographiques, lorsquil sagit de diagnostiquer des maladies propres à certains milieux professionnels, telles les pneumoconioses (Markowitz et coll., 1989; Rosenman, 1988). Ainsi, dans lEtat de New York, vers le milieu des années quatre-vingt, on dénombrait en moyenne tous les ans 1 049 hospitalisations pour pneumoconiose, alors que lon ne recensait chaque année que 193 demandes de réparation et 95 décès dus à cette pathologie (Markowitz et coll., 1989).
Outre le dénombrement plus précis des patients atteints de certaines maladies professionnelles graves, les données des rapports de sortie de lhôpital peuvent être analysées utilement pour mettre en évidence et modifier les conditions de travail à lorigine de ces maladies. Cest ainsi que Rosenman a mené une enquête sur les lieux de travail du New Jersey où les personnes hospitalisées pour silicose avaient travaillé dans le passé. Il a découvert que, dans la majorité de ces établissements, on navait jamais prélevé déchantillons dair pour contrôler le taux de silice, que lOSHA navait jamais procédé à des inspections et quil nexistait aucun programme de dépistage médical de la silicose (Rosenman, 1988).
Les rapports de sortie de lhôpital présentent plusieurs avantages pour la surveillance des maladies professionnelles: disponibilité, faible coût, sensibilité relative aux maladies graves et assez grande fiabilité. Labsence dinformations concernant la profession et la branche dactivité, ainsi quune fiabilité incertaine du contrôle de qualité en constituent les défauts majeurs (Melius, Sestito et Seligman, 1989; Rosenman, 1988). De plus, seuls les sujets atteints dune maladie suffisamment grave pour justifier une hospitalisation seront inclus dans la base de données. Ces sujets ne sont donc pas représentatifs du large éventail de la pathologie associée aux maladies professionnelles. Cependant, il est probable que les données des rapports de sortie de lhôpital seront de plus en plus utilisées à lavenir pour la surveillance des maladies professionnelles.
Les enquêtes spéciales de surveillance conduites au niveau national ou régional constituent une source dinformations plus détaillées que celles qui peuvent être obtenues par lutilisation des registres de létat civil. Aux Etats-Unis, le Centre national des statistiques de santé (National Center for Health Statistics (NCHS)) effectue deux enquêtes nationales périodiques liées à la surveillance des maladies professionnelles: lenquête nationale sur la santé (National Health Interview Survey (NHIS)) et lenquête nationale sur la santé et la nutrition (National Health and Nutrition Examination Survey (NHANES)). Lenquête nationale sur la santé est effectuée auprès des ménages afin destimer la prévalence des états pathologiques à partir dun échantillon de ménages représentatif de la population civile non hospitalisée des Etats-Unis (USDHHS, 1980). Le fait quelle repose sur la déclaration des états pathologiques par les intéressés en limite fortement la portée. Les données relatives aux professions et aux branches dactivité ont été utilisées ces dernières décennies pour évaluer les taux dincapacité de travail dans ces deux catégories (USDHHS, 1980), estimer la prévalence du tabagisme dans chaque profession (Brackbill, Frazier et Shilling, 1988) et noter les idées que les travailleurs se font des risques auxquels ils sont exposés dans leur milieu de travail (Shilling et Brackbill, 1987).
Avec le concours du NIOSH, un supplément denquête sur la santé au travail (Occupational Health Supplement (NHIS-OHS)) a été inclus en 1988 afin dobtenir des estimations fondées sur des échantillons de population, relatives à la prévalence de certaines affections susceptibles davoir une composante professionnelle (USDHHS, 1993). Environ 50 000 ménages ont été interrogés en 1988, dont 27 408 sujets alors en activité professionnelle. Les accidents du travail, les affections cutanées, les pathologies dues à une hypersollicitation, lirritation de la gorge, du nez et des yeux, le déficit auditif et les lombalgies figurent parmi les états pathologiques à caractère professionnel étudiés par le NHIS-OHS.
Lors de la première analyse complète du NHIS-OHS, Tanaka et ses collègues du NIOSH ont estimé que la prévalence nationale du syndrome du canal carpien dorigine professionnelle en 1988 était de 356 000 cas (Tanaka et coll., 1995). Sur les quelque 675 000 sujets souffrant de douleurs persistantes à la main pour lesquelles le diagnostic clinique du syndrome du canal carpien a été confirmé, plus de 50% ont rapporté que les personnes quils avaient consultées avaient déclaré que leur affection du poignet était due à leur activité professionnelle. Cette estimation ne comprenait pas les personnes en arrêt de travail au cours des douze mois précédant lenquête et susceptibles de lavoir été en raison dun syndrome du canal carpien dorigine professionnelle.
Contrairement au NHIS, le NHANES évalue directement la santé dun échantillon aléatoire de 30 000 à 40 000 individus aux Etats-Unis au moyen dexamens cliniques et de bilans biologiques qui sajoutent à la collecte des données par questionnaire. Le NHANES a été effectué à deux reprises dans les années soixante-dix et, plus récemment, en 1988. Le NHANES II, conduit vers la fin des années soixante-dix, na recueilli que très peu dinformations sur les indicateurs dexposition au plomb et à certains pesticides. Lancé en 1988, le NHANES III a collecté des données supplémentaires sur les expositions et les maladies professionnelles, tout particulièrement pour ce qui concerne les affections respiratoires et neurologiques à caractère professionnel (USDHHS, 1994).
Les systèmes de déclaration et de surveillance des maladies professionnelles se sont considérablement perfectionnés depuis le milieu des années quatre-vingt. La déclaration des maladies est mieux adaptée à celles qui sont uniquement ou presque uniquement de nature professionnelle, telles que les pneumoconioses et les mésothéliomes malins. La reconnaissance et la déclaration dautres maladies professionnelles dépendent de la capacité dassocier les expositions professionnelles aux états pathologiques. Beaucoup de sources dinformation permettent de surveiller les maladies professionnelles, mais elles ont toutes dimportants défauts en matière de qualité, de globalité et de précision. Labsence dintérêt médical pour la prévention, la formation insuffisante des praticiens à la médecine du travail et les conflits potentiels entre les employeurs et les travailleurs au sujet de la reconnaissance des maladies professionnelles constituent dimportants obstacles à loptimisation de la collecte dinformations sur la question. Malgré ces facteurs, il est probable que la surveillance et la déclaration des maladies professionnelles continueront à se développer à lavenir.
La surveillance des risques est lévaluation de la distribution et des tendances à long terme des taux dexposition aux risques de maladies professionnelles et daccidents du travail (Wegman, 1992). En santé publique, la surveillance des risques définit les méthodes de travail ou les sujets exposés à des niveaux très élevés de risques spécifiques dans certaines branches dactivité et catégories de professions. Etant donné que la surveillance des risques nest pas directement orientée vers les événements pathologiques, son influence sur les interventions en santé publique requiert en général létablissement préalable dune relation évidente entre exposition et affection. La surveillance est alors justifiée par lhypothèse selon laquelle la réduction des expositions conduit à une régression des maladies. Lutilisation judicieuse des données relatives à la surveillance des risques permet dintervenir en temps opportun et, donc, de prévenir les maladies professionnelles. Il nest plus nécessaire dattendre les signes manifestes de la maladie, voire le décès, pour prendre des mesures destinées à protéger les travailleurs: cest là son plus grand avantage.
La surveillance des risques présente au moins cinq autres avantages qui complètent ceux de la surveillance des maladies. Premièrement, la reconnaissance des situations de risque est généralement beaucoup plus aisée que celle des cas pathologiques professionnels, tout particulièrement pour des maladies comme le cancer qui présentent de longues périodes de latence. Deuxièmement, se focaliser sur les risques (plutôt que sur les maladies) attire lattention sur les expositions qui doivent finalement être supprimées. Par exemple, la surveillance du cancer du poumon pourrait se concentrer sur les taux dexposition chez les travailleurs de lamiante. Cependant, un pourcentage assez important de cancers du poumon dans cette population pourrait être lié au tabagisme, soit indépendamment, soit en interaction avec lexposition à lamiante. En conséquence, il faudrait étudier un grand nombre de ces travailleurs pour déceler un petit nombre de cancers associés à lamiante. Par ailleurs, la surveillance de lexposition à lamiante pourrait fournir des informations concernant les niveaux et les types dexposition (professions, processus industriels ou branches dactivité) sur les lieux de travail où le contrôle de lexposition est le plus faible. Dès lors, même sans dénombrer exactement les cas de cancer du poumon, il pourrait être opportun de sefforcer de réduire ou de supprimer lexposition.
Troisièmement, étant donné que toutes les expositions ne sont pas pathogènes, les situations de risque sont beaucoup plus fréquentes que les cas pathologiques: il est ainsi beaucoup plus facile dobserver un changement ou une évolution caractéristique dans le temps que de surveiller les maladies, doù lintérêt de mieux utiliser les événements sentinelles. Un risque sentinelle peut simplement être lexistence dune exposition (par exemple, au béryllium), révélée par une évaluation directe sur le lieu de travail; une exposition excessive mise en évidence par la surveillance de marqueurs biologiques (des niveaux élevés de plomb dans le sang), ou la déclaration dun accident (déversement dun produit chimique).
Le quatrième avantage de la surveillance des risques réside dans le fait que les données recueillies à cet effet ne portent pas atteinte à la vie privée. La confidentialité des dossiers médicaux nest absolument pas compromise, et le danger de donner à quelquun une étiquette de malade est ainsi évité. Il sagit dun problème très important en milieu de travail où lemploi dun individu peut être menacé et une demande éventuelle de réparation influencer le diagnostic dun médecin.
Enfin, la surveillance des risques peut tirer parti de systèmes conçus à dautres fins. Les exemples actuels de collecte en continu dinformations relatives aux risques comprennent les registres dutilisation des substances toxiques ou des émissions de substances dangereuses, les registres de substances dangereuses spécifiques et les informations recueillies par les autorités en vue dune utilisation conforme aux normes établies. Lhygiéniste du travail est déjà familiarisé à bien des égards avec lutilisation des données relatives à la surveillance des expositions.
Les données concernant la surveillance des risques peuvent compléter la surveillance des maladies à des fins de santé publique et de recherche, pour établir ou confirmer une relation entre un risque et une maladie; les données recueillies dans ces deux domaines peuvent être utilisées pour déterminer la nécessité dintervenir. Tout comme les données du système de gestion intégrée de linformation de ladministration de la sécurité et de la santé au travail (Occupational Safety and Health Administration (OSHA)) aux Etats-Unis concernant les résultats du sondage de conformité à lhygiène du travail (voir ci-après), les données de la surveillance nationale remplissent des fonctions différentes de celles de la surveillance des risques dans les établissements, qui permettent une analyse et une focalisation beaucoup plus précises. Les données nationales peuvent se révéler très importantes quand il sagit de dépêcher des inspecteurs chargés de contrôler la conformité des activités ou de déterminer la distribution probable des risques qui généreront des besoins spécifiques de services médicaux dans une région. La surveillance des risques dans les établissements fournit toutefois les informations nécessaires à une étude précise des tendances à long terme. Lune delles se dessine parfois indépendamment des modifications apportées aux systèmes de contrôle, et bien plutôt en réponse à des changements dans les produits utilisés qui ne seraient pas mis en évidence dans des données régionales. Lapproche nationale et lapproche par établissements ont toutes deux leur utilité lorsquil sagit de choisir entre des études scientifiques planifiées ou des programmes de formation à lintention des directions et des travailleurs.
En associant les données de la surveillance des risques recueillies lors dinspections régulières effectuées dans un grand nombre de branches dactivité nayant apparemment aucun lien entre elles, il est parfois possible de distinguer des groupes de travailleurs ayant subi des expositions massives qui, autrement, auraient pu passer inaperçues. Par exemple, lanalyse des concentrations de plomb dans lair ambiant effectuée au cours des inspections de conformité de lOSHA entre 1979 et 1985 a identifié 52 branches dépassant le seuil dexposition admissible, et ce, dans plus dun tiers des inspections (Froines et coll., 1990). La métallurgie primaire et secondaire, la fabrication des piles, la fabrication des pigments et les fonderies de cuivre et de bronze figuraient parmi ces industries, connues depuis longtemps pour entraîner des niveaux élevés dexposition au plomb. Les expositions massives observées lors des inspections nont fait que révéler un contrôle assez médiocre des risques connus. Cependant, quelques-uns des lieux de travail sont relativement petits; cest le cas notamment des fonderies de plomb où il est peu vraisemblable que les directeurs et les travailleurs procèdent à des contrôles systématiques de lexposition. Ils risquent de ce fait de ne pas se rendre compte des concentrations importantes de plomb sur leurs propres lieux de travail. On pouvait sattendre à des expositions massives au plomb dans lair ambiant dans ces industries, mais on a noté également que plus dun tiers des usines participant à lenquête dépassaient le seuil dexposition admissible, en raison des travaux de peinture effectués dans des établissements très divers. Les peintres de charpentes métalliques constituent une population qui risque dêtre exposée au plomb, mais les entreprises qui les emploient pour peindre des machines ou des pièces de machines nont guère retenu lattention. Ces peintres peuvent être exposés à des substances dangereuses, mais ils ne sont pas souvent considérés comme des travailleurs du plomb, car ils sont employés par des entreprises qui nappartiennent pas directement à cette industrie. Dune certaine façon, cette enquête a démontré lexistence dun risque connu, mais négligé jusquau moment où il a été mis en évidence par lanalyse des données relatives à la surveillance.
Les programmes de surveillance des risques peuvent présenter des structures et des objectifs différents. Premièrement, ils offrent la possibilité de mettre laccent sur les interventions et contribuent à évaluer les programmes existants et à en planifier de nouveaux. Une utilisation judicieuse des informations relatives à la surveillance des risques peut conduire à la découverte précoce de la défaillance dun système et attirer lattention sur la nécessité de procéder à des corrections ou à renforcer les contrôles avant que des expositions massives ou des maladies apparaissent. Les données résultant de ces efforts peuvent également mettre en évidence le besoin de concevoir ou de réviser une réglementation portant sur un risque spécifique. Deuxièmement, les données relatives à la surveillance peuvent être associées aux projections des maladies à venir, afin de permettre la mise en conformité des installations et lorganisation des ressources médicales. Troisièmement, grâce à une méthodologie normalisée des expositions, les personnes qui travaillent à divers niveaux dans des organisations et administrations peuvent fournir des informations qui permettent de se concentrer sur un pays, une ville, une branche dactivité, une usine, voire un emploi. Cette souplesse permet de cibler, dadapter au besoin et de perfectionner la surveillance au fur et à mesure que de nouvelles informations apparaissent, que des problèmes se résolvent ou que de nouveaux se posent. Enfin, les données relatives à la surveillance des risques devraient montrer leur utilité dans la planification détudes épidémiologiques en indiquant les zones où ces études seraient les plus profitables.
Registre des substances cancérogènes Finlande. En 1979, la Finlande a imposé un système de déclaration nationale obligatoire de lutilisation de 50 agents cancérogènes dans lindustrie. Les tendances des sept premières années de surveillance ont fait lobjet dun rapport en 1988 (Alho, Kauppinen et Sundquist, 1988). Plus des deux tiers des personnes exposées ne travaillaient quavec trois types de substances cancérogènes: les chromates, le nickel et ses composés inorganiques, ou lamiante. La surveillance des risques a révélé que la plupart des expositions aux substances cancérogènes étaient dues à un nombre étonnamment faible de composés. Cette conclusion a permis de concentrer les efforts sur la réduction de lutilisation des substances toxiques et des expositions.
Létude des raisons de la «sortie» du système de certaines déclarations cest-à-dire la raison pour laquelle lutilisation dune substance cancérogène a été déclarée une première fois, mais ne figure plus dans les enquêtes ultérieures justifie également lutilisation des registres. Vingt pour cent des sorties représentaient des expositions qui avaient continué sans être déclarées. Cette tendance a conduit à une communication en retour et à une formation sur limportance de lexactitude des déclarations pour les branches intéressées. Trente-huit pour cent des sorties étaient dues à larrêt des expositions, dont plus de la moitié sexpliquaient par le remplacement de lagent cancérogène par un agent non cancérogène. Il est possible que les résultats des déclarations du système de surveillance aient encouragé cette substitution. La plupart des sorties restantes résultaient de lélimination des expositions grâce à des contrôles techniques, à des modifications des processus industriels ou à une réduction considérable de lutilisation des agents cancérogènes ou du temps dexposition. Cinq pour cent seulement des sorties reposaient sur lutilisation dun équipement de protection individuelle. Cet exemple montre comment un registre des expositions peut permettre de comprendre lutilisation des substances cancérogènes et de suivre son évolution dans le temps.
Enquête nationale sur les expositions professionnelles (National Occupational Exposure Survey (NOES)). Aux Etats-Unis, le NIOSH a conduit deux enquêtes nationales sur les expositions professionnelles (NOES) à dix ans dintervalle afin destimer le nombre de lieux de travail et de travailleurs potentiellement exposés à divers risques. Des cartes nationales et des cartes par Etat ont été dressées de façon à indiquer les éléments étudiés, tels que les caractéristiques des expositions des travailleurs et des lieux de travail au formaldéhyde (Frazier, Lalich et Pedersen, 1983). La superposition de ces cartes sur les cartes de mortalité due à des causes spécifiques (cancer des sinus, par exemple) permet, au moyen de simples études environnementales, démettre des hypothèses qui peuvent par la suite être examinées au cours dune enquête épidémiologique appropriée.
Les différences entre les deux enquêtes ont également été étudiées comme le pourcentage des installations industrielles comportant des expositions à des nuisances sonores continues sans quaucun moyen de prévention technique ne soit mis en uvre (Seta et Sundin, 1984). Lors dun examen des pourcentages par branche dactivité entre les deux études, une très faible différence a été constatée pour lensemble des entrepreneurs du bâtiment (de 92,5% à 88,4%), alors quune baisse saisissante a été notée pour les produits chimiques et les produits connexes (de 88,8% à 38,0%) et pour les divers services de réparation (de 81,1% à 21,2%). Ladoption de la loi sur la sécurité et la santé au travail, les conventions collectives, la prise en compte de la responsabilité civile et une sensibilisation accrue des travailleurs figurent parmi les explications possibles de cette évolution.
Campagne dinspection des expositions (OSHA). Aux Etats-Unis, lOSHA a procédé à linspection de lieux de travail afin détudier si la limitation des niveaux dexposition en place depuis plus de vingt ans était suffisante. La plupart du temps, les données ont été versées dans le système intégré dinformation de gestion (Integrated Management Information System (OSHA/IMIS)). Les tendances générales longues pour des cas choisis ont été examinées pour la période allant de 1979 à 1987. Dans le cas de lamiante, les moyens de prévention se sont révélés largement efficaces. En revanche, alors que le nombre déchantillons réunis pour lexposition à la silice et au plomb a décliné au cours de cet intervalle de temps, les deux substances ont continué à entraîner un nombre important dexpositions supérieures aux seuils admissibles. Les données ont également fait apparaître que, malgré la réduction du nombre des inspections, le pourcentage de celles qui signalaient un dépassement du seuil dexposition est, pour lessentiel, resté constant. LOSHA pourrait se fonder sur ces données pour concevoir des stratégies assurant le respect des normes pour la silice et le plomb.
La base de données sur linspection des lieux de travail a également servi à déterminer quantitativement les niveaux dexposition à la silice pour neuf branches et leurs différentes professions (Froines, Wegman et Dellenbaugh, 1986). Le seuil dexposition a été dépassé à des degrés divers: de 14% (fonderies daluminium) à 73% (usines de faïence et de céramique). Dans cette dernière branche, certains postes de travail précis ont été examinés, et le pourcentage des dépassements du seuil dexposition allait de 0% (manuvres) à 69% (travailleurs des ateliers de barbotine). Le degré de dépassement du seuil dexposition variait en fonction du poste. Chez les travailleurs des ateliers de barbotine, lexposition équivalait en moyenne au double du seuil admissible, alors que chez ceux qui étaient chargés de lengobage par pulvérisation, elle correspondait en moyenne à huit fois ce seuil. Cette base de données détaillée devrait se révéler utile aux employeurs et aux travailleurs des usines de faïence et de céramique, ainsi quaux autorités chargées de la réglementation des expositions professionnelles.
Nous avons défini lobjectif de la surveillance des risques, décrit ses avantages et certaines de ses limites, et présenté des exemples apportant des données utiles pour la santé publique. Cependant, la surveillance des risques ne devrait pas se substituer à la surveillance des maladies non infectieuses. En 1977, un groupe de travail du NIOSH a souligné linterdépendance relative des deux grands types de surveillance et déclaré en substance:
La surveillance des risques et celle des maladies ne sont pas dissociables. Si lon parvient à caractériser les risques associés à différentes branches dactivité ou professions, on pourra à condition demployer simultanément les informations médicales et toxicologiques relatives à ces risques indiquer les branches dactivité ou les catégories professionnelles devant faire lobjet dune surveillance épidémiologique (Craft et coll., 1977).
On estime que plus de 80% de la population mondiale vit dans les pays en développement en Afrique, en Amérique centrale et du Sud, en Asie et au Moyen-Orient. Les pays en développement sont souvent défavorisés sur le plan financier et beaucoup se caractérisent par une économie rurale et agricole. Loin dêtre homogènes, ils diffèrent sur bien des points par leurs aspirations, leurs systèmes politiques et leurs niveaux de croissance industrielle. Létat de santé de leurs populations est généralement moins bon que dans les pays développés, le taux de mortalité infantile plus élevé et lespérance de vie plus courte.
Plusieurs facteurs expliquent la nécessité dune surveillance de la sécurité et de la santé au travail dans les pays en développement. Premièrement, beaucoup dentre eux sindustrialisent rapidement. Sagissant de la taille des installations, la plupart des nouveaux sites industriels sont constitués de petites entreprises. En de telles circonstances, les moyens mis en uvre en matière de sécurité et de santé sont souvent très limités, voire inexistants. En outre, les pays en développement sont souvent les destinataires du transfert de technologie des pays industriels. Certaines des industries les plus dangereuses, qui ont des difficultés à opérer dans les pays disposant dune législation sur la santé au travail plus stricte et mieux appliquée, sont parfois délocalisées vers les pays en développement.
Deuxièmement, pour ce qui concerne la main-duvre, son niveau de formation dans les pays en développement est souvent bas et les travailleurs nont pas toujours été formés à des systèmes et pratiques de travail sûrs. En outre, le travail des enfants y est également souvent plus répandu. Ces groupes sont relativement plus vulnérables aux risques professionnels pour la santé. Outre ces considérations, létat de santé initial de ces travailleurs est généralement moins bon.
Ces facteurs montrent quà travers le monde, les travailleurs des pays en développement figurent parmi ceux qui sont les plus vulnérables et les plus exposés aux risques professionnels pour la santé.
Il est important dobtenir des informations quant aux effets du travail sur la santé pour prévenir les problèmes et donner la priorité au règlement de ceux-ci. Cependant, la plupart des données disponibles relatives à la morbidité proviennent des pays industriels et ne sont donc pas applicables aux pays en développement.
Dans ces pays, la nature des effets des risques professionnels sur la santé peut différer de celle des pays industriels. Les maladies professionnelles évidentes, telles que les intoxications par les produits chimiques et les pneumoconioses, qui sont associées à des niveaux élevés dexposition aux substances toxiques sur le lieu de travail, sont toujours présentes en grand nombre dans les premiers, alors que ces problèmes ont considérablement diminué dans les seconds.
A titre dexemple, les effets aigus des intoxications par les pesticides sur la santé et même les décès associés à des expositions massives sont une préoccupation plus immédiate dans les pays agricoles en développement que les effets morbides à long terme de faibles niveaux dexposition, qui constituent un problème plus important dans les pays industriels. En fait, le poids de la morbidité associée à lintoxication aiguë par les pesticides dans certains pays en développement, comme Sri Lanka, est même supérieur à celui des maladies traditionnellement responsables des problèmes de santé publique, tels que la diphtérie, la coqueluche et le tétanos.
Par conséquent, les pays en développement devraient instaurer une certaine surveillance de la morbidité professionnelle. Les informations recueillies serviraient à évaluer lampleur du problème, à établir un ordre de priorité dans les démarches destinées à venir à bout de ces difficultés, à allouer des ressources et à estimer par la suite leffet des interventions.
Malheureusement, ces informations relatives à la surveillance manquent souvent dans les pays en développement. Il conviendrait dadmettre que les programmes de surveillance des pays industriels ne sont pas adaptés aux pays en développement et que ces systèmes ne peuvent probablement pas y être apliqués tels quels à cause des difficultés susceptibles dentraver les activités de surveillance.
Bien quil existe un réel besoin de contrôle des problèmes de sécurité et de santé au travail dans les pays en développement, la mise en uvre efficace dun système de surveillance est souvent semée dembûches.
Les difficultés surviennent en raison dune maîtrise insuffisante du développement industriel, de labsence de services et de législation sur la santé au travail ou du développement inadéquat dune infrastructure nécessaire à cette législation et à ces services, dune formation insuffisante des professionnels de la santé au travail, de la faiblesse des services de santé et de la médiocrité des systèmes de collecte de linformation dans ce domaine. Très souvent, les informations relatives à la main-duvre et à la population en général font défaut ou sont insuffisantes.
Le fait que, dans un grand nombre de pays en développement, la santé au travail noccupe pas une place prioritaire dans les programmes de développement nationaux constitue un autre problème majeur.
La surveillance de la sécurité et de la santé au travail comprend des activités telles que la prévention des incidents graves sur le lieu de travail et des accidents du travail mortels ou non. Elle inclut également la surveillance des maladies professionnelles et du milieu de travail. Il est probablement plus aisé de recueillir des informations sur les accidents du travail mortels ou non, car il sagit dévénements assez faciles à définir et à constater. En revanche, la surveillance de létat de santé de la population active, comprenant les maladies professionnelles et le milieu de travail, se révèle plus difficile.
La suite de cet article est par conséquent principalement consacrée au problème de la surveillance des maladies professionnelles. Les principes et les approches en question peuvent sappliquer à la surveillance des accidents du travail mortels ou non, qui constituent également des causes très importantes de morbidité et de mortalité chez les travailleurs dans les pays en développement.
La surveillance de la santé des travailleurs dans ces pays ne devrait pas se limiter aux maladies professionnelles, mais devrait englober également lensemble des maladies dont souffre la population active. En effet, dans certains pays en développement dAfrique ou dAsie, les principaux problèmes de santé ne sont pas de nature professionnelle, mais ils incluent dautres maladies comme les maladies infectieuses tuberculose ou maladies sexuellement transmissibles, par exemple. Les informations recueillies serviraient alors à planifier et à allouer des ressources destinées aux soins médicaux, afin daméliorer la santé de la population active.
Quels sont les types de surveillance adaptés aux pays en développement? En général, un système doté de mécanismes simples et faisant appel à la technologie disponible serait ce qui leur conviendrait le mieux. Il faudrait également tenir compte des types de branches dactivité et des risques professionnels les plus répandus dans le pays.
Pareil système peut tirer parti des ressources existantes comme les soins de santé primaires ou les services de santé liés à lenvironnement. Les activités de surveillance de la santé au travail peuvent ainsi sajouter aux responsabilités actuelles du personnel des soins de santé primaires, des inspecteurs de la santé publique et des spécialistes de lenvironnement.
Pour ce faire, le personnel des soins de santé primaires et de la santé publique doit tout dabord être formé pour être en mesure de reconnaître les maladies susceptibles dêtre liées au travail, voire pour effectuer de simples évaluations des lieux de travail insalubres et dangereux. Ce personnel devrait bien évidemment recevoir une formation suffisante et correcte.
Les données relatives aux conditions de travail et aux maladies associées aux activités professionnelles peuvent être recueillies pendant que ces personnes sacquittent de leurs fonctions courantes au sein de la collectivité. Les informations obtenues seraient alors transmises aux centres régionaux, puis à ladministration centrale chargée de contrôler les conditions de travail et la morbidité professionnelle et de prendre les mesures qui simposent.
Un registre des établissements industriels et des procédés industriels, par opposition à un registre des maladies, pourrait être créé et voué à la collecte des informations sur les méthodes de travail et les matières utilisées. Il devrait être mis à jour au fur et à mesure de lintroduction de nouvelles méthodes ou de nouvelles matières. Lorsque la législation nationale prévoit un tel enregistrement, il doit être fait de façon systématique.
Cependant, les petites entreprises négligent souvent de le faire. Des évaluations et des enquêtes toutes simples, menées sur le terrain, qui examineraient le type dentreprises et les conditions de travail, pourraient fournir les informations de base. Elles pourraient fort bien être confiées au personnel des services de santé publique et des soins de santé primaires.
Lorsquun tel registre existe, il convient den actualiser régulièrement les données. Cette mise à jour pourrait être obligatoire pour toutes les entreprises enregistrées ou, à défaut, elle devrait être exigée dans le cas de secteurs à risque élevé.
Une loi sur la déclaration de certaines maladies professionnelles pourrait être adoptée. Il conviendrait de mettre sur pied des séances dinformation et une formation avant lentrée en vigueur de la loi et de se demander dabord quelles sont les maladies qui devraient être déclarées et quels seraient les responsables de cette déclaration. Ainsi, dans un pays en développement comme Singapour, les médecins qui suspectent lune des maladies professionnelles figurant dans la liste du tableau 32.4 doivent en aviser le ministère du Travail. Une telle liste doit être adaptée aux différentes branches dactivité dun pays, révisée et mise à jour régulièrement. De plus, les personnes responsables de la déclaration devraient être formées pour reconnaître ces maladies, ou tout au moins soupçonner leur apparition.
Anémie toxique |
Intoxication par l’aniline |
Angiosarcome du foie |
Intoxication par le béryllium |
Asbestose |
Intoxication par le cadmium |
Asthme professionnel |
Intoxication par le manganèse |
Barotraumatisme |
Intoxication par le phosphore |
Byssinose |
Intoxication par le plomb |
Charbon |
Intoxication par le sulfure de carbone |
Dermatose professionnelle |
Syndrome de décompression |
Hépatite toxique |
Mésothéliome |
Intoxication arsenicale |
Silicose |
Intoxication chronique par le benzène |
Surdité provoquée par le bruit |
Intoxication mercurielle |
Ulcère chronique |
Des mesures permanentes de suivi et de mise en application doivent être prises pour assurer le succès de ces systèmes de déclaration. Une déclaration notoirement insuffisante en limiterait lutilité. A Singapour, par exemple, cest en 1985 que lasthme professionnel a pour la première fois été soumis à déclaration et a ouvert droit à réparation. Une clinique des maladies respiratoires professionnelles a également été créée. Malgré ces efforts, seuls 17 cas dasthme professionnel ont été reconnus. Ce chiffre contraste avec celui qui a été obtenu en Finlande, où 179 cas dasthme professionnel ont été déclarés pour la seule année 1984. Or, la population de la Finlande (5 millions dhabitants) nest que le double environ de celle de Singapour. Cette insuffisance flagrante de déclarations de lasthme professionnel est probablement due au fait quil est difficile à diagnostiquer, de nombreux médecins en connaissant mal létiologie et les signes cliniques. Par conséquent, malgré lobligation de déclaration, il est important de continuer à former les professionnels de la santé, les employeurs et les travailleurs.
Une fois le système de déclaration établi, une étude plus précise de la prévalence des maladies professionnelles peut être conduite. Par exemple, le nombre de déclarations de déficit auditif dû au bruit à Singapour a été multiplié par six après lintroduction dexamens médicaux réglementaires pour tous les travailleurs exposés au bruit. Par la suite, si les déclarations sont assez complètes et précises et si un élément commun à cette population peut être établi, il sera même possible dévaluer lincidence de laffection et son risque relatif.
Comme pour la plupart des systèmes de surveillance et de déclaration, le rôle principal de la déclaration est de notifier les cas répertoriés aux autorités. Des interventions sur les lieux de travail et des recherches complémentaires peuvent alors être nécessaires au suivi. Sinon, les efforts encourageant la déclaration seraient voués à léchec.
Bien souvent, dans les pays en développement, les informations provenant des hôpitaux ou des services de soins ambulatoires ne sont pas suffisamment utilisées pour la surveillance des pathologies professionnelles. Les hôpitaux et les services de soins ambulatoires peuvent, et devraient, être intégrés dans le système de déclaration pour certaines maladies, comme celles qui résultent daccidents graves et dintoxications professionnelles aiguës. Les données provenant de ces sources apporteraient également un aperçu des maladies banales chez les travailleurs et serviraient à planifier des activités destinées à améliorer la santé sur les lieux de travail.
En général, toutes ces données sont recueillies régulièrement et nécessitent peu de ressources supplémentaires pour les transmettre à ladministration de la sécurité et de la santé au travail dans un pays en développement.
Les dossiers de demandes de réparation établis par les établissements spécialisés ou les tribunaux pourraient constituer une autre source dinformation. Enfin, si les ressources le permettent, quelques établissements régionaux spécialisés dans la médecine du travail pourraient également être créés, dotés de professionnels de la santé au travail mieux qualifiés et chargés dexaminer tous les cas de maladies dont on soupçonne une étiologie professionnelle.
Les informations des registres de maladies existants devraient également être utilisées. Dans la plupart des grandes villes des pays en développement, il existe des registres des cancers. Bien que les antécédents professionnels obtenus à partir de ces registres ne soient pas toujours complets et précis, ils sont utiles pour surveiller des groupes professionnels importants. Les données provenant de cette source seront dautant plus intéressantes quelles pourront être comparées à celles de registres recensant les travailleurs exposés à des risques spécifiques.
Bien que cette technique soit séduisante et quelle ait été employée avec un certain succès dans quelques pays industriels, elle ne semble ni appropriée ni même envisageable à lheure actuelle pour les pays en développement qui ne disposent pas des infrastructures nécessaires. Ainsi, les registres des maladies et ceux des lieux de travail sont inexistants et, lorsquils existent, ils ne sont pas informatisés et, donc, difficiles à rapprocher dautres registres.
LOrganisation internationale du Travail (OIT), lOrganisation mondiale de la santé (OMS) et la Commission internationale de la santé au travail (CIST) peuvent contribuer, par leur expérience et leur compétence, à surmonter les difficultés auxquelles un pays peut se heurter sur le plan de la surveillance de la sécurité et de la santé au travail. En outre, ces organisations peuvent mettre sur pied des stages de formation à lintention des personnes chargées des soins primaires. Elles peuvent également favoriser un échange profitable de données entre pays dune même région où lon retrouve les mêmes branches dactivité et les mêmes problèmes de santé au travail.
Les services de sécurité et de santé au travail sont importants dans les pays en développement, dautant plus que lindustrialisation de léconomie y est rapide, la population active vulnérable et la prévention des risques professionnels médiocre.
Si lon veut élaborer et fournir des services de santé au travail dans ces pays, il convient dassurer une surveillance des pathologies professionnelles. Cette surveillance savère nécessaire pour justifier, élaborer et favoriser des lois et des services de santé au travail et évaluer leffet de telles mesures.
Les systèmes de surveillance mis en place dans les pays développés ne conviennent pas toujours aux pays en développement qui devraient élaborer les leurs en fonction de leurs activités industrielles et des risques qui y prédominent. Bien souvent, les pays en développement devraient opter pour des mécanismes de surveillance simples, faisant appel à des techniques adaptées et dun emploi facile.
Les systèmes de surveillance des accidents du travail et des maladies professionnelles sont indispensables pour gérer ces lésions et en réduire le nombre. Ils fournissent les données essentielles servant à définir les problèmes sur le lieu de travail, à mettre au point des stratégies pour y remédier et, donc, à organiser la prévention. Pour atteindre efficacement ces objectifs, il convient de mettre en place des systèmes de surveillance en mesure de saisir les caractéristiques des accidents du travail dans leurs moindres détails. Pour une efficacité maximale, ces systèmes devraient permettre dindiquer les lieux de travail les plus dangereux, les accidents entraînant les arrêts de travail les plus longs, voire le siège de la lésion le plus fréquent.
Nous décrirons ici la mise au point dun système complet de classification par le Bureau américain des statistiques du travail (Bureau of Labor Statistics (BLS)). Ce système a été élaboré pour répondre aux exigences dun grand nombre dutilisateurs: analystes politiques du gouvernement fédéral ou de celui des Etats, chercheurs dans le domaine de la sécurité et de la santé, employeurs, syndicats, professionnels de la sécurité, compagnies dassurance et autres instances chargées daméliorer la sécurité et la santé sur les lieux de travail.
Pendant un certain nombre dannées, le BLS a recueilli des informations sur les maladies professionnelles et les accidents du travail selon trois grands critères:
Bien quutile, ce premier système de classification était quelque peu limité et ne satisfaisait pas pleinement aux besoins décrits ci-dessus. En 1989, il a donc été mis à jour afin de répondre aux attentes des différents utilisateurs.
Un groupe de travail du BLS a été constitué en septembre 1989 en vue détablir un cahier des charges pour un système «décrivant avec précision la nature du problème touchant la sécurité et la santé au travail» (OSHA, 1970). Cette équipe a consulté des spécialistes venus des secteurs public et privé, afin de mettre au point un système de classification réaménagé et élargi.
Plusieurs critères déterminant les codes individuels ont été définis. Le système doit disposer dun classement hiérarchique des fichiers pour sadapter aux besoins des divers utilisateurs des données relatives aux maladies professionnelles et aux accidents du travail. Dans la mesure du possible, il devrait: être compatible avec la Classification internationale des maladies, neuvième révision, modification clinique (CIM-9-MC) de lOMS (1977); satisfaire aux exigences dautres institutions gouvernementales sintéressant à la sécurité et à la santé au travail; réagir aux différentes caractéristiques des cas mortels et non mortels.
Les premières ébauches de classification selon les caractéristiques des cas ont été présentées et diffusées pour observations en 1989, puis en 1990. Le système portait sur la nature de laccident ou de la maladie, le siège de la lésion, son étiologie, les caractéristiques de lévénement ou de lexposition et ses causes secondaires. Après réception et prise en compte des observations faites par le personnel du BLS, dorganismes des Etats, de lAdministration de la sécurité et de la santé au travail (Occupational Safety and Health Administration (OSHA)), de lAdministration de la législation du travail (Employment Standards Administration) et de lInstitut national de la sécurité et de la santé au travail (National Institute for Occupational Safety and Health (NIOSH)), le système était prêt pour un test sur site.
Quatre Etats ont effectué une étude pilote des structures servant à regrouper les données relatives aux accidents et aux maladies non mortels, ainsi que de lapplication opérationnelle pour le recensement des accidents du travail mortels. Les résultats de létude ont été analysés, et des modifications ont été apportées en automne 1991.
La version finale du système de classification, qui date de 1992, comprend cinq classifications des caractéristiques des cas, une classification des professions et une classification des branches dactivité. On utilise le Manuel de classification type des branches dactivité pour coder celles-ci (OMB, 1987), et la Liste alphabétique des professions du Bureau du recensement pour coder les professions (Bureau of the Census, 1992). Le Système de classification des accidents du travail et des maladies professionnelles du BLS (1992) est employé pour coder les cinq caractéristiques suivantes:
Outre les codes numériques qui représentent les conditions ou les circonstances particulières, chaque classification comporte des outils pour aider à reconnaître et à choisir le code approprié, dont des définitions, des critères de sélection, des paragraphes descriptifs, des listes alphabétiques et des règles dédition. Les critères de sélection proposent des orientations pour choisir uniformément, sil y a lieu, le code voulu. Les paragraphes descriptifs fournissent des informations supplémentaires sur les codes, comme ce qui y est inclus ou ce qui en est exclu. Par exemple, le code pour «il» comprend le globe oculaire, le cristallin, la rétine et les cils. Les listes alphabétiques peuvent être employées pour trouver rapidement le code numérique dun descripteur bien précis, comme un terme médical ou une machine spécialisée. Enfin, les règles dédition sont des outils de contrôle de qualité qui peuvent servir à déterminer quelles sont les combinaisons de codes incorrectes avant le choix final.
La classification nature de laccident ou de la maladie présente la principale caractéristique physique de laccident ou de la maladie du travailleur. Ce code constitue la base de toutes les autres classifications de cas. Une fois que la nature de laccident ou de la maladie a été précisée, les quatre autres classifications représentent les circonstances associées à ce cas particulier. La structure de la classification nature de laccident ou de la maladie contient sept sections:
Avant dadopter définitivement cette classification, deux autres systèmes ont été évalués. La norme Z16.2 de lInstitut national de normalisation (American National Standards Institute (ANSI)), (ANSI, 1963) a été mise au point pour la prévention des accidents, mais ne contient pas suffisamment de catégories de maladies pour quun grand nombre dorganismes puissent sen servir pour leurs travaux.
La CIM-9-MC, conçue pour le classement des informations relatives à la mortalité et à la morbidité et utilisée par bon nombre de médecins, fournit les codes détaillés requis pour chaque maladie. Cependant, les connaissances techniques et lapprentissage nécessaires aux utilisateurs et aux analystes en limitent considérablement lutilisation.
La classification finale est un hybride qui combine la méthode dapplication et les critères de sélection de la Z16.2 de lANSI avec lorganisation par section de la CIM-9-MC. A quelques exceptions près, les sections de la structure du BLS sont exactement conformes à celles de la CIM-9-MC. Par exemple, la section du BLS consacrée aux maladies infectieuses et parasitaires correspond exactement au chapitre 1, maladies infectieuses et parasitaires, de la CIM-9-MC.
La première section de la classification «nature de la maladie ou de laccident» selon le BLS répertorie les accidents et les traumatismes, les effets des agents externes et les intoxications, et correspond au chapitre 17 de la CIM-9-MC. Les affections énumérées dans cette section sont généralement la conséquence dun incident, dun événement ou dune exposition unique, et comprennent certaines lésions telles que fractures, contusions, coupures et brûlures. Dans le milieu de travail, cette section accueille la grande majorité des cas déclarés.
Plusieurs situations ont demandé une attention toute particulière lors de létablissement des règles de codage de cette section. Lanalyse des cas daccidents mortels a mis en évidence les difficultés de codage de certains types daccidents. Par exemple, les fractures mortelles impliquent généralement quun organe vital, le cerveau ou la colonne vertébrale, a été atteint directement ou indirectement. Des instructions et des catégories de codes spécifiques ont été nécessaires pour classer les dommages mortels associés à ces types daccidents.
Les blessures par balle constituent une catégorie à part et font lobjet dinstructions de codage spéciales lorsquelles ont nécessité une amputation ou entraîné une paralysie. Conformément à lesprit du codage, les paralysies, les amputations et les lésions les plus graves ont priorité sur les dommages moins graves causés par une blessure par balle.
Les déclarations de lemployeur sur les circonstances de laccident ou de la maladie du travailleur ne décrivent pas toujours convenablement laccident ou la maladie. Si le document source indique uniquement que le salarié «sest fait mal au dos», il est impossible détablir sil sagit dun tour de rein, dune contracture, dun lumbago, dune dorsalgie ou de toute autre affection particulière. Pour pallier cette difficulté, des codes individuels tels que «sensibilité», «mal» et «douleur» ont été créés pour les descriptions non spécifiques de maladies ou daccidents.
Enfin, cette section comporte une série de codes pour classer les combinaisons de situations les plus fréquentes résultant du même incident. Ainsi, un travailleur peut présenter des blessures et des contusions à la suite dun seul et même incident.
Cinq des sections restantes de cette classification sont consacrées à la définition des maladies et des anomalies dorigine professionnelle et indiquent les codes destinés aux affections spécifiques qui revêtent un intérêt capital pour les professionnels de la sécurité et de la santé. Au cours de ces dernières années, de plus en plus de maladies et danomalies ont été associées au milieu du travail alors quelles figuraient rarement dans les classifications précédentes. La nouvelle contient une liste notablement élargie de maladies et danomalies spécifiques, comme le syndrome du canal carpien, la légionellose, les tendinites et la tuberculose.
La classification siège de la lésion précise la partie du corps directement atteinte. En lassociant au code nature de laccident ou de la maladie, on obtient un tableau plus complet du dommage subi: amputation du doigt, cancer du poumon, fracture de la mâchoire. Cette structure comporte huit divisions:
Trois questions ont été soulevées au cours de la nouvelle formulation des options pour cette partie théoriquement claire et simple de la classification. La première faisait référence à lavantage de coder une localisation externe (bras, tronc, jambe) de la maladie ou de laccident plutôt quune localisation interne (cur, poumons, cerveau).
Les résultats de létude ont mis en évidence que coder un organe interne convenait parfaitement aux maladies et dysfonctionnements, mais se révélait extrêmement compliqué pour la plupart des traumatismes tels que les coupures ou les contusions. Le BLS a mis au point une méthode de codage pour les sièges externes de la plupart des traumatismes et une autre pour les sièges internes des maladies.
La deuxième portait sur la façon de traiter les maladies qui affectent simultanément plus dun système de lorganisme. Par exemple, lhypothermie, abaissement de la température corporelle du à lexposition au froid, peut affecter le système nerveux et le système endocrinien. Etant donné quil est difficile pour le personnel non médical de choisir loption appropriée, les recherches pourraient durer très longtemps sans donner de résultat concluant. Cest pourquoi le système du BLS a été conçu avec une seule entrée, systèmes et appareils, qui classe un ou plusieurs systèmes ou appareils de lorganisme.
La possibilité dajouter des détails pour désigner des combinaisons typiques de parties des membres supérieurs et des membres inférieurs constituait la troisième grande amélioration apportée par cette classification. Ces combinaisons, comme main et poignet, ont pu être acceptées par les documents sources.
La classification événements ou expositions décrit comment laccident ou la maladie sest produit. Les huit sections suivantes ont été établies pour décrire la circonstance primaire dune lésion ou dune exposition à une situation ou à une substance dangereuse:
Les incidents à lorigine daccidents sont fréquemment le résultat dune série dévénements. A titre dillustration, examinons ce qui se passe lorsque survient un accident sur la voie publique: une voiture heurte la glissière de sécurité, traverse le terre-plein central et percute un camion. Le conducteur souffre de lésions multiples dues aux chocs contre la carrosserie et aux éclats de verre. Si les micro-événements tels que le choc contre le pare-brise ou les éclats de verre étaient codés, le fait principal que la personne était impliquée dans un accident de la circulation pourrait en être occulté.
Parmi ces multiples exemples dévénements, le BLS a désigné plusieurs éventualités qui doivent être considérées comme des événements primaires et avoir la priorité sur dautres micro-événements associés à ceux-ci. Ces événements primaires comprenaient:
Un ordre de priorité a également été établi dans ces groupes, car ils se chevauchent fréquemment par exemple, un accident sur la voie publique peut saccompagner dun incendie. Cet ordre de priorité correspond à leur ordre dapparition sur la liste ci-dessus. La priorité absolue a été attribuée aux agressions et aux actes de violence. Les codes figurant dans cette division précisent généralement le type de violence, alors que larme est indiquée par le code «cause». Les accidents de transport figurent en deuxième position, suivis des incendies et des explosions.
Ces deux derniers événements, incendies et explosions, sont réunis en une seule division. Etant donné que les deux événements surviennent souvent simultanément, un ordre de priorité a dû être établi entre les deux. Conformément à la classification supplémentaire des causes externes CIM-9, les incendies ont eu la priorité sur les explosions (USPHS, 1989).
La sélection des codes pour linclusion dans cette classification a été influencée par lémergence des anomalies non provoquées par contact associées à lactivité et à lergonomie professionnelles. Ces cas impliquent généralement des lésions nerveuses, musculaires ou ligamentaires produites par des efforts, des mouvements répétitifs et même de simples mouvements: lorsque le dos se bloque quand le travailleur se penche pour ramasser un objet. Il est aujourdhui établi que le syndrome du canal carpien est lié à des mouvements répétés comme tourner une clé, taper à la machine, découper et même être préposé à une caisse enregistreuse. La section «efforts excessifs» comprend ces incidents sans contact ni choc.
La division exposition à des situations ou à des substances dangereuses distingue les différents modes dexposition aux substances dangereuses ou toxiques: voie respiratoire, cutanée, digestive ou parentérale. Une section distincte a été créée pour la transmission dun agent infectieux par une aiguille. Les autres incidents sans choc au cours desquels les travailleurs sont victimes délectrocution ou de mauvaises conditions environnementales, comme un froid extrême, figurent également dans cette division.
Le contact avec des objets et du matériel, ainsi que les chutes sont les divisions qui regroupent la plupart des événements à lorigine daccidents du travail.
La classification causes de laccident ou de la maladie désigne lobjet, la substance, le mouvement du corps ou lexposition qui a directement provoqué laccident ou la maladie. Si une brique tombe sur un travailleur et lui ouvre le crâne, la brique constitue la cause de laccident. Il existe un lien direct entre la cause et la nature de laccident ou de la maladie. Si un travailleur glisse sur une flaque dhuile, tombe et se casse le coude, la fracture sest produite en heurtant le sol, le sol est donc la cause de laccident. Cette classification contient dix divisions:
Les définitions générales et les concepts de codage de la nouvelle classification des causes du BLS ont été tirés du système Z16.2 de lANSI. Cependant, la tâche consistant à dresser une liste de codes plus exhaustive et hiérarchisée était décourageante au premier abord, étant donné que pratiquement tout objet ou substance en ce monde peut être la cause dun accident ou dune maladie. Non seulement toute chose peut constituer une cause, mais les pièces ou les éléments de chaque chose le peuvent également. Pour compliquer le tout, il fallait regrouper en dix divisions seulement la totalité des éléments susceptibles dêtre inclus dans les codes «causes».
Lexamen des données historiques sur les accidents du travail et les maladies professionnelles a révélé les imperfections ou les archaïsmes de la classification précédente. Les sections machines et outils devraient être élargies et mises à jour. Il nexistait aucun code pour les ordinateurs. La liste des outils électriques était devenue obsolète en raison de lévolution technique, et un grand nombre des articles figurant sur la liste des outils non électriques étaient alors pratiquement tous électriques: tournevis, marteaux, etc. Les utilisateurs avaient également manifesté le désir de voir la liste des produits chimiques sélargir et être mise à jour dans la nouvelle classification. Aux Etats-Unis, lOSHA a demandé plus de détails sous certaines rubriques, telles que plusieurs types déchafaudages, de chariots élévateurs et dengins de construction et de débardage.
Lorganisation des éléments à inclure dans des sous-divisions et des groupes distincts à lintérieur dune division a constitué laspect le plus difficile de lélaboration de la classification des causes. Autre difficulté, les codes des causes devaient sexclure lun lautre. Cependant, même avec des catégories bien définies, un grand nombre déléments pouvaient logiquement relever de deux, voire de plusieurs divisions. Par exemple, il était convenu que les machines et les véhicules devaient appartenir à des catégories différentes. Cependant, les réviseurs nétaient pas daccord sur la répartition de certains éléments tels que les paveuses ou les chariots élévateurs: étaient-ils des machines ou des véhicules?
Une autre controverse est apparue sur la façon de grouper les machines dans la division «machines». Les choix étaient multiples: associer les machines à un procédé ou à une branche dactivité (par exemple, machines agricoles ou de jardinage), les grouper suivant leur fonction (machines à imprimer, appareils de chauffage et de refroidissement) ou suivant le type dobjet fabriqué (machines à travailler le bois ou le métal). Une solution unique nétant pas applicable à tous les types de machines, le BLS a trouvé un compromis: la liste tient compte de la branche dactivité pour certains groupes (machines agricoles, engins de construction et de débardage), de la fonction générale pour dautres (engins de manutention, machines de bureau) et, enfin, de la matière ouvrée pour les derniers (travail du métal, travail du bois). En cas de chevauchement comme celui dune machine pour le travail du bois utilisée dans la construction , la nomenclature définit la catégorie à laquelle elle appartient, afin que les codes sexcluent lun lautre.
Des codes spéciaux ont été ajoutés pour saisir les données relatives aux accidents et aux maladies survenant dans le secteur des soins de santé, qui est apparu comme lun des plus gros employeurs aux Etats-Unis et qui a de graves problèmes de sécurité et de santé. Par exemple, de nombreux organismes gouver-nementaux participants recommandent linclusion dun code pour les patients et pour les employés des établissements de soins, étant donné que le personnel infirmier et les aides-soignants peuvent se blesser en soulevant, en déplaçant ou en soignant leurs patients.
Le BLS et dautres utilisateurs de données ont admis que la classification causes des accidents du travail et des maladies professionnelles détermine lobjet qui a induit laccident ou la maladie, mais quelle néglige parfois des agents importants qui y contribuent. Dans le système précédent, par exemple, si un travailleur était blessé par un morceau de bois qui avait sauté parce que sa scie était grippée, le bois était la cause de son accident; le fait quune scie électrique était impliquée était occulté. Si un travailleur était brûlé dans un incendie, la flamme était considérée comme la cause de laccident sans que lon puisse désigner la cause de lincendie.
Pour suppléer à cette perte potentielle dinformations, le BLS a établi la notion de cause secondaire de laccident ou de la maladie qui «indique lobjet, la substance ou la personne qui est la cause de laccident ou de la maladie ou qui a contribué à lévénement ou à lexposition». Selon les critères de sélection spécifiques de ce code, laccent est mis sur la désignation des machines, outils, matériels ou autres substances productrices dénergie (telles que les liquides inflammables) qui ne figurent pas dans la classification. Dans le premier exemple donné ci-dessus, la scie électrique constituerait la cause secondaire puisquelle a éjecté un morceau de bois. Dans le deuxième exemple, la substance qui sétait enflammée (graisse, essence, etc.) correspondrait à la cause secondaire.
Etablir un système de classification complet ne consiste pas seulement à sassurer que des informations précises concernant les accidents du travail et les maladies professionnelles soient saisies et rendues disponibles. Il faut encore que le personnel responsable comprenne comment appliquer le système de codage de manière correcte, uniforme et conforme au modèle adopté.
La première étape en matière dassurance qualité a été de donner une solide formation à ceux qui seraient chargés dindiquer les codes de la classification. Des stages de niveau débutant, intermédiaire et avancé ont été prévus pour les aider à appliquer de manière uniforme les techniques de codage. Un petit groupe de formateurs a été chargé dorganiser ces stages pour le personnel intéressé sur tout le territoire des Etats-Unis.
Des contrôles électroniques dédition ont été conçus pour assister le personnel dans la révision, la vérification et la validation aux fins des estimations caractéristiques et démographiques des cas. Les possibilités de combinaisons ont été précisées, et un système automatique chargé de déceler les erreurs parmi ces combinaisons a été mis en place. Il dispose de plus de 550 groupes de recoupements qui vérifient que les données reçues satisfont aux critères de qualité. Par exemple, un cas identifié comme un syndrome du canal carpien affectant le genou serait tenu pour une erreur. Ce système automatique reconnaît également les codes non valides, cest-à-dire ceux qui nexistent pas dans la classification.
Il est évident que ces contrôles ne sont pas suffisamment stricts pour repérer toutes les données suspectes qui doivent être soumises à des tests de vraisemblance. Par exemple, daprès les mêmes données concernant le siège de la lésion qui ont été recueillies sur plusieurs années, presque 25% des cas ont cité le dos comme la zone affectée. Le personnel chargé de la révision dispose ainsi dune référence pour la validation des données. Un examen global des tableaux croisés donne également un aperçu de la qualité de la mise en uvre de la classification. Enfin, les événements rares, comme la tuberculose professionnelle, devraient être validés. Un élément important dun système de validation complet pourrait être de reprendre contact avec lemployeur pour sassurer de lexactitude du document dorigine, même si cela demande des ressources supplémentaires.
Une sélection dexemples de chacun des quatre systèmes de classification et de codage des maladies et des accidents figure au tableau 32.5; elle illustre la multiplicité des détails et, par conséquent, la richesse du système final. La puissance du système dans son ensemble est démontrée au tableau 32.6, qui présente un grand nombre de caractéristiques données pour un seul type daccident, les chutes. Outre le nombre total de chutes, les données sont ensuite subdivisées en chutes de plain-pied, chutes avec dénivellation et sauts à un niveau inférieur. Par exemple, on peut constater que les travailleurs âgés de 25 à 34 ans, les conducteurs de machines, les ouvriers de production et les manuvres, les travailleurs des industries manufacturières et les travailleurs étant au service de leur employeur depuis moins de cinq ans étaient les plus exposés aux chutes (données non présentées). Laccident était le plus souvent associé au travail au sol, et la lésion qui en résultait correspondait généralement à un lumbago ou à une déchirure musculaire donnant lieu à un arrêt de travail de plus dun mois.
Code de la nature de l’accident ou de la maladie Exemples |
|
0* Affections et blessures traumatiques |
|
08* |
Affections et blessures traumatiques multiples |
080 |
Affections et blessures traumatiques multiples, non précisées |
081 |
Coupures, écorchures, contusions |
082 |
Entorses et contusions |
083 |
Fractures et brûlures |
084 |
Fractures et autres lésions |
085 |
Brûlures et autres lésions |
086 |
Lésions cérébrales et lésions internes |
089 |
Autres combinaisons d’affections et de lésions traumatiques, n.c.a. |
Code de l’événement ou de l’exposition Exemples |
|
1* Chutes |
|
11* |
Chute avec dénivellation |
113 |
Chute d’une échelle |
114 |
Chute d’une pile ou d’un tas de matériaux |
115* |
Chute d’un toit |
1150 |
Chute d’un toit, non précisée |
1151 |
Chute à travers une ouverture dans le toit |
1152 |
Chute à travers le toit |
1153 |
Chute à travers une verrière |
1154 |
Chute du bord du toit |
1159 |
Chute d’un toit, n.c.a. |
116 |
Chute d’un échafaudage, d’une plate-forme |
117 |
Chute d’une poutre de construction ou de toute autre charpente métallique |
118 |
Chute d’un véhicule immobilisé |
119 |
Chute avec dénivellation, n.c.a. |
Code de l’agent matériel en relation avec l’accident ou la maladie Exemples |
|
7* Outils, instruments et équipement |
|
72* |
Outils électriques |
722* |
Outils tranchants, électriques |
7220 |
Outils tranchants, électriques, non précisés |
7221 |
Tronçonneuses, électriques |
7222 |
Ciseaux, électriques |
7223 |
Couteaux, électriques |
7224 |
Scies, électriques, à l’exception des tronçonneuses |
7229 |
Outils tranchants, électriques, n.c.a. |
723* |
Outils de frappe et de clouage, électriques |
7230 |
Outils de frappe, électriques, non précisés |
7231 |
Marteaux, électriques |
7232 |
Marteaux-piqueurs, électriques |
7233 |
Machines à découper, électriques |
Code du siège de la lésion Exemples |
|
2* Tronc |
|
23* |
Dos, y compris colonne vertébrale et moelle épinière |
230 |
Dos, y compris colonne vertébrale et moelle épinière, non précisé |
231 |
Région lombaire |
232 |
Région thoracique |
233 |
Région sacrée |
234 |
Région coccygienne |
238 |
Régions multiples |
239 |
Dos, y compris colonne vertébrale et moelle épinière, n.c.a. |
* = division, grand groupe, ou titre du groupe; n.c.a. = non classé ailleurs.
Caractéristique |
Tous les événements |
Toutes les chutes |
Chutes avec dénivellation |
Saut à un niveau inférieur |
Chutes de plain-pied |
|||||
|
Nombre |
% |
Nombre |
% |
Nombre |
% |
Nombre |
% |
Nombre |
% |
Total |
2 252 591 |
100,0 |
370 112 |
100,0 |
111 266 |
100,0 |
9 433 |
100,0 |
244 115 |
100,0 |
Sexe: |
||||||||||
Hommes |
1 490 418 |
66,2 |
219 199 |
59,2 |
84 868 |
76,3 |
8 697 |
92,2 |
121 903 |
49,9 |
Femmes |
735 570 |
32,7 |
148 041 |
40,0 |
25 700 |
23,1 |
645 |
6,8 |
120 156 |
49,2 |
Age: |
||||||||||
De 14 à 15 ans |
889 |
0,0 |
246 |
0,1 |
118 |
0,1 |
|
|
84 |
0,0 |
De 16 à 19 ans |
95 791 |
4,3 |
15 908 |
4,3 |
3 170 |
2,8 |
260 |
2,8 |
12 253 |
5,0 |
De 20 à 24 ans |
319 708 |
14,2 |
43 543 |
11,8 |
12 840 |
11,5 |
1 380 |
14,6 |
28 763 |
11,8 |
De 25 à 34 ans |
724 355 |
32,2 |
104 244 |
28,2 |
34 191 |
30,7 |
3 641 |
38,6 |
64 374 |
26,4 |
De 35 à 44 ans |
566 429 |
25,1 |
87 516 |
23,6 |
27 880 |
25,1 |
2 361 |
25,0 |
56 042 |
23,0 |
De 45 à 54 ans |
323 503 |
14,4 |
64 214 |
17,3 |
18 665 |
16,8 |
1 191 |
12,6 |
43 729 |
17,9 |
De 55 à 64 ans |
148 249 |
6,6 |
37 792 |
10,2 |
9 886 |
8,9 |
470 |
5,0 |
27 034 |
11,1 |
65 ans et plus |
21 604 |
1,0 |
8 062 |
2,2 |
1 511 |
1,4 |
24 |
0,3 |
6 457 |
2,6 |
Profession: |
||||||||||
Direction et professions intellectuelles et scientifiques |
123 596 |
5,5 |
26 391 |
7,1 |
6 364 |
5,7 |
269 |
2,9 |
19 338 |
7,9 |
Techniciens commerciaux et administratifs |
344 402 |
15,3 |
67 253 |
18,2 |
16 485 |
14,8 |
853 |
9,0 |
49 227 |
20,2 |
Services |
414 135 |
18,4 |
85 004 |
23,0 |
13 512 |
12,1 |
574 |
6,1 |
70 121 |
28,7 |
Agriculture, foresterie et pêche |
59 050 |
2,6 |
9 979 |
2,7 |
4 197 |
3,8 |
356 |
3,8 |
5 245 |
2,1 |
Mécaniciens de précision, artisans et réparateurs |
366 112 |
16,3 |
57 254 |
15,5 |
27 805 |
25,0 |
1 887 |
20,0 |
26 577 |
10,9 |
Conducteurs de machines, ouvriers de production et manuvres |
925 515 |
41,1 |
122 005 |
33,0 |
42 074 |
37,8 |
5 431 |
57,6 |
72 286 |
29,6 |
Nature de la maladie, de la lésion: |
||||||||||
Entorses, foulures |
959 163 |
42,6 |
133 538 |
36,1 |
38 636 |
34,7 |
5 558 |
58,9 |
87 152 |
35,7 |
Fractures |
136 478 |
6,1 |
55 335 |
15,0 |
21 052 |
18,9 |
1 247 |
13,2 |
32 425 |
13,3 |
Coupures, lacérations, déchirures |
202 464 |
9,0 |
10 431 |
2,8 |
2 350 |
2,1 |
111 |
1,2 |
7 774 |
3,2 |
Ecchymoses, contusions |
211 179 |
9,4 |
66 627 |
18,0 |
17 173 |
15,4 |
705 |
7,5 |
48 062 |
19,7 |
Lésions multiples |
73 181 |
3,2 |
32 281 |
8,7 |
11 313 |
10,2 |
372 |
3,9 |
20 295 |
8,3 |
Avec fractures |
13 379 |
0,6 |
4 893 |
1,3 |
2 554 |
2,3 |
26 |
0,3 |
2 250 |
0,9 |
Avec entorses |
26 969 |
1,2 |
15 991 |
4,3 |
4 463 |
4,0 |
116 |
1,2 |
11 309 |
4,6 |
Douleurs |
127 555 |
5,7 |
20 855 |
5,6 |
5 614 |
5,0 |
529 |
5,6 |
14 442 |
5,9 |
Lombalgies |
58 385 |
2,6 |
8 421 |
2,3 |
2 587 |
2,3 |
214 |
2,3 |
5 520 |
2,3 |
Autres |
411 799 |
18,3 |
50 604 |
13,7 |
15 012 |
13,5 |
897 |
9,5 |
33 655 |
13,8 |
Siège de la lésion: |
||||||||||
Tête |
155 504 |
6,9 |
13 880 |
3,8 |
2 994 |
2,7 |
61 |
0,6 |
10 705 |
4,4 |
il |
88 329 |
3,9 |
314 |
0,1 |
50 |
0,0 |
11 |
0,1 |
237 |
0,1 |
Cou |
40 704 |
1,8 |
3 205 |
0,9 |
1 097 |
1,0 |
81 |
0,9 |
1 996 |
0,8 |
Tronc |
869 447 |
38,6 |
118 369 |
32,0 |
33 984 |
30,5 |
1 921 |
20,4 |
80 796 |
33,1 |
Dos |
615 010 |
27,3 |
72 290 |
19,5 |
20 325 |
18,3 |
1 523 |
16,1 |
49 461 |
20,3 |
Epaule |
105 881 |
4,7 |
16 186 |
4,4 |
4 700 |
4,2 |
89 |
0,9 |
11 154 |
4,6 |
Cause de la lésion: |
||||||||||
Produits chimiques |
43 411 |
1,9 |
22 |
0,0 |
|
|
|
|
16 |
0,0 |
Conteneurs |
330 285 |
14,7 |
7 133 |
1,9 |
994 |
0,9 |
224 |
2,4 |
5 763 |
2,4 |
Meubles, installations |
88 813 |
3,9 |
7 338 |
2,0 |
881 |
0,8 |
104 |
1,1 |
6 229 |
2,6 |
Machines |
154 083 |
6,8 |
4 981 |
1,3 |
729 |
0,7 |
128 |
14 |
4 035 |
1,7 |
Pièces et matériaux |
249 077 |
11,1 |
6 185 |
1,7 |
1 016 |
0,9 |
255 |
2,7 |
4 793 |
2,0 |
Posture ou geste du travailleur |
331 994 |
14,7 |
|
|
|
|
|
|
|
|
Sols |
340 159 |
15,1 |
318 176 |
86,0 |
98 207 |
88,3 |
7 705 |
81,7 |
208 765 |
85,5 |
Outils portatifs |
105 478 |
4,7 |
727 |
0,2 |
77 |
0,1 |
41 |
0,4 |
600 |
0,2 |
Véhicules |
157 360 |
7,0 |
9 789 |
2,6 |
3 049 |
2,7 |
553 |
5,9 |
6 084 |
2,5 |
Patients |
99 390 |
4,4 |
177 |
0,0 |
43 |
0,0 |
8 |
0,1 |
90 |
0,0 |
Autres |
83 813 |
3,7 |
15 584 |
4,2 |
6 263 |
5,6 |
414 |
4,4 |
7 741 |
3,2 |
Branche d’activité: |
||||||||||
Agriculture, foresterie et pêche2 |
44 826 |
2,0 |
8 096 |
2,2 |
3 636 |
3,3 |
301 |
3,2 |
3 985 |
1,6 |
Exploitations minières3 |
21 090 |
0,9 |
3 763 |
1,0 |
1 757 |
1,6 |
102 |
1,1 |
1 874 |
0,8 |
Construction |
204 769 |
9,1 |
41 787 |
11,3 |
23 748 |
21,3 |
1 821 |
19,3 |
15 464 |
6,3 |
Industries manufacturières |
583 841 |
25,9 |
63 566 |
17,2 |
17 693 |
15,9 |
2 161 |
22,9 |
42 790 |
17,5 |
Transports et services publics |
232 999 |
10,3 |
38 452 |
10,4 |
14 095 |
12,7 |
1 797 |
19,0 |
21 757 |
8,9 |
Commerce de gros |
160 934 |
7,1 |
22 677 |
6,1 |
8 119 |
7,3 |
1 180 |
12,5 |
12 859 |
5,3 |
Commerce de détail |
408 590 |
18,1 |
78 800 |
21,3 |
15 945 |
14,3 |
1 052 |
11,1 |
60 906 |
24,9 |
Finance, assurances et immobilier |
60 159 |
2,7 |
14 769 |
4,0 |
5 353 |
4,8 |
112 |
1,2 |
9 167 |
3,8 |
Services |
535 386 |
23,8 |
98 201 |
26,5 |
20 920 |
18,8 |
907 |
9,6 |
75 313 |
30,9 |
Nombre de jours d’arrêt de travail: |
||||||||||
1 jour |
366 054 |
16,3 |
48 550 |
13,1 |
12 450 |
11,2 |
1 136 |
12,0 |
34 319 |
14,1 |
2 jours |
291 760 |
13,0 |
42 912 |
11,6 |
11 934 |
10,7 |
1 153 |
12,2 |
29 197 |
12,0 |
3-5 jours |
467 001 |
20,7 |
72 156 |
19,5 |
20 167 |
18,1 |
1 770 |
18,8 |
49 329 |
20,2 |
6-10 jours |
301 941 |
13,4 |
45 375 |
12,3 |
13 240 |
11,9 |
1 267 |
13,4 |
30 171 |
12,4 |
11-20 jours |
256 319 |
11,4 |
44 228 |
11,9 |
13 182 |
11,8 |
1 072 |
11,4 |
29 411 |
12,0 |
21-30 jours |
142 301 |
6,3 |
25 884 |
7,0 |
8 557 |
7,7 |
654 |
6,9 |
16 359 |
6,7 |
31 jours au minimum |
427 215 |
19,0 |
91 008 |
24,6 |
31 737 |
28,5 |
2 381 |
25,2 |
55 329 |
22,7 |
Durée médiane des arrêts de travail: |
6 jours |
|
7 jours |
|
10 jours |
|
8 jours |
|
7 jours |
1 Y compris les jours d’arrêt de travail avec ou sans restriction de l’activité professionnelle. 2 A l’exclusion des exploitations agricoles de moins de 11 salariés. 3 Les données conformes aux définitions de l’OSHA concernant les travailleurs des mines de charbon et des mines métalliques et non métalliques et les employés des transports ferroviaires sont transmises au Bureau des statistiques du travail (Bureau of Labor Statistics (BLS)) par l’Administration de la sécurité et de la santé dans les mines (Mine Safety and Health Administration), le ministère du Travail, l’Administration fédérale des chemins de fer (Federal Railroad Administration) et le ministère des Transports. A l’exclusion des dirigeants indépendants d’exploitations minières.
Note: les chiffres ayant été arrondis et les données des réponses non classables ayant été exclues, les totaux peuvent ne pas être exacts. Les tirets indiquent que les données ne satisfont pas aux règles de publication. Les évaluations de l’enquête sur les accidents du travail et les maladies professionnelles se fondent sur un échantillon d’employeurs prélevé scientifiquement. L’échantillon utilisé était l’un des nombreux échantillons possibles, chacun pouvant produire des estimations différentes. L’erreur type relative est la mesure de la variation des évaluations de tous les échantillons possibles qui auraient pu être prélevés. Le pourcentage des erreurs type relatives des estimations susmentionnées va de moins de 1% à 58%.
Source: Bureau of Labor Statistics (BLS).
Il est évident que des données comme celles-ci peuvent considérablement influencer la mise au point de programmes de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles. Pourtant, elles nindiquent pas les professions ou les branches dactivité les plus dangereuses, étant donné que certaines professions à haut risque ne sont exercées que par un nombre restreint de travailleurs. La détermination des niveaux de risques associés à certaines professions et branches dactivité est expliquée dans larticle ci-après «Lanalyse des risques daccidents du travail et de maladies professionnelles non mortels».
Aux Etats-Unis, le Bureau des statistiques du travail (Bureau of Labor Statistics (BLS)) classe régulièrement les maladies professionnelles et les accidents du travail non mortels en fonction des caractéristiques des cas et des travailleurs, en utilisant les données de lenquête nationale sur les accidents du travail et les maladies professionnelles. Bien que ces totaux désignent les groupes de travailleurs victimes dun grand nombre daccidents du travail, ils ne mesurent pas le risque. Ainsi, un groupe particulier peut avoir été victime de très nombreux accidents du travail simplement en raison du nombre de travailleurs qui le composent, et non parce que les tâches exécutées sont spécialement dangereuses.
En vue dévaluer avec précision le risque réel, les données relatives aux accidents du travail doivent être rapportées à une mesure de lexposition au risque, telle que le nombre dheures de travail, indicateur de loffre de main-duvre qui peut être obtenu par dautres enquêtes. Le taux daccidents du travail non mortels pour un groupe de travailleurs peut être calculé en divisant le nombre des accidents enregistrés dans ce groupe par le nombre dheures de travail effectuées au cours de la même période. Le taux ainsi obtenu constitue le risque daccidents par heure de travail:
Une manière pratique de comparer le risque daccidents pour différents groupes de travailleurs est dévaluer le risque relatif:
Le groupe de référence peut être un groupe particulier de travailleurs, tel que la totalité des cadres et des ouvriers hautement qualifiés. Il peut également être constitué de tous les travailleurs. De toute façon, le risque relatif (RR) correspond au rapport utilisé communément dans les études épidémiologiques (Rothman, 1986). Il équivaut algébriquement au pourcentage de tous les accidents qui frappent le groupe particulier, divisé par le pourcentage des heures effectuées par ce groupe. Un RR supérieur à 1,0 signifie que les membres du groupe choisi ont un plus grand risque daccidents que ceux du groupe de référence; un RR inférieur à 1,0 signifie que les membres de ce groupe subissent en moyenne moins daccidents par heure.
Les tableaux 32.7 et 32.8 montrent comment les indices de risque relatif pour différents groupes de travailleurs permettent de signaler ceux qui courent le risque le plus élevé daccidents du travail. Les données relatives aux accidents proviennent de lenquête sur les accidents du travail et les maladies professionnelles de 1993 (BLS, 1993b) et indiquent le nombre daccidents et de maladies qui saccompagnent dun arrêt de travail. Le calcul repose sur des estimations des heures de travail annuelles tirées des microfiches des enquêtes sur la population de 1993 effectuées par le Bureau du recensement des Etats-Unis (Bureau of the Census, 1993) à partir denquêtes sur les ménages.
Profession |
Pourcentage1 |
Risque relatif |
|
|
Cas d’accidents et de maladies |
Heures ouvrées |
|
Toutes les professions du secteur privé à l’exclusion de l’agriculture |
100,00 |
100,00 |
1,0 |
Direction et professions intellectuelles et scientifiques |
5,59 |
24,27 |
0,2 |
Directeurs, administrateurs et cadres |
2,48 |
13,64 |
0,2 |
Professions intellectuelles et scientifiques |
3,12 |
10,62 |
0,3 |
Techniciens, commerciaux et administratifs |
15,58 |
32,19 |
0,5 |
Techniciens et professions apparentées |
2,72 |
3,84 |
0,7 |
Commerciaux |
5,98 |
13,10 |
0,5 |
Administratifs, y compris le personnel de bureau |
6,87 |
15,24 |
0,5 |
Professions du secteur tertiaire2 |
18,73 |
11,22 |
1,7 |
Services de sécurité3 |
0,76 |
0,76 |
1,0 |
Emplois du secteur tertiaire, à l’exception des services de sécurité |
17,97 |
10,46 |
1,7 |
Agriculture, foresterie et pêche4 |
1,90 |
0,92 |
2,1 |
Mécaniciens de précision, artisans et réparateurs |
16,55 |
13,03 |
1,3 |
Mécaniciens et réparateurs |
6,30 |
4,54 |
1,4 |
Métiers de la construction |
6,00 |
4,05 |
1,5 |
Professions des industries extractives |
0,32 |
0,20 |
1,6 |
Mécaniciens de précision |
3,93 |
4,24 |
0,9 |
Opérateurs de machines, ouvriers de production et manuvres |
41,64 |
18,37 |
2,3 |
Opérateurs de machines, monteurs et contrôleurs |
15,32 |
8,62 |
1,8 |
Transports et déménagements |
9,90 |
5,16 |
1,9 |
Manutentionnaires, techniciens de surface, assistants et manuvres |
16,42 |
4,59 |
3,6 |
1 Pourcentage des accidents et des maladies, heures ouvrées et risque relatif d’accidents et de maladies professionnelles avec arrêt de travail, par profession, salariés du secteur privé âgés de 15 ans au minimum, à l’exclusion des professions agricoles, 1993.
2 A l’exclusion des employés de maison privés et des travailleurs des services de protection du secteur public.
3 A l’exclusion des travailleurs des services de protection du secteur public.
4 A l’exclusion des ouvriers des agro-industries.
Sources: Bureau of Labor Statistics (BLS): Survey of Occupational Injuries and Illnesses, 1991, 1993b; Bureau of the Census: Current Population Survey, January through December 1993, 1993.
Profession |
Tous |
Hommes |
Femmes |
Toutes les professions du secteur privé, à l’exclusion de l’agriculture |
1,0 |
0,6 |
1,5 |
Direction et professions intellectuelles et scientifiques |
0,2 |
0,1 |
0,3 |
Directeurs, administrateurs et cadres |
0,2 |
0,0 |
0,3 |
Professions intellectuelles et scientifiques |
0,2 |
0,1 |
0,3 |
Techniciens, commerciaux et administratifs |
0,8 |
0,3 |
1,1 |
Techniciens et professions apparentées |
0,6 |
0,3 |
0,8 |
Commerciaux |
0,3 |
0,1 |
0,6 |
Administratifs, y compris le personnel de bureau |
1,2 |
0,7 |
1,4 |
Professions du secteur tertiaire1 |
0,7 |
0,3 |
0,9 |
Services de sécurité2 |
0,1 |
0,1 |
0,4 |
Emplois du secteur tertiaire, à l’exception des services de sécurité |
0,7 |
0,4 |
0,9 |
Agriculture, foresterie et pêche3 |
0,8 |
0,6 |
1,8 |
Mécaniciens de précision, artisans et réparateurs |
1,0 |
0,7 |
4,2 |
Mécaniciens et réparateurs |
0,7 |
0,6 |
2,4 |
Métiers de la construction |
0,6 |
0,6 |
|
Professions des industries extractives |
0,1 |
0,1 |
|
Mécaniciens de précision |
1,8 |
1,0 |
4,6 |
Opérateurs, ouvriers de production et manuvres |
2,7 |
1,4 |
6,9 |
Opérateurs de machines, monteurs et contrôleurs |
4,1 |
2,3 |
7,3 |
Transports et déménagements |
0,5 |
0,5 |
1,6 |
Manutentionnaires, techniciens de surface, assistants et manuvres |
2,4 |
1,4 |
7,1 |
1 A l’exclusion des employés de maison privés et des travailleurs des services de protection du secteur public.
2 A l’exclusion des travailleurs des services de protection du secteur public.
3 A l’exclusion des ouvriers des agro-industries.
Note: les tirets indiquent que les données ne satisfont pas aux règles de publication.
Sources: calculs tirés de Survey of Occupational Injuries and Illnesses, 1991, Bureau of Labor Statistics (BLS), 1993b; Current Population Survey, January through December 1993, Bureau of the Census, 1993.
Le tableau 32.7 présente les données par profession concernant la part des accidents du travail, celle des heures ouvrées et leur rapport, qui correspond au RR pour les accidents et les maladies entraînant un arrêt de travail. Le groupe de référence est constitué exclusivement de travailleurs âgés de 15 ans au moins exerçant «toutes les professions du secteur privé à lexclusion de lagriculture» et correspond à 100%. A titre dexemple, le groupe «conducteurs de machines, ouvriers de production et manuvres» a subi 41,64% des accidents et des maladies, mais na effectué que 18,37% de toutes les heures ouvrées de la popula-tion de référence. Par conséquent, le RR chez les conducteurs de machines, ouvriers de production et manuvres est de 41,64/18,37 = 2,3. En dautres termes, les travailleurs de ce groupe professionnel présentent en moyenne un taux daccidents et de maladies 2,3 fois supérieur à celui de tous les travailleurs du secteur privé, à lexclusion de lagriculture. En outre, ils risquent 11 fois plus dêtre victimes dun accident grave que les dirigeants et les professions intellectuelles et scientifiques.
Les différents groupes professionnels peuvent être classés en fonction de leur degré de risque en comparant simplement leurs indices de RR. Le RR le plus élevé figurant dans le tableau 32.7 est associé aux manutentionnaires, techniciens de surface, assistants et manuvres, alors que les dirigeants et les professions intellectuelles et scientifiques constituent le groupe présentant le risque le plus faible (RR N = 0,2). On peut affiner linterprétation. Tandis que le tableau suggère que les travailleurs peu qualifiés occupent des professions présentant des risques daccidents et de maladies élevés, même parmi les professions manuelles, le taux daccidents et de maladies est plus élevé pour les conducteurs de machines, les ouvriers de production et les manuvres peu qualifiés que pour les mécaniciens de précision, les artisans et les réparateurs.
Les RR mentionnés ci-dessus se fondent sur la totalité des accidents et des maladies entraînant un arrêt de travail, ces données étant depuis longtemps disponibles et bien comprises. Grâce à la nouvelle classification de lenquête sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, les chercheurs peuvent maintenant examiner en détail des accidents et des maladies déterminés.
Par exemple, le tableau 32.8 indique le RR des mêmes groupes professionnels, mais en le limitant à une seule conséquence, «affections associées aux mouvements répétitifs» (code «événement» 23) entraînant un arrêt de travail, par profession et par sexe. Le syndrome du canal carpien, les tendinites et certaines lésions musculo-tendineuses ou articulaires font partie des affections dues aux mouvements répétitifs. Les opératrices de machines, les monteuses et les contrôleuses constituent clairement le groupe le plus gravement atteint par ce type daccident (RR = 7,3), suivi par le personnel féminin de manutention, de nettoyage et dentretien (RR = 7,1).
Le tableau montre des différences considérables entre les sexes en ce qui concerne le risque encouru lors de mouvements répétitifs. Dans lensemble, une femme court 2,5 fois plus de risque quun homme de perdre son emploi en raison dune affection associée aux mouvements répétitifs (2,5 = 1,5/0,6). Cependant, cette différence ne reflète pas seulement une disparité entre les professions des hommes et des femmes. Les femmes présentent un risque plus élevé que les hommes dans tous les grands groupes professionnels, comme aussi dans ceux plus restreints figurant au tableau, notamment dans la vente et le travail manuel. Les femmes courent six fois plus de risque que les hommes dêtre en arrêt de travail en raison de lésions dues aux mouvements répétitifs dans les professions suivantes: la vente, lindustrie de précision, lartisanat et la réparation.
Dans le système allemand de sécurité sociale, lassurance obligatoire contre les accidents couvre les conséquences des accidents sur le lieu de travail, des accidents de trajet et des maladies professionnelles. Cette assurance obligatoire comprend trois branches:
Les 35 associations professionnelles (BG) couvrent les diverses branches de lactivité économique en Allemagne. Elles sont responsables de 39 millions de salariés assurés dans 2,6 millions dentreprises. Toute personne en situation de travail, de service ou de formation est assurée, indépendamment de son âge, de son sexe et de son revenu. Lorganisation centrale est la Fédération des associations professionnelles (Hauptverband der Berufsgenossenschaften (HVBG)).
Aux termes de la loi, les BG sont tenues demployer tous les moyens appropriés afin de prévenir les accidents du travail et les maladies professionnelles, dapporter des soins durgence efficaces, dassurer la réadaptation sociale, professionnelle et médicale optimale, et de verser des indemnités aux victimes daccidents et de maladies, ainsi quaux survivants. Par conséquent, les BG se chargent à la fois de la prévention, de la réadaptation et de la réparation.
Les primes destinées à financer ces prestations sont exclusivement à la charge des employeurs. En 1993, tous les employeurs de lindustrie ont versé aux BG une moyenne de 1,44 DM par tranche de 100 DM de salaire, soit 1,44%. Les primes se sont élevées à 16 milliards de DM, dont 80% ont été consacrés à la réadaptation et aux pensions. Le reste a été utilisé principalement pour des programmes de prévention.
Lemployeur est responsable de la sécurité et de la santé du salarié sur le lieu de travail. Létendue légale de cette responsabilité est définie par lEtat dans des lois et des ordonnances, et dans les règlements relatifs à la protection du travail des BG industrielles, qui complètent et concrétisent la législation y relative pour chaque branche dindustrie. Le système de prévention des BG est remarquable par son orientation délibérément pratique, son adaptation constante aux besoins de lindustrie et au progrès technique, et lassistance efficace quil porte à lemployeur et au salarié.
Les tâches de prévention des BG, assurées principalement par leur service dinspection technique et leur service de médecine du travail, consistent notamment à:
La responsabilité de la mise en uvre de la protection du travail dans lindustrie incombe à lemployeur, qui est légalement obligé dengager du personnel suffisamment qualifié pour assurer cette protection. Il sagit de spécialistes de la sécurité au travail (responsables, techniciens et ingénieurs de la sécurité) et de médecins dentreprise. Dans les entreprises de plus de vingt salariés, un ou plusieurs délégués à la sécurité doivent être engagés. Létendue de la responsabilité de lentreprise pour ce qui concerne les spécialistes de la sécurité au travail et les médecins est établie par la convention collective, spécifique à la branche et à lindice de risque. Dans les entreprises qui ont engagé un spécialiste de la sécurité au travail ou un médecin dentreprise, lemployeur doit créer un comité de sécurité et dhygiène, composé dun représentant de lemployeur, de deux représentants des travailleurs, du médecin dentreprise, ainsi que de délégués et de spécialistes de la sécurité au travail. Le personnel chargé des premiers secours, dont la formation est dirigée par lassociation professionnelle, appartient également à lorganisation de la sécurité au travail de lentreprise.
La médecine du travail est dune importance toute particulière. Chaque salarié exposé à un type de risque particulier pour la santé sur le lieu de travail est examiné de façon systématique, et les résultats de lexamen sont évalués conformément aux directives établies. En 1993, environ 4 millions dexamens médicaux préventifs ont été effectués par des médecins dûment autorisés. Des problèmes de santé durables ont été constatés dans moins de 1% de ces examens.
Les salariés qui travaillent au contact de produits dangereux et cancérogènes ont également le droit de passer des examens médicaux, même lorsquils ont cessé dy être exposés. Les BG ont créé trois services chargés dexaminer ces salariés:
Ces trois services ont pris en charge environ 600 000 personnes en 1993. La collecte des données relatives aux examens contribue à améliorer les soins dispensés à chaque personne et à nourrir les recherches scientifiques visant à la détection précoce des cas de cancer.
Objectif. Lobjectif principal de la collecte des statistiques des accidents du travail est daméliorer la sécurité sur les lieux de travail en évaluant et en interprétant les données relatives aux accidents. Ces données sont compilées à partir des rapports sur les accidents du travail; 5 à 10% des accidents (soit environ 100 000 accidents) sont étudiés chaque année par les services dinspection technique des BG.
Obligation des employeurs en matière de déclaration. Chaque employeur est tenu de déclarer à sa BG dans les trois jours tout accident entraînant un arrêt de travail de trois jours ou provoquant le décès de lassuré («accident du travail soumis à déclaration obligatoire»). Cette obligation sapplique également aux accidents de trajet. Les accidents qui ne causent que des dommages matériels ou qui entraînent un arrêt de travail de moins de trois jours ne sont pas soumis à cette obligation. Pour ce qui concerne les accidents du travail soumis à déclaration, lemployeur doit remplir un formulaire de «déclaration daccident» (voir figure 32.1). La durée de larrêt de travail constitue le facteur déterminant la déclaration, quelle que soit la gravité de la lésion. Les accidents qui semblent sans gravité doivent être déclarés si la personne blessée se trouve dans lincapacité de travailler pendant plus de trois jours. Cette condition de trois jours permet de prendre en compte les demandes de réparation ultérieures. Ne pas remplir de déclaration daccident ou ne pas respecter les délais constitue une infraction au règlement qui peut être sanctionnée par la BG par une amende dun montant maximum de 5 000 DM.
Déclaration par le médecin traitant. Afin doptimiser la réadaptation médicale et de déterminer la durée de larrêt de travail, la victime dun accident suit le traitement prescrit par un spécialiste médical désigné à cette fin. Le médecin est rémunéré par la BG intéressée. Par conséquent, la BG reçoit également la déclaration daccident du travail établie par le médecin si lemployeur a négligé den remplir une (dans les délais). La BG peut alors demander à lemployeur de remplir une déclaration daccident du travail. Ce système de double déclaration (employeur et médecin) permet à la BG davoir connaissance de pratiquement tous les accidents du travail soumis à déclaration. Grâce aux informations fournies par la déclaration daccident et le rapport médical, la BG vérifie si, du point de vue légal, laccident relève de sa compétence. Se fondant sur le diagnostic médical, la BG peut, si besoin est, prendre les mesures nécessaires pour assurer le meilleur traitement possible à la victime.
Une description complète et exacte des circonstances de laccident est extrêmement importante pour la prévention. Elle permet au service dinspection technique de la BG danalyser les défauts des machines et des matériels qui appellent une intervention immédiate afin déviter de nouveaux accidents. En cas daccident du travail mortel ou grave, la réglementation exige que lemployeur avertisse immédiatement la BG. Ces événements sont aussitôt examinés par les spécialistes de la sécurité au travail de la BG.
Lors du calcul de la prime dassurance dune entreprise, la BG tient compte du nombre et du coût des accidents du travail qui y sont survenus. Un système de bonus/malus établi par la loi est utilisé dans ce calcul, et une partie de la prime dassurance de lentreprise est déterminée par le nombre daccidents qui sy sont produits. Il sensuit une réduction ou une augmentation de la prime dassurance, ce qui est un bon moyen dinciter les employeurs à veiller à la sécurité des lieux de travail.
Collaboration des délégués du personnel et des représentants de la sécurité. Toute déclaration daccident doit également être signée par le conseil dentreprise (Betriebsrat) et par les représentants de la sécurité (sil y en a). Cette règle a pour but dinformer le conseil dentreprise et les représentants de la sécurité de la situation globale de lentreprise en matière daccidents. Ils peuvent ainsi utilement exercer leurs droits de collaboration à la sécurité au travail.
Compilation des statistiques des accidents du travail. Sur la base des informations reçues par la BG relatives à un accident du travail (déclaration daccident et rapport médical), les faits sont convertis en codes statistiques. Le codage couvre notamment trois domaines:
Le codage est effectué par des spécialistes connaissant bien lorganisation des branches dactivité relevant des BG, au moyen dune liste de codes des accidents et des lésions qui comportent plus de 10 000 entrées. Afin que les statistiques soient de première qualité, les classifications sont régulièrement retravaillées, par exemple, pour les adapter au progrès technique. De plus, le personnel chargé du codage suit périodiquement des stages de perfectionnement, et les données font lobjet de tests formels et logiques de sensibilité.
Une des tâches importantes de ces statistiques est de décrire les circonstances de laccident sur le lieu de travail. Le tableau 32.9 montre les tendances relevées dans les accidents du travail soumis à déclaration, les nouveaux cas de pension et dinvalidité et les accidents mortels de 1981 à 1993. La colonne 3 («Nouveaux cas de pension») indique le nombre de nouvelles pensions versées chaque année par les BG à titre de réparation.
Année |
Accidents du travail |
||
|
Accidents soumis à déclaration |
Nouveaux cas de pension |
Décès |
1981 |
1 397 976 |
40 056 |
1 689 |
1982 |
1 228 317 |
39 478 |
1 492 |
1983 |
1 144 814 |
35 119 |
1 406 |
1984 |
1 153 321 |
34 749 |
1 319 |
1985 |
1 166 468 |
34 431 |
1 204 |
1986 |
1 212 064 |
33 737 |
1 069 |
1987 |
1 211 517 |
32 537 |
1 057 |
1988 |
1 234 634 |
32 256 |
1 130 |
1989 |
1 262 374 |
30 840 |
1 098 |
1990 |
1 331 395 |
30 142 |
1 086 |
1991 |
1 587 177 |
30 612 |
1 062 |
1992 |
1 622 732 |
32 932 |
1 310 |
1993 |
1 510 745 |
35 553 |
1 414 |
Source: Hauptverband der Berufsgenossenschaften (HVBG), Allemagne.
Pour estimer le risque moyen daccident pour un assuré, on divise le nombre daccidents du travail par le nombre dheures de travail effectuées, ce qui donne le taux daccident. Le taux par million dheures de travail est utilisé pour établir des comparaisons chronologiques et internationales. La figure 32.2 montre lévolution de ce taux entre 1981 et 1993.
Statistiques des accidents spécifiques à une branche dactivité. Outre la description des tendances générales, les statistiques des lieux de travail peuvent être ventilées par branche dactivité. On peut ainsi se demander: combien y-a-til eu daccidents du travail associés aux machines à meuler portables dans la métallurgie ces dernières années; comment et où ces accidents se sont-ils produits; quelles lésions ont-ils causé. Ces analyses peuvent être utiles à un grand nombre de personnes et dinstitutions, telles que les ministères, les responsables de la surveillance, les instituts de recherche, les universités, les entreprises et les spécialistes de la sécurité au travail (voir tableau 32.10).
Année |
Accidents soumis à déclaration |
Nouvelles pensions d’invalidité |
1984 |
9 709 |
79 |
1985 |
10 560 |
62 |
1986 |
11 505 |
76 |
1987 |
11 852 |
75 |
1988 |
12 436 |
79 |
1989 |
12 895 |
76 |
1990 |
12 971 |
78 |
1991 |
19 511 |
70 |
1992 |
17 180 |
54 |
1993 |
17 890 |
70 |
Source: Hauptverband der Berufsgenossenschaften (HVBG), Allemagne.
Le tableau 32.10 montre que les accidents du travail soumis à déclaration associés aux meuleuses portatives dans la métallurgie ont augmenté de manière continue du milieu des années quatre-vingt jusquen 1990. De 1990 à 1991, on a noté une augmentation considérable du nombre daccidents. Il sagit là dun biais résultant de lintroduction, au début de 1991, des chiffres tenant compte des nouvelles frontières de lAllemagne réunifiée (les chiffres des années précédentes ne portaient que sur la République fédérale dAllemagne).
Dautres données compilées à partir de déclarations daccident ont permis de constater que tous les accidents associés aux meuleuses portatives ne se produisent pas essentiellement dans la métallurgie. Ces appareils, qui sont bien évidemment souvent utilisés comme meules dangle pour couper des tuyaux, des barres de fer et autres objets, sont fréquemment employés sur les chantiers de construction. Par conséquent, presque un tiers des accidents surviennent dans la construction. Dans la métallurgie, les meuleuses portatives ont causé surtout des lésions de la tête et des mains. Les blessures à la tête les plus fréquentes affectent les yeux et les parties proches des yeux, qui sont atteints par des fragments de pièces brisées, des éclats et des étincelles. Lappareil portatif est équipé dune meule qui tourne à grande vitesse, et les blessures à la main surviennent quand la personne qui lutilise en perd le contrôle. Le nombre élevé de blessures oculaires montre quil est primordial dinsister dans les entreprises sur limportance et lobligation de porter des lunettes de protection lors du meulage des métaux.
Comparaison des taux daccidents à lintérieur dune branche dactivité et entre les branches dactivité. Bien quen 1993 on ait dénombré presque 18 000 accidents du travail associés aux meuleuses portatives dans la métallurgie, mais seulement 2 800 accidents du travail dus aux scies électriques portatives dans le travail du bois, on ne saurait en conclure que le risque associé à ces machines est plus élevé chez les ouvriers métallurgistes. Pour évaluer le risque que présente une branche dactivité spécifique, il faut mettre en relation le nombre daccidents avec une mesure de lexposition au danger, comme les heures ouvrées (voir «Lanalyse des risques daccidents du travail et de maladies professionnelles non mortels»). Cependant, on ne dispose pas toujours de ces informations. Le pourcentage des accidents graves dans le total des accidents soumis à déclaration fournit alors un taux de substitution. La comparaison des taux daccidents graves dus aux meuleuses portatives dans le travail des métaux et de ceux qui sont imputables aux scies circulaires portatives dans le travail du bois démontre que les secondes présentent un taux dix fois supérieur aux meuleuses portatives. Cest là une constatation importante lorsquil sagit détablir un ordre de priorité pour les mesures de sécurité au travail. Ce type danalyse comparative du risque constitue un élément important de la stratégie générale de prévention des accidents professionnels.
En Allemagne, une maladie professionnelle est définie par la loi comme étant une maladie dont lorigine peut être imputée à lactivité professionnelle de la personne atteinte. Il existe une liste officielle des maladies professionnelles. Par conséquent, la question de savoir si une affection est une maladie professionnelle constitue une question à la fois dordre médical et dordre juridique qui est renvoyée à la BG par le droit public. Si une maladie professionnelle est suspectée, il ne suffit pas de démontrer que le salarié souffre, par exemple, deczéma. Il faut sinformer sur les substances utilisées sur le lieu de travail et leurs dangers cutanés potentiels.
Compilation des statistiques des maladies professionnelles. Etant donné que les BG sont chargées dindemniser les travailleurs atteints de maladies professionnelles et doffrir des services de réadaptation et de prévention, elles font grand usage des statistiques tirées des déclarations de maladies professionnelles pour cibler les mesures de prévention dans les professions et les branches dactivité reconnues comme présentant des risques élevés et pour communiquer leurs conclusions à la population en général, à la communauté scientifique et aux autorités politiques.
A lappui de ces activités, les BG ont introduit, en 1975, un ensemble de statistiques sur les maladies professionnelles, avec des données sur chaque déclaration de maladie professionnelle et sur la décision finale la concernant, quelle soit acceptée ou rejetée, ainsi que les raisons de cette décision pour chaque cas. Cette base de données contient des informations anonymes sur:
Résultats des statistiques des maladies professionnelles. Une des fonctions importantes des statistiques des maladies professionnelles est de suivre lévolution dans le temps de la fréquence des maladies professionnelles. Le tableau 32.11 répertorie les déclarations de cas présumés de maladies professionnelles, le nombre total de cas reconnus, le versement de pensions et le nombre de cas mortels entre 1980 et 1993. Il est à noter que ces données ne sont pas faciles à interpréter, car les définitions et les critères diffèrent largement. En outre, au cours de cette période, le nombre de maladies professionnelles reconnues officiellement est passé de 55 à 64. Il faut également souligner quà partir de 1991, les chiffres correspondent à lAllemagne réunifiée, alors que les précédents ne portaient que sur la République fédérale dAllemagne.
Année |
Déclarations de cas présumés de maladies professionnelles |
Cas reconnus de maladies professionnelles |
Cas ayant ouvert droit à pension |
Décès dus aux maladies professionnelles |
1980 |
40 866 |
12 046 |
5 613 |
1 932 |
1981 |
38 303 |
12 187 |
5 460 |
1 788 |
1982 |
33 137 |
11 522 |
4 951 |
1 783 |
1983 |
30 716 |
9 934 |
4 229 |
1 557 |
1984 |
31 235 |
8 195 |
3 805 |
1 558 |
1985 |
32 844 |
6 869 |
3 439 |
1 299 |
1986 |
39 706 |
7 317 |
3 317 |
1 548 |
1987 |
42 625 |
7 275 |
3 321 |
1 455 |
1988 |
46 280 |
7 367 |
3 660 |
1 363 |
1989 |
48 975 |
9 051 |
3 941 |
1 281 |
1990 |
51 105 |
9 363 |
4 008 |
1 391 |
1991 |
61 156 |
10 479 |
4 570 |
1 317 |
1992 |
73 568 |
12 227 |
5 201 |
1 570 |
1993 |
92 058 |
17 833 |
5 668 |
2 040 |
Source: Hauptverband der Berufsgenossenschaften (HVBG), Allemagne.
Exemple: les maladies infectieuses. Le tableau 32.12 montre la diminution du nombre de cas reconnus de maladies infectieuses au cours de la période allant de 1980 à 1993. Une colonne est consacrée à lhépatite virale. On peut clairement constater une baisse considérable de la fréquence de cette maladie en Allemagne à partir du milieu des années quatre-vingt environ, période à partir de laquelle le personnel de santé exposé à ce risque a été vacciné à titre préventif. Par conséquent, les statistiques des maladies professionnelles peuvent servir non seulement à déceler des taux élevés de cas, mais aussi à illustrer les succès remportés par les mesures de protection. Les baisses des taux de maladies peuvent bien évidemment avoir dautres explications. Par exemple, la réduction du nombre de cas de silicose au cours des vingt dernières années résulte principalement des suppressions demplois dans lindustrie minière.
Année |
Total des cas reconnus |
Dont hépatite virale |
1980 |
1 173 |
857 |
1981 |
883 |
736 |
1982 |
786 |
663 |
1983 |
891 |
717 |
1984 |
678 |
519 |
1985 |
417 |
320 |
1986 |
376 |
281 |
1987 |
224 |
152 |
1988 |
319 |
173 |
1989 |
303 |
185 |
1990 |
269 |
126 |
1991 |
224 |
121 |
1992 |
282 |
128 |
1993 |
319 |
149 |
Source: Hauptverband der Berufsgenossenschaften (HVBG), Allemagne.
La HVBG, qui fédère toutes les BG, centralise les différentes statistiques, les analyse et publie des brochures. En outre, elle considère les données statistiques comme un aspect de linformation globale qui doit être diffusée pour sacquitter des nombreuses responsabilités qui incombent au système contre les accidents. Le système central de données des BG (Zentrales Informationssystem der Gesetzlichen Unfallversicherung (ZIGUV)), créé à cette fin en 1978, prépare la documentation voulue et la met à la disposition des BG.
La sécurité au travail en tant quapproche complète et interdisciplinaire requiert un accès optimal à linformation. Les BG en sont convaincues et elles ont ainsi contribué largement à lefficacité du système de sécurité au travail en Allemagne.
Les monts Métallifères sont exploités depuis le XIIe siècle et, dès 1470, les mines dargent ont attiré lattention sur cette région. Vers lan 1500, les premières déclarations dune maladie spécifique chez les mineurs sont apparues dans les écrits dAgricola (1556). En 1879, cette maladie a été identifiée par Haerting et Hesse comme étant un cancer du poumon, mais, à cette époque, sa cause nétait pas clairement établie. En 1925, «le cancer du poumon de Schneeberg» a été ajouté à la liste des maladies professionnelles.
Le minerai à partir duquel Marie Curie a isolé le radium et le polonium provenait du crassier de Joachimstal (Jachymov) en Bohème. En 1936, les mesures du radon de Rajewsky près de Schneeberg ont confirmé le lien déjà présumé entre le radon dans les puits de mine et le cancer du poumon.
En 1945, lUnion soviétique intensifia son programme de recherche sur les armes atomiques. La prospection de luranium fut étendue aux monts Métallifères, étant donné que les conditions dexploitation minière y étaient plus favorables que dans les gisements soviétiques. A la suite des recherches initiales, toute la région fut placée sous administration militaire soviétique, et son accès fut limité.
De 1946 à 1990, la société soviétique Wismut (SAG), devenue ensuite la société germano-soviétique Wismut (SDAG)), a exploité luranium en Thuringe et en Saxe (voir figure 32.3). A cette époque, lUnion soviétique voulait absolument obtenir des quantités suffisantes duranium afin de construire sa première bombe atomique. On ne disposait pas du matériel adéquat, et la quantité nécessaire duranium ne pouvait être produite quen passant outre aux normes de sécurité. Les conditions de travail ont été particulièrement déplorables de 1946 à 1954. Selon un rapport médical de la SAG Wismut, 1 281 mineurs sont morts dans des accidents et 20 000 ont subi des lésions ou ont vu leur état de santé se dégrader, précisément au cours des six derniers mois de 1949.
Dans lAllemagne de laprès-guerre, lUnion soviétique considérait lexploitation de luranium comme une forme de réparation. Les prisonniers, les conscrits et les «volontaires» étaient mobilisés, mais, tout au début, il ny avait guère de personnel qualifié. Wismut a employé en tout entre 400 000 et 500 000 personnes (voir figure 32.4).
Des conditions de travail déplorables, labsence de technologie adéquate et lintense pression exercée sur les travailleurs ont conduit à un nombre daccidents et de maladies extrêmement élevé. Les conditions de travail se sont améliorées très progressivement à partir de 1953, lorsque lAllemagne est entrée comme partenaire dans la société soviétique.
Le forage à sec, qui produit de grandes quantités de poussières, a été utilisé de 1946 à 1955. En raison de labsence de ventilation artificielle, les travailleurs étaient exposés à des concentrations élevées de radon. En outre, leur état de santé était altéré par la charge de travail extrêmement lourde due à labsence de matériel et déquipements de sécurité et à la durée des postes de travail (200 heures par mois).
Le niveau dexposition variait en fonction de la période et du puits. La mesure systématique de lexposition était également effectuée au cours de différentes phases, comme le montre la figure 32.5. Les expositions aux rayonnements ionisants (heures ouvrées par mois (HOM)) ne peuvent être données que de manière très approximative (voir tableau 32.13). Les comparaisons avec les expositions aux rayonnements observées dans dautres pays, les mesures effectuées dans des conditions expérimentales, et létude des registres permettent aujourdhui destimer de façon beaucoup plus précise le niveau dexposition.
Année |
HOM/année |
1946–1955 |
30 – 300 |
1956–1960 |
10 – 100 |
1961–1965 |
5 – 50 |
1966–1970 |
3 – 25 |
1971–1975 |
2 – 10 |
1976–1989 |
1 – 4 |
Outre lexposition intensive aux poussières minérales, dautres facteurs associés à certaines maladies étaient présents, tels que les poussières duranium, larsenic, lamiante et les émissions de gaz produits par les explosions. On a observé les effets physiques du bruit, des vibrations main-bras et des vibrations transmises à lensemble du corps. Dans ces conditions, les silicoses et les cancers broncho-pulmonaires dus aux rayonnements dominent les pathologies professionnelles de 1952 à 1990 (voir tableau 32.14).
|
Liste no BKVO 1 |
Nombre absolu |
% |
Maladies dues au quartz |
40 |
14 733 |
47,8 |
Affections précancéreuses ou cancéreuses dues aux rayonnements ionisants |
92 |
5 276 |
17,1 |
Syndromes des vibrations |
54 |
|
|
Affections des tendons et des articulations des membres |
71–72 |
4 950 |
16,0 |
Déficit auditif dû au bruit |
50 |
4 664 |
15,1 |
Affections cutanées |
80 |
601 |
1,9 |
Autres |
|
628 |
2,1 |
Total |
|
30 852 |
100 |
1 Classification des maladies professionnelles de l’ancienne RDA.
Source: Rapports annuels du système de santé de Wismut.
Bien quavec le temps, les services de santé de SAG/SDAG Wismut aient apporté aux mineurs de meilleurs soins, y compris des examens médicaux annuels, les effets sur la santé de lextraction du minerai nont pas été systématiquement analysés. Les conditions de travail et de production ont été tenues secrètes; les entreprises Wismut étaient autonomes et constituaient, en matière dorganisation, un «Etat dans lEtat».
Lampleur de ces événements na été connue quen 1989-1990 avec la disparition de la République démocratique allemande (RDA). En décembre 1990, lexploitation de luranium a été interrompue en Allemagne. Depuis 1991, les associations professionnelles (Berufsgenossenschaften (BG)) responsables de la prévention, de lenregistrement et de la réparation, en tant que prestataires de lassurance obligatoire contre les accidents, sont chargées denregistrer et dindemniser la totalité des accidents et des maladies professionnelles associés aux précédentes activités de Wismut. Leur rôle est donc dapporter les meilleurs soins médicaux possibles aux victimes et de recueillir toutes les informations utiles relatives à la sécurité et à la santé au travail.
En 1990, environ 600 demandes de réparation liées à des cancers broncho-pulmonaires avaient été déposées auprès du système dassurance sociale de Wismut; quelque 1 700 cas de cancer du poumon avaient été rejetés au cours des années précédentes. Depuis 1991, létude de ces dossiers a été poursuivie ou reprise par les BG responsables. Sur la base de projections scientifiques (Jacobi, Henrichs et Barclay, 1992; Wichmann, Brüske-Hohlfeld et Mohner, 1995), on estime que, pour les dix prochaines années, 200 à 300 cas de cancer broncho-pulmonaire par an seront reconnus comme des maladies professionnelles contractées à Wismut.
Les conditions de travail et de production à SDAG Wismut ont laissé leur marque sur les travailleurs et lenvironnement de la Thuringe et de la Saxe. Conformément à la législation de la République fédérale dAllemagne, le gouvernement fédéral sest chargé dassainir lenvironnement dans la région touchée. Le coût de ces activités pour la période 1991-2005 a été estimé à 13 milliards de DM.
Après lunification de lAllemagne en 1990, les BG, en tant que prestataires de lassurance obligatoire contre les accidents, ont également été chargées de soccuper des maladies professionnelles dans lancienne RDA. En raison des conditions particulières de Wismut, elles ont décidé dorganiser une unité spéciale de sécurité et de santé au travail pour le complexe de Wismut. Tout en respectant les dispositions légales destinées à protéger la confidentialité des données personnelles, elles se sont efforcées dobtenir les rapports sur les conditions de travail antérieures. Par conséquent, lors de la fermeture de lentreprise pour raisons économiques, toutes les preuves qui pouvaient éventuellement servir pour justifier les demandes des travailleurs en cas de maladie ont été récupérées. Le bureau central de soins de Wismut (ZeBWis), créé par la fédération des BG le 1er janvier 1992, a été chargé de diagnostiquer précocement les cas pathologiques, de les traiter et dassurer la réadaptation des malades.
Le ZeBWis se propose dapporter les soins médicaux appropriés aux anciens salariés des mines duranium, et quatre tâches essentielles pour la surveillance de la santé se sont dégagées à cette fin:
Les travailleurs exposés sont soumis à des examens de dépistage afin de sassurer dun diagnostic précoce aussi souvent que possible. Les aspects éthique, scientifique et économique de ces techniques de dépistage impliquent un débat de fond qui dépasse les limites du présent article.
Fondé sur les principes bien établis dune association professionnelle, un programme de médecine du travail a été mis au point pour la réalisation dexamens médicaux spécialisés. Des protocoles dexamens utilisés dans les exploitations minières et dans les programmes de radioprotection y ont été intégrés. Les différents éléments de ce programme correspondent aux principaux agents dexposition: poussières, rayonnements et autres substances dangereuses. La surveillance médicale actuelle des anciens travailleurs de Wismut est principalement orientée vers le diagnostic et le traitement précoces des cancers broncho-pulmonaires dus à lexposition aux rayonnements ionisants ou à dautres agents cancérogènes. Alors que les liens entre ce type de rayonnements et les cancers du poumon sont clairement établis, les effets sur la santé des radio-expositions à faible dose et de longue durée ont été moins étudiés. Les connaissances actuelles se fondent sur lextrapolation de données provenant des survivants des explosions atomiques dHiroshima et de Nagasaki, ainsi que de données relatives à dautres études internationales sur les mineurs duranium.
La situation en Thuringe et en Saxe est exceptionnelle du fait quun nombre bien plus important de personnes y a subi une variété dexpositions beaucoup plus grande. Cette expérience peut ainsi conduire à de nombreuses améliorations des connaissances scientifiques. Des études fondées sur les données récentes devraient porter sur linteraction entre les rayonnements ionisants et lexposition aux agents cancérogènes comme larsenic, lamiante ou les fumées des moteurs diesel dans lapparition dun cancer du poumon. Le dépistage précoce des cancers broncho-pulmonaires au moyen de techniques modernes devrait représenter une part importante des recherches prospectives.
Face à ces graves problèmes de maladies et daccidents, Wismut avait créé son propre service de santé chargé deffectuer notamment des tests de dépistage annuels, comprenant des radiographies pulmonaires. Par la suite, des unités détude dautres maladies professionnelles ont été constituées. Etant donné que le service de santé de Wismut était chargé non seulement de la médecine du travail, mais également des soins médicaux complets destinés aux salariés et aux personnes à leur charge, SDAG Wismut avait recueilli en 1990 un grand nombre dinformations relatives à la santé de ses salariés de lépoque et de ses anciens. En plus des informations détaillées sur les examens médicaux et des dossiers complets sur les maladies professionnelles, les archives de lentreprise contiennent plus de 792 000 radiographies.
A Stollberg, le système de santé de Wismut disposait dun service central danatomopathologie qui pratiquait des examens histologiques et anatomopathologiques sur les mineurs et les habitants de la région. En 1994, ces résultats ont été remis au Centre allemand de recherche sur le cancer (DKFZ) à Heidelberg, à des fins de recherche et de sauvegarde. Une partie des archives de lancien système de santé ont tout dabord été reprises par le système dassurance obligatoire contre les accidents. Pour ce faire, le ZeBWis a constitué des archives temporaires au puits 371 à Hartenstein (Saxe).
Ces archives sont employées pour traiter les plaintes, préparer et administrer les soins médicaux et conduire des études scientifiques. Outre lutilisation quen font les BG, les archives peuvent être consultées par des experts et des médecins dûment autorisés dans le cadre de leurs travaux cliniques et de la prise en charge de tout ancien salarié.
Lessentiel de ces archives consiste en des dossiers complets de maladies professionnelles (45 000) qui ont été récupérés, des fiches de recherche des maladies professionnelles correspondantes (28 000), des fiches de recherche pour la surveillance des personnes exposées aux poussières (200 000) et des documents contenant les résultats des examens médicaux daptitude et de contrôle. De plus, les rapports dautopsie du service danatomopathologie de Stollberg ont également été déposés aux archives du bureau central de soins de Wismut.
Ces rapports dautopsie et les fiches de recherche des maladies professionnelles ont entre-temps été préparés pour le traitement des données. Ces deux types de sources dinformations seront utilisées dans létude épidémiologique détaillée sur 60 000 personnes, conduite par le ministère fédéral de lEnvironnement.
Outre les données relatives aux expositions au radon et aux produits de la décomposition du radon, les associations professionnelles portent un intérêt tout particulier aux archives sur les expositions des anciens salariés à dautres agents toxiques. Ainsi, lactuelle Wismut GmbH dispose de résultats de mesures sous forme de liste disponible pour consultation, du début des années soixante-dix à nos jours, des poussières de silice, damiante, de métaux lourds, de bois et dexplosifs, des vapeurs toxiques, des fumées de soudage, des émissions de moteur diesel, du bruit, des vibrations transmises à lensemble du corps ou à une partie du corps et de la lourde charge de travail physique. Pour ce qui concerne la période de 1987 à 1990, les résultats individuels sont archivés dans des fichiers informatiques.
Ces informations ont leur importance pour une analyse rétrospective des expositions subies par les travailleurs pendant lexploitation de luranium par Wismut. Elles peuvent également servir à létablissement, à des fins de recherche, dune matrice mettant en relation expositions et emplois.
Enfin, dautres rapports sont conservés dans le service chargé de sauvegarder les données relatives à la santé chez Wismut GmbH: les dossiers des anciens patients des services de soins ambulatoires, les déclarations daccident déposées par lancienne société et par les inspecteurs de la sécurité au travail, les rapports cliniques de médecine du travail, les tests biologiques dexposition, la réadaptation professionnelle et les déclarations de maladies néoplasiques.
Cependant, les archives de Wismut principalement sur papier nétaient pas toutes destinées à une évaluation centralisée. Aussi, au terme de la liquidation de SDAG Wismut le 31 décembre 1990 et de son système de santé, la question était de savoir que faire de ces dossiers dun intérêt exceptionnel.
La première tâche du bureau central de soins de Wismut (ZeBWis) a consisté à identifier les personnes qui avaient travaillé sous terre ou dans les usines de préparation et à savoir où elles se trouvaient actuellement. Les holdings comptent quelque 300 000 personnes. Peu de dossiers de la société pouvaient être utilisés en létat pour le traitement des données et il a fallu procéder fiche par fiche et réunir les fichiers dune vingtaine de sites.
La deuxième étape a été de recueillir les statistiques de létat civil et les adresses de ces personnes. Les informations recueillies dans les anciens dossiers du personnel et sur les fiches de salaires nétaient daucune utilité dans ce cas précis. Les anciennes adresses nétaient plus les bonnes, notamment parce que les rues, les places et les routes avaient été rebaptisées après la signature du traité dunification. Le bureau central de létat civil de lancienne RDA na, lui non plus, été daucune utilité, ses informations nétant alors plus complètes.
Lassociation des caisses de retraite allemandes a permis de retrouver les adresses de presque 150 000 personnes auxquelles on a proposé des soins médicaux gratuits.
Une matrice emplois-expositions a été établie à partir du dossier dit «antécédents professionnels» qui donne au médecin examinateur un aperçu des risques et des expositions auxquels le patient a pu être soumis.
Environ 125 médecins du travail ayant suivi une formation spéciale et disposant dune expérience dans le diagnostic des maladies associées aux rayonnements ionisants et aux poussières ont été recrutés pour les examens. Ils travaillent sous la direction du ZeBWis et sont répartis dans toute la République fédérale, afin que les personnes atteintes puissent subir lexamen en question à proximité de leur domicile. Grâce à la formation intensive suivie par les médecins participants, des examens types de bonne qualité sont effectués dans tous les lieux prévus. La distribution de formulaires identiques suffisamment à lavance a permis de collecter toutes les informations utiles conformément aux normes établies et de saisir ces informations dans les centres de données du ZeBWis. En optimisant le nombre de dossiers, chaque médecin examinateur procède chaque année à un nombre suffisant dexamens, ce qui enrichit son expérience et contribue à sa vigilance. Grâce à un échange régulier dinformations et à une formation continue, les médecins ont accès en permanence aux dernières données. Tous les médecins examinateurs sont formés à la lecture des radiographies pulmonaires, conformément aux instructions du Bureau international du Travail de 1980 (BIT, 1980).
Les données, en constante augmentation puisque les examens continuent, sont spécialement destinées à informer des résultats préliminaires pertinents les médecins et les spécialistes de lévaluation des risques qui participent au programme de dépistage des maladies professionnelles. Elles permettent en outre de sintéresser à des symptômes ou à des maladies spécifiques apparaissant dans certaines situations à risque.
En comparant le nombre de personnes qui travaillaient pour Wismut soit sous terre, soit dans les usines de préparation, avec le nombre de personnes occupées dans les mines duranium en Occident, il est évident que, malgré quelques lacunes importantes, les données dont on dispose constituent un matériel extraordinaire doù tirer de nouvelles connaissances scientifiques. Alors que létude générale de Lubin et coll. (1994) sur le risque de cancer du poumon portait sur environ 60 000 sujets et 2 700 cas de cancer du poumon dans 11 études, on dispose aujourdhui de données sur quelque 300 000 anciens salariés de Wismut. A ce jour, 6 500 personnes au moins ont succombé à un cancer du poumon dû aux rayonnements. Ajoutons que Wismut na jamais recueilli dinformations relatives aux nombreuses personnes exposées soit aux rayonnements ionisants, soit à dautres agents.
Un bon diagnostic des maladies professionnelles et la recherche scientifique ont besoin dinformations aussi précises que possible sur lexposition. Cette nécessité a été prise en considération dans deux projets de recherche parrainés ou effectués par les associations professionnelles. Une matrice emplois-expositions a été mise au point en réunissant les mesures disponibles sur les sites, en analysant les données géologiques, en utilisant les informations sur les chiffres de production et, dans certains cas, en reconstituant les conditions de travail des premières années dactivité de Wismut. Ce type de données est indispensable pour parvenir à mieux comprendre, au moyen denquêtes comparatives de cohortes ou denquêtes cas-témoins, la nature et lampleur des maladies associées aux mines duranium. De cette façon, on comprendra mieux aussi les effets dune exposition à de faibles doses de rayonnement pendant une longue durée, et les effets cumulatifs des rayonnements, des poussières et autres matériaux cancérogènes. Des études sur ces questions sont en cours ou prévues. Grâce à des échantillons biologiques prélevés dans les anciens laboratoires danatomopathologie de Wismut, de nouvelles connaissances scientifiques peuvent émerger en ce qui concerne le type de cancer du poumon et les interactions entre les poussières silicogéniques et les rayonnements, ainsi que dautres matières cancérogènes dangereuses inhalées ou ingérées. De tels projets sont actuellement mis en uvre par le Centre allemand de recherche sur le cancer (DKFZ). Les instituts allemands de recherche collaborent avec dautres organismes comme le NIOSH et lInstitut national contre le cancer (National Cancer Institute (NCI)) aux Etats-Unis, ainsi quavec des groupes de travail au Canada, en France et en République tchèque pour étudier les données relatives aux différentes expositions.
On ne comprend pas encore très bien dans quelle mesure des affections malignes autres que le cancer du poumon peuvent se développer à partir de lexposition aux rayonnements au cours de lexploitation du minerai duranium. A la demande des associations professionnelles, un modèle expérimental mis au point par Jacobi et Roth (1995) doit établir dans quelles circonstances des conditions de travail comme celles de Wismut peuvent être à lorigine dun cancer de la bouche et de la gorge, du foie, des reins, de la peau ou des os.
Des articles du présent chapitre exposent les principes généraux de la surveillance médicale des maladies professionnelles et de la surveillance de lexposition. Nous présenterons ici quelques-uns des principes des méthodes épidémiologiques qui peuvent répondre aux besoins de la surveillance. Lapplication de ces méthodes doit tenir compte des principes de base des mesures physiques, ainsi que des pratiques de la collecte de données épidémiologiques type.
Lépidémiologie peut quantifier lassociation entre lexposition non professionnelle et professionnelle aux facteurs de risque physico-chimiques et lévolution des maladies et des comportements; elle peut ainsi apporter des informations servant à mettre au point des programmes de prévention et dintervention (Coenen, 1981; Coenen et Engels, 1993). La disponibilité des données et laccès aux dossiers personnels et professionnels dictent généralement léconomie de ces études. Dans les circonstances les plus favorables, les expositions peuvent être déterminées par des mesures de lhygiène du travail effectuées dans lusine ou latelier de production, et les examens médicaux des travailleurs servent à évaluer les effets éventuels de lexposition sur la santé. Ces évaluations peuvent être réalisées de façon prospective sur quelques mois ou quelques années, afin destimer les risques de maladies telles que le cancer. Cependant, il arrive plus souvent que les expositions passées doivent être reconstituées dans le temps, en projetant en amont les niveaux actuels ou en utilisant les mesures enregistrées dans le passé, ce qui ne satisfait pas toujours complètement aux besoins dinformation. Nous exposerons ici quelques directives en matière de documentation et de stratégies de mesures, ainsi que leurs limites, qui influent sur lévaluation épidémiologique des risques professionnels pour la santé.
Autant que possible, les mesures doivent être quantitatives plutôt que qualitatives, car les données quantitatives se prêtent à des techniques statistiques plus performantes. Les données observables sont généralement classées sous les formes suivantes: nominales ou catégorielles, ordinales, intervalles et rapports ou ratios. Les variables nominales sont des descripteurs qualitatifs qui ne différencient que les types, tels les différents services dans une usine ou les différentes branches dactivité. Les variables ordinales peuvent être classées de «faible» à «élevé», sans donner de plus amples informations quantitatives: ainsi, «exposé» par opposition à «non exposé», ou les antécédents de tabagisme classés en «non fumeur» (= 0), «petit fumeur» (= 1), «fumeur moyen» (= 2) et «grand fumeur» (= 3). Plus la valeur numérique est élevée, plus lintensité du tabagisme est importante. La plupart des valeurs de mesure sont exprimées sous forme déchelles de rapport ou dintervalle: par exemple, une concentration de 30 mg/m3 est le double dune concentration de 15 mg/m3. Les variables de rapport contiennent un zéro absolu (comme lâge), contrairement aux échelles dintervalle (comme le QI).
La stratégie de mesure tient compte des informations relatives au site de la mesure, aux conditions environnantes (humidité, pression atmosphérique) au cours de cette opération, à sa durée et à la technique utilisée (Hansen et Whitehead, 1988; Ott, 1993).
Les dispositions légales imposent souvent la mesure des niveaux de substances dangereuses pendant des moyennes pondérées sur huit heures (Time-Weighted Averages (TWAs)). Cependant, tout le monde ne travaille pas toujours pendant un poste de huit heures, et les niveaux dexposition peuvent fluctuer pendant le poste. Une valeur mesurée pour le poste dune personne peut être considérée comme représentative dune valeur dun poste de huit heures si la durée de lexposition y est supérieure à six heures. Critère pratique, la durée dune prise déchantillon devrait être dau moins deux heures. Si les intervalles sont trop courts, le prélèvement de léchantillon pendant un seul poste peut accuser des concentrations supérieures ou inférieures et les faire surestimer ou sous-estimer au cours de ce poste (Rappaport, 1991). Par conséquent, il convient de combiner plusieurs mesures, détablir une moyenne pondérée des mesures de plusieurs postes, ou dutiliser des mesures répétées avec des prélèvements de plus courte durée.
Les données de surveillance doivent satisfaire à des critères bien établis. La technique de mesure ne devrait pas influer sur les résultats au cours de lopération (réactivité). En outre, la mesure doit être objective, fiable et valide. Les résultats ne devraient pas être modifiés ni par la technique utilisée (objectivité dexécution), ni par la documentation ou la lecture du technicien chargé de la mesure (objectivité dévaluation). Les mêmes valeurs devraient être obtenues dans les mêmes conditions (fiabilité), la substance ou lexposition visée devrait être mesurée (validité), et les interactions avec dautres substances ou expositions ne devraient pas influer indûment sur les résultats.
Sources des données. Selon un principe de base en épidémiologie, les mesures effectuées au niveau individuel sont préférables à celles qui le sont au niveau du groupe. Par conséquent, la qualité des données de surveillance épidémiologique décroît dans lordre suivant:
En principe, il faut toujours privilégier la détermination de lexposition la plus précise, utilisant des valeurs relevées au cours du temps. Malheureusement, les niveaux dexposition consignés indirectement ou reconstitués sont souvent les seules données disponibles pour évaluer les relations entre lexposition et la maladie, bien que des différences considérables existent entre les expositions mesurées et les valeurs dexposition reconstituées à partir des entretiens et des dossiers de lentreprise (Ahrens et coll., 1993; Burdorf, 1995). La qualité des données décroît dans lordre suivant: mesures de lexposition, indice dexposition liée à lactivité, informations données par lentreprise, entretiens avec les salariés.
Echelles dexposition. Le besoin de données quantitatives en matière de surveillance et dépidémiologie dépasse largement les obligations légales limitées aux valeurs-seuils. Lobjectif dune recherche épidémiologique est détablir des relations dose-effet, en tenant compte des facteurs de confusion potentiels. Il ne faudrait utiliser que les informations les plus précises possibles qui, en général, ne peuvent être exprimées que sous forme dune valeur élevée sur une échelle de rapport, par exemple. La subdivision en valeurs limites plus ou moins élevées, ou le codage en fractions de ces valeurs (exemple, 1/10, 1/4, 1/2) que lon utilise parfois, repose essentiellement sur des données mesurées sur une échelle de variables ordinales statistiquement moins précise.
Autres documents nécessaires. Outre les informations relatives aux concentrations, au matériel et au moment de la mesure, les conditions de mesures externes devraient être notées: description du matériel utilisé, technique de mesurage, raison dêtre du mesurage, autres détails techniques importants. Lobjectif de cette documentation est dassurer luniformité des mesures au cours du temps et dune étude à une autre, et de permettre de comparer les études.
Les données relatives aux expositions et à létat de santé, recueillies pour chaque individu, sont généralement soumises aux lois sur la protection de la vie privée qui varient dun pays à un autre. La documentation relative aux expositions et à létat de santé doit évidemment sy conformer.
Lobjectif des études épidémiologiques est détablir une relation de cause à effet entre lexposition et la maladie. Nous examinerons certains aspects des mesures de surveillance qui influent sur cette évaluation épidémiologique du risque.
Type de maladie. Un point de départ commun aux études épidémiologiques est lobservation clinique de laugmentation du nombre de cas dune maladie particulière dans une entreprise ou un domaine dactivité. Des hypothèses sont émises sur les facteurs potentiels de causalité de nature physique, chimique ou biologique. Selon que lon dispose ou non de données, ces facteurs (expositions) sont étudiés au moyen dune étude prospective ou rétrospective. Le temps qui sécoule entre le début de lexposition et lapparition de la maladie (latence) influe également sur le type détude. Le temps de latence peut être important. Les infections associées à certains entérovirus ont un temps de latence ou dincubation de deux à trois heures, alors que les délais de latence de 20 à 30 ans sont caractéristiques des cancers. Ainsi, pour une étude sur le cancer, les données relatives aux expositions doivent couvrir une période beaucoup plus importante que pour une étude sur lapparition dune maladie infectieuse. Les expositions qui remontent à un passé lointain peuvent être toujours dactualité lorsque la maladie se déclare. Dautres maladies associées à lâge, telles que les maladies cardio-vasculaires et les accidents cérébraux, peuvent apparaître dans le groupe exposé après le début de létude et doivent être traitées comme des causes concurrentes. Il est également possible que les personnes classées sous la rubrique «non malades» soient simplement des personnes qui nont pas encore montré de signes cliniques de maladie. Par conséquent, la surveillance médicale continue des populations exposées doit être poursuivie.
Puissance statistique. Comme nous lavons mentionné, les mesures devraient être exprimées sous forme dune valeur aussi élevée que possible sur une échelle de rapport, afin doptimiser la puissance statistique et de produire des résultats statistiquement significatifs. La puissance, quant à elle, dépend de la taille de la population totale étudiée, de la prévalence de lexposition dans cette population, de la fréquence générale de la maladie et de limportance du risque de la maladie associée à lexposition qui fait lobjet de létude.
Classification recommandée des maladies. Il existe plusieurs systèmes de codage des diagnostics cliniques. Les plus courants sont la CIM-9 (Classification internationale des maladies) et le système SNOMED (Nomenclature systématique de médecine) (System-atic Nomenclature of Medicine (SNOMED)). La CIM-O (onco-logie) est une classification particulière de la CIM pour coder les cancers. Lutilisation de codes CIM est légalement recommandée dans un grand nombre de systèmes de santé dans le monde entier, en particulier dans les pays occidentaux. Cependant, le SNOMED peut également coder les facteurs éventuels de causalité et les conditions externes. Un grand nombre de pays ont mis au point des classifications spécialisées pour coder les accidents et les maladies. Ces systèmes incluent également les circonstances de laccident ou de lexposition (voir les articles «Etude de cas: la protection des travailleurs et les statistiques des accidents du travail et des maladies professionnelles HVBG, Allemagne» et «La mise au point et lapplication dun système de classification des accidents du travail et des maladies professionnelles», dans le présent chapitre).
Les mesures faites à des fins scientifiques ne sont pas liées par les obligations légales qui sappliquent aux activités de surveillance prescrites, telles que lobligation de vérifier si les limites de seuil ont été dépassées dans un lieu de travail donné. Il est utile dexaminer les dossiers et les mesures dexposition de façon à vérifier les écarts possibles (voir, par exemple, larticle «La surveillance des risques professionnels» dans le présent chapitre).
Traitement des expositions mixtes. Les maladies ont souvent différentes origines. Par conséquent, il est nécessaire denregistrer les facteurs de causalité présumés (expositions/facteurs de confusion) de la façon la plus complète possible afin de pouvoir distinguer les effets des divers facteurs de risque présumés et les différencier de ceux dautres facteurs concurrents ou susceptibles dengendrer la confusion, tels que le tabagisme. Les expositions professionnelles sont souvent mixtes (mélanges de solvants; fumées de soudage, comme le nickel et le cadmium; dans les exploitations minières, les poussières fines, le quartz et le radon). Le tabagisme, la consommation excessive dalcool, une mauvaise nutrition et lâge font partie des facteurs de risque additionnels pour les cancers. Outre les expositions aux produits chimiques, les expositions aux facteurs physiques (vibrations, bruit, champs électromagnétiques) sont déventuels facteurs déclenchants de maladies et doivent être considérés comme des facteurs de causalité possibles dans les études épidémiologiques.
Les expositions aux agents ou aux multiples contraintes peuvent donner lieu à des interactions: leffet dune exposition peut être exacerbé ou atténué par une autre qui survient en même temps. Le lien entre lamiante et le cancer du poumon, qui est beaucoup plus prononcé chez les fumeurs, en est un exemple type. La sclérodermie évolutive généralisée, qui est probablement causée par lassociation dune exposition aux vibrations, aux mélanges de solvants et à la poussière de quartz, est un exemple dinteraction chimique et physique.
Prise en compte des biais. Un biais est une erreur systématique relative au classement des personnes dans les groupes «exposé/non exposé» ou «malade/non malade». Deux types de biais doivent être distingués: lerreur dobservation (information) et lerreur de sélection. Dans le premier cas, différents critères peuvent être utilisés pour classer les sujets dans les groupes «malade/non malade». Ce biais apparaît parfois quand une étude vise des personnes qui exercent une profession connue pour être dangereuse et qui peuvent être déjà sous surveillance médicale étroite par rapport à une population témoin.
Pour ce qui concerne le biais de sélection, il faudrait distinguer deux possibilités. Les études rétrospectives (ou études cas-témoins) consistent à séparer les personnes atteintes de la maladie en cause de celles qui ne le sont pas, puis à examiner les différences dexposition entre ces deux groupes; les études prospectives (ou études de cohortes) déterminent les taux de maladie dans des groupes ayant subi des expositions différentes. Quel que soit le type détude, le biais de sélection existe quand les informations relatives à lexposition ont une incidence sur le classement des sujets en «malades» ou «non malades», ou quand les informations relatives à la maladie influent sur le classement des sujets en «exposés» ou «non exposés». Un exemple fréquent de biais de sélection dans les études de cohortes est l«effet du travailleur sain», que lon rencontre quand les taux de maladie chez les travailleurs exposés sont comparés à ceux de la population générale. Cela peut entraîner une sous-estimation du risque de maladie, car les populations actives sont souvent sélectionnées à partir de la population générale sur la base dune bonne santé, fréquemment vérifiée par un examen médical, alors que la population générale comprend en fait des malades et des infirmes.
Facteurs de confusion. La confusion est le phénomène dans lequel une troisième variable (le facteur de confusion) altère lévaluation dune association entre un facteur présumé et une maladie. Ce phénomène survient quand la sélection des sujets (cas et témoins dans une étude rétrospective, ou «exposés» et «non exposés» dans une étude de cohortes) dépend en quelque sorte de la troisième variable, éventuellement sans que linvestigateur sen aperçoive. Les variables associées uniquement à lexposition ou à la maladie ne sont pas des facteurs de confusion. Pour être un facteur de confusion, une variable doit satisfaire à trois conditions:
Avant la collecte de données pour une étude, il est parfois impossible de prévoir si une variable est susceptible dêtre un facteur de confusion. Une variable traitée en tant que facteur de confusion dans une étude antérieure peut ne pas être associée à lexposition dans une nouvelle étude sur une population différente et, par conséquent, ne pas en constituer un dans la nouvelle étude. Par exemple, si tous les sujets présentent une même variable (comme le sexe), cette variable ne peut pas constituer un facteur de confusion dans une étude particulière. On estime quun facteur de confusion nest pris en compte que si la variable est mesurée en même temps que lexposition et les cas de maladie. Le phénomène de confusion peut être sommairement contrôlé au moyen de la stratification par la variable de confusion ou, plus précisément, au moyen dune droite de régression ou dautres techniques danalyse de données à plusieurs variables.
Les exigences relatives à la stratégie et à la technique de mesure du risque et aux informations sur les lieux de travail industriels sont parfois définies légalement en termes de surveillance des valeurs limites. La réglementation relative à la protection des données sapplique également à la protection des secrets industriels et des données personnelles. La comparabilité des conditions et des résultats des mesures, ainsi quune technique dévaluation objective, valable et fiable, font partie intégrante de ces exigences. Des exigences supplémentaires imposées par lépidémiologie concernent la représentativité des mesures et la possibilité détablir des liens entre les expositions subies par les individus et les états pathologiques qui sensuivent. Les mesures peuvent être représentatives de certaines tâches, cest-à-dire quelles peuvent refléter lexposition caractéristique associée à certaines activités ou à des branches spécifiques, ou lexposition typique de certains groupes de personnes. Il serait bon que les mesures soient directement attribuées aux sujets de létude. Il serait alors nécessaire dajouter à la documentation relative aux mesures des informations sur les opérateurs présents sur le lieu de travail concerné au cours de ces mesures ou détablir un registre permettant cette attribution directe. Les données épidémiologiques recueillies au niveau individuel sont généralement préférables à celles qui sont obtenues à celui des groupes.
Afin de comprendre limportance des problèmes de santé au travail en Chine, le ministère de la Santé publique (MSP) a organisé un certain nombre denquêtes nationales, dont:
Les résultats de ces enquêtes ont servi à lélaboration de règles et de principes nationaux. En même temps, un système national de déclaration de létat de santé au travail a été établi par le MSP. Un rapport annuel de la situation nationale de la santé au travail est publié depuis 1983. Les données sont compilées et analysées par le Centre national de déclaration de létat de santé au travail (National Center of Occupational Health Reporting (NCOHR)) et sont ensuite communiquées au MSP. Il existe des services locaux de déclaration qui relèvent des instituts de la santé au travail (Occupational Health Institutes (OHIs)) ou des centres de prévention des épidémies (Health Epidemic Prevention Stations (HEPS)), et ce à tous les niveaux, du district à la province. Les déclarations sont compilées chaque année à chacun de ces niveaux, mais, si une intoxication aiguë survient et provoque au minimum trois cas dintoxication ou un décès, cet accident doit être déclaré à lOHI local et directement au MSP dans les vingt-quatre heures par les services médicaux contactés en premier lieu. Les informations à notifier chaque année sont les suivantes: les nouveaux cas enregistrés de maladies professionnelles ouvrant droit à réparation, les résultats des examens médicaux des travailleurs et la surveillance des milieux de travail. La Chine est en train de généraliser linformatisation du système de déclaration et de développer son réseau informatique qui sétend actuellement du centre national aux services provinciaux.